Il se fait tard, la noirceur envahi la Cité et Emérya, elle doit retrouver sa demeure. Elle aimerait profiter un peu plus de cette liberté qui s'offre à elle, mais elle ne peut pas. Elle est en ville depuis plusieurs heures déjà, elle doit rentrer. Elle a de plus en plus de mal à gérer sa vie, à gérer la pression que sa mère met sur elle. Elle a l'impression d'être une gamine, alors qu'elle n'en est plus une, elle a l'impression d'être une fillette surprotégée, mais elle ne l'est plus. Elle est une femme, mais elle a du mal à être celle qu'elle aimerait devenir. Elle se sent captive, emprisonnée et chaque jour ça devient plus lourd. Elle aime sa mère, elle l'adore, là n'est pas la question. Elle donnerait tout pour elle, car elle est la personne qui lui importe le plus sur cette terre, mais à quel prix ? Elle n'a qu'elle et Rheïane, elle n'a que sa chère fille. Elle comprend la douleur qu'elle a pu ressentir lorsqu'elle a perdue son fils, elle sait qu'elle a peur de la perdre, mais la sirène ne saisit pas qu'elle finira par lui glisser entre les doigts, si elle continue de la protéger ainsi. Elle a dix-neuf ans, elle est encore jeune, certes, mais à son âge, beaucoup de jeunes femmes sont déjà mariées, certaines ont déjà un enfant et elle, elle n'a rien de ça. Emérya, elle est sous l'emprise de sa mère et elle a l'impression que ça durera toute sa vie. C'est ce qui l'effraie, mais elle n'arrive pas à s'en défaire et elle ne veut pas la blesser.
La jeune sirène se faufile entre les ruelles, prenant un racourcie. Elle se fiche de la noirceur, ça ne l'effraie pas, bien au contraire. Elle aime les ténèbres, alors que les étoiles et la lune éclairent faiblement ses pas. Certains se sentent prisonniers lorsqu'il fait noir, ils se sentent oppressés, mais chez elle, c'est tout le contraire. La nuit est libératrice pour elle, réconfortante. Alors qu'elle emprunte une ruelle semblable à toutes les autres, elle entend des pas derrière elle. Emérya, elle se retourne, s'attendant à faire face à un quelconque humain, mais il n'y a personne. Elle fronce légèrement les sourcils et haussant les épaules, elle continue sa route, sans s'en soucier davantage. Peut-être n'était-ce que le fruit de son imagination parfois trop fertile. Quelques minutes s'écoulent, avant que de nouveaux pas se fassent entendre derrière elle et lorsqu'elle se retourne, ses iris claires se posent sur une frêle silhouette. Cette dernière la contourne rapidement sans s'arrêter et Emérya, elle continue sa route, sans plus de cérémonie.
La sirène bifurque dans une nouvelle ruelle, mais elle s'arrête nette avant de s'y enfoncer, tombant nez à nez avec un homme. Emérya, elle passe à deux doigts d'entrer en contact avec lui, mais elle s'arrête à quelques centimètres de son corps, passant très près de le heurter. C'est d'abord son visage qu'elle remarque en premier lieu et ensuite son regard fou. Mais la jeune femme, elle ne tarde pas à remarquer qu'il semble blessé. Emérya, elle plisse légèrement les yeux, l'observant, figée l'espace d'un instant.
Dernière édition par Emérya Firadrëll le Jeu 21 Juil 2016 - 22:51, édité 1 fois
But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.
Marcher en silence. Ne pas faire de vague, ne pas attirer l’attention. Capuchon rabattu sur sa tête, Aodren persévérait au milieu de la foule. Il avait sa cible à portée de main mais évidemment, il ne ferait rien là sous le regard de tous. L’assassin ne savait rien de cet homme maigre, pâle et a l’air nonchalant. Ce n’était pas son job de connaître les gens, de juger si oui ou non il méritait un tel châtiment. Il n’était pas juge, il n’était qu’un humble mercenaire. On l’avait payé, on lui avait donné un nom, désigné un visage. Aodren n’avait donc plus qu’à exécuter les ordres pour récolter le pactole. Mais voilà que sa cible se mit à courir, sans doute se sentait-il suivi. Le triton se glissa alors sur le côté, évitant la foule et avançant telle une ombre présageant un funeste destin.
L’individu prit des petites ruelles, erreur fatale car Aodren connaissait son terrain de jeu. Tel le chat traquant la souris avec malice, le triton s’engouffra dans d’autres chemins. Il savait qu’il tomberait nez à nez avec sa cible et qu’il n’aurait alors plus qu’à agir en conséquence. En effet, au bout de cinq petites minutes, son chemin croisa celui de l’homme pâle et svelte. Aodren l’attrapa par le col de la chemise, le plaqua contre le mur de pierre et fendit l’air d’un poignard aiguisé. L’autre ne se laissa pas faire, griffant avec ferveur la peau des bras de son assassin. Dans un dernier espoir, dicté uniquement par son instinct de survie, l’homme tenta même d’attaquer Aodren. Le triton l’acheva d’un coup violent à la nuque mais ne put l’empêcher de lui entailler le cou avec un petit caillou pointu.
Négligemment, Aodren jeta le corps au milieu de sacs à ordures et s’éloigna à grands pas. Quelques gouttes pourpres perlaient de son cou, tâchant sa chemise blanche. Ses avant-bras étaient griffés, affichant de fines lignes rougeâtres sur sa peau. Soudain, une demoiselle entra dans son champ de vision. Ce fut si inattendu que le triton dut se stopper net pour ne pas la heurter de plein fouet. Il ne mit qu’une seconde à reconnaître les boucles brunes et les lèvres bien pleines de la belle. Il ne connaissait pas son prénom mais il l’avait déjà croisée à de nombreuses reprises et sa silhouette avait réchauffé son cœur de triton solitaire.
- Excusez-moi mademoiselle, j’avançais un peu trop vite ...
Il réfléchit, c’était peut-être là l’occasion de la connaître mieux et d’engager la conversation. Aodren ne perdit donc pas un instant et ne cracha pas sur cette opportunité de gagner les faveurs de la belle. L’assassin esquissa un faux sourire gêné et reprit :
- Comme vous avez peut-être pu le remarquer, j’ai été pris dans une rixe entre deux ivrognes qui s’insultaient comme des chiffonniers ! J’étais pressé de sortir et de trouver de l’aide.
Aodren lui jeta un regard qui se voulait attendrissant et se mordilla la lèvre inférieure, feignant d’être extrêmement mal à l’aise à l’idée de déranger la jeune femme dans ses activités quotidiennes.
- Pourrais-je abuser de votre amabilité et vous demander de m’indiquer le chemin d’une personne capable de m’aider ? Ils m’ont touché au cou et je crois que ça saigne assez abondamment ...
L’homme porta deux doigts sa blessure et en ressortit ses phalanges couvertes de rouge. Dans un nouveau sourire faussement gêné, il jeta un regard à la belle brune. Son prénom, il allait l’obtenir et peut-être qu’avec un peu de chance, il aurait même un peu plus ...
« Excusez-moi mademoiselle, j’avançais un peu trop vite... » À ses paroles, la brune se réanime, elle se défige. Ses yeux défilent sur le visage de l'homme puis ensuite sur tout son corps, avant de remonter vers son visage. Quant à lui, l'homme esquisse un sourire gêné. « Comme vous avez peut-être pu le remarquer, j’ai été pris dans une rixe entre deux ivrognes qui s’insultaient comme des chiffonniers ! J’étais pressé de sortir et de trouver de l’aide. » Il lui semble mal à l'aise, mais il n'a pas à l'être. Il est blessé, peut-être même perdu et Emérya, elle ne peut que l'excuser. « Pourrais-je abuser de votre amabilité et vous demander de m’indiquer le chemin d’une personne capable de m’aider ? Ils m’ont touché au cou et je crois que ça saigne assez abondamment... » L'étranger touche sa blessure et ses doigts en ressortent couverts de sang. Emérya, elle l'observe l'espace d'un instant, sans dire un seul mot. Elle ne connait pas très bien Blidman's Bluff, pour l'unique et bonne raison que sa mère lui interdit de venir dans la Cité. Pourquoi ? Parce que selon Rheïane, c'est trop dangereux, mais bien évidement, la brune ne lui obéit pas toujours. Cependant, en ce moment, elle se trouve face à un mur, un piège, elle ne connait aucun médecin en ville. Elle a beau chercher, rien ne lui vient en tête, elle ne connait que les guérisseurs de la tribu Piccaninny.
« Pour être franche... je ne connais pas très bien la Cité... Mais, je sais que chez les Piccaninny, il y a des guérisseurs qui pourraient vous aider... Je peux vous y conduire, mais c'est à de nombreuses minutes de marche... » La sirène se mord légèrement la lèvre inférieure, visiblement navrée de ne connaître aucun médecin plus près. Elle aimerait l'aider, elle aimerait pouvoir lui indiquer un médecin tout près, mais elle ne le peut tout simplement pas. « Sinon, je peux tenter de trouver un médecin plus près d'ici... » Emérya, elle se passe une main sur le visage, sans le quitter des yeux. Ça se bouscule dans sa tête, elle cherche une solution facile, mais elle n'en connait pas. « Peut-être devrions-nous trouver un coin plus éclairé et regarder votre blessure de plus près... Tenter de la penser, en attendant de trouver un médecin ? » La jeune sirène n'est pas des plus à l'aise avec les blessures, avec le sang et visiblement, ça la met légèrement sur les nerfs que cet homme soit blessé et qu'elle n'y puisse pas grand chose.
Emérya, elle a tendance à lire facilement les pensées des gens, elle les bernes avec beaucoup de facilité, mais en ce moment, elle tombe facilement dans son piège. Il l'a pris au dépourvu avec cette blessure et elle ne pense à rien d'autre qu'à ça, en ce moment. La belle brune en oublie même sa mère qui doit attendre son arrivée, elle en oublie même les sermons qu'elle va lui servir pour lui avoir désobéit. À cet instant, ça ne compte pas, parce que l'état de santé de cet homme compte bien avant tout ça. Elle ne peut pas le laisser en plan dans une ruelle à se vider de sang. Ça serait totalement inhumain et bien qu'elle ne soit pas humaine, Emérya, elle a l'impression d'en être une et elle est de nature bonne. Les pensées se bousculent dans sa tête et malgré l'empressement qu'elle ressent, elle ne bouge pas, elle attend de voir ce que l'homme préfère, car elle ne veut rien lui imposer. Il est toujours conscient, il ne semble pas aux portes de la mort, donc c'est à lui de choisir, pas à elle.
But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.
Aodren se perdait dans les yeux d'un bleu troublant de la demoiselle. Sa blessure n'était pas mortelle, il le savait. Des balafres, des cicatrices, des hématomes et des marques, il en avait eu ! Être un assassin-mercenaire, ça ne peut pas avoir que des avantages. En plus, à Neverland, beaucoup de gens savaient bien se défendre et ne se laissaient clairement pas faire lorsqu'on approchait une lame de leur gorge. Aodren n'y pensait cela dit pas beaucoup. Il était trop occupé à tenter d'attirer l'attention de la jeune femme. Elle semblait perdue au début mais se ravisa et lui parut très sympathique, capable de s'arrêter dans sa journée de labeur pour venir en aide à un inconnu. C'était peut-être ce qu'il manquait à la vie du triton, une personne dotée d'un minimum d'empathie, d'un minimum de conscience. Autour de lui se bousculaient plutôt bourreaux, martyrs et cadavres.
Elle lui proposa d'aller au camp Piccaninny et durant une seconde, Aodren fit la grimace. Cela lui semblait loin et il se voyait mal se balader, le cou en sang, dans la forêt ou sur les sentiers. Mais la proposition restait bienveillante. La demoiselle surenchérit, lui proposant d'en chercher un plus près si besoin était. Aodren se posa la question une seconde, aurait-il fait tous ces efforts pour quelqu'un qu'il ne connaissait pas ? Bien sûr que non. Sauf peut-être si la personne en question avait le charme du visage angélique sous ses yeux.
- J'accepte votre aide avec plaisir.
La jeune femme lui proposa ensuite d'aller en lumière, de façon à ce qu'elle jette un oeil. Aodren acquiesça. Il n'était pas sûr qu'elle puisse faire grand-chose, surtout qu'elle ne devait pas avoir de nécessaire de soin sur elle. Mais peut-être un simple coup d'oeil sur les dégâts pouvait leur donner plus d'informations. Et puis le triton ne refuserait pas de passer un peu plus de temps avec elle. La demoiselle avait un charme certain mais l'homme en avait connu des femmes et il savait que, la plupart du temps, il fallait se méfier des apparences. À Neverland, un corps longiligne pouvait se transformer en une queue de sirène dès contact avec l'eau. Une poitrine généreuse pouvait dissimuler une petite arme à feu. De hautes cuissardes pouvaient réserver une surprise pointue. Aodren avait déjà eu à combattre des adversaires redoutables dans la gente féminine. Sous-estimer une femme était une erreur d'idiot.
Quelque chose lui disait cependant que la belle qu'il avait sous les yeux n'allait pas se révéler être un fruit empoisonné. Et puis quand bien même, Aodren était immunisé à ce genre de poisons-là. L'homme s'avança donc, la jeune femme derrière lui. Ils avancèrent vers une rue plus grande, mieux éclairée. Elle pourrait dès lors voir l'étendue des dégâts. Aodren se tourna vers elle, lui adressa un sourire.
- Je suis sincèrement désolé de vous infliger ça. Vous êtes prête ?
Le triton pencha légèrement la tête et écarta les doigts, laissant à la jeune femme tout le loisir de voir à quel point son cou avait été touché. Ce n'était pas une blessure si impressionnante que ça, il le savait. Le sang coulait mais ce n'était pas un véritable fleuve non plus. À vrai dire, Aodren aurait même pu se soigner lui-même mais il n'allait pas se priver de la compagnie agréable de la belle.
- Suis-je un cas désespéré ?
Il esquissa à nouveau un sourire, mieux valait dédramatiser la situation. Le but n'était pas de faire peur à la jeune femme ou d'attiser sa pitié mais plutôt de l'intéresser !
« J'accepte votre aide avec plaisir. » Elle lui sourit doucement, Emérya, avant de lui proposer de regarder sa blessure à la lumière, bien qu'elle soit peu à l'aise avec l'idée d'inspecter cette blessure de plus près. L'homme accepte cette nouvelle proposition et c'est en silence qu'ils s'avancent à travers la nuit. Suivant ses pas, Emérya, elle garde un oeil sur lui, s'assurant qu'il va bien, s'assurant qu'il ne défaille pas. Il n'est pas aux portes de la mort, mais la sirène sait qu'il faut être vigilent avec n'importe quelle blessure, car même celles qui semblent superficielles peuvent s'avérer mortelles à la fin. Elle ne sera donc pas rassurée avant de l'avoir vu de ses propres yeux.
Enfin, ils débouchent sur une plus grande rue, celle-ci bien éclairée et l'homme se retourne vers elle, étirant un sourire. « Je suis sincèrement désolé de vous infliger ça. Vous êtes prête ? » Étirant un sourire rassurant, elle acquiesce d'un léger signe de tête. L'homme penche alors la sienne et retire ses doigts, laissant la sirène regarder la plaie de plus près. Sur la pointe des pieds, la brune inspecte sa blessure, bien que la vue du sang lui déplaise grandement. Emérya, elle ne connait pas grand chose à la médecine, mais elle en connait assez pour savoir que cette balafre ne lui sera heureusement pas mortelle. Le sang ne s'écoule pas à flot, mais il aura sans aucun doute besoin de quelques points de suture, histoire que la plaie se referme et qu'elle guérisse bien, sans infection.
« Suis-je un cas désespéré ? » Il esquisse un nouveau sourire et elle répond à ce sourire, posant ses iris clairs dans ceux de l'homme. « Vous survivrez, mais il vous faudra quelques points de suture. » Emérya, elle se détourne de lui et se sépare du châle qui repose sur ses frêles épaules afin de s'en servir comme bandage de fortune. « En attendant, c'est le seul moyen que j'ai pour vous venir en aide. » Elle lui désigne le bout de tissu et sans attendre sa permission, elle recouvre la plaie et s'assure que le bandage soit suffisamment serré pour stopper le flot de sang, tout en prenant précaution de ne pas lui causer trop de douleur. « Voilà... c'est le mieux que je peux faire... » Elle se mord légèrement la lèvre inférieure, navrée de ne pas pouvoir en faire davantage pour lui. Elle n'a rien d'un médecin ou d'une guérisseuse, ce n'est en rien sa faute, mais elle se sent impuissante face à cet homme.
« J'ignore votre prénom... comment vous sentez-vous ? » Ses iris se plongent à nouveau dans les siens, elle le scrute avec intensité. Emérya, elle devrait déjà se douter qu'elle tombe dans son piège, mais elle n'y pense tout simplement pas. Comment pourrait-elle même y songer ? Cet homme est blessé et il ne s'est pas infligé cette blessure par lui-même. Il se sert de cette excuse pour lui parler, pour se rapprocher d'elle, mais est-ce mal ? Non, pas du tout, même si sa mère dirait tout le contraire. Après tout, il ne fait pas ça dans le but de la tuer, il ne lui veut pas du mal, même si ses pensées ne sont ni pures, ni nobles.
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Avancer dans la lumière, tendre le cou et la laisser observer les dégâts. Superficiel. Aodren eut presque de la peine de lui infliger ça, rien qu’à son regard, il comprenait que la demoiselle n’était pas une habituée de ce genre de situations. Courageusement cependant, elle lança un coup d’œil à sa peau balafrée et après une petite plaisanterie de l’homme, en conclut qu’il n’y laisserait pas la vie. C’était une conclusion à laquelle le triton était déjà venu seul, sinon il n’aurait pas pris le temps de s’arrêter pour charmer la belle. Aodren arqua un sourcil en entendant point de suture. S’il devait compter toutes les fois où on l’avait rafistolé, il était devenu une sorte de créature de Frankestein après toutes les opérations subies au fil des années !
Cette fois, la demoiselle se départit de son châle et lui annonça qu’elle tenait là entre les mains son unique moyen de lui venir en aide. Aodren esquissa un sourire. Il ne doutait pas de sa bonne volonté, au contraire, c’était agréable de sentir son envie d’aider. Bien sûr, son châle ne servirait que de pansement pour quelques temps ! Cela étant, le triton s’en voulait de dépouiller la demoiselle de son bien. La belle le fixait intensément, cherchant à obtenir son prénom. Durant une seconde, une seule, Aodren eut envie de lui dire la vérité. À quoi bon lui mentir ? Elle ne devait même probablement pas être une sirène, elle ne devait sûrement rien savoir ni de lui, de son passé ou de son futur. Cependant, l’assassin restait fidèle à ses principes. Se protéger, coûte que coûte.
- Je m’appelle Malo. Et je me sens mieux, grâce à vous ! Merci mademoiselle ...
C’était l’occasion de faire les présentations ! Aodren s’en voulait de lui mentir et de lui présenter cette fausse identité mais rares étaient les individus d’exception à qui l’homme disait la vérité. À vrai dire, personne ne le connaissait bien. Certains pouvaient se vanter d’en savoir un peu plus que d’autres à son sujet mais il restait un assassin, une ombre, un fantôme errant dans les rues de Blindman’s Bluff. Une poignée d’amis très proches seulement connaissaient son véritable prénom et seule une ou deux personnes connaissaient son lieu de vie. Aodren se faisait très discret, volontairement.
- Je crois pouvoir continuer mon chemin dans cet état, je peux peut-être vous raccompagner ? Je m’en veux de vous avoir fait perdre du temps !
Il fallait profiter de cette rencontre tant qu’elle flottait encore dans l’air. La belle brune finirait par rentrer chez elle et Aodren ne la reverrait plus avant un certain temps ! L’homme doutait sincèrement qu’il puisse la séduire en ce jour, elle l’enverrait plutôt voir un médecin. D’ailleurs, c’était sûrement une meilleure idée. Mais la raccompagner ne lui coûterait rien, bien au contraire. Le triton voulait encore passer du temps en compagnie de la jeune femme.
- Il m’arrive de passer du temps à Blindman’s Bluff mais je ne vous avais jamais croisée. Vous devez probablement vivre quelque part loin de cette cité, je me trompe ?
Aodren se trompait rarement pour la simple et bonne raison qu’un assassin se doit d’être vigilent, d’ouvrir l’œil. Sans ça, il aurait déjà fini sa vie à six pieds sous terre ou dans le fond de l’océan. Parfois, le triton se demandait si son existence reprendrait un cours normal. Si un jour, au détour de l’étreinte d’une magnifique jeune femme comme celle qui se tenait à ses côtés, il rangerait pour de bon son rôle de mercenaire assassin. Pour l’heure, Aodren ne comptait pas abandonner ce métier qui représentait toute sa vie. C’était à peu près la seule chose qu’il avait accompli en son existence pourtant éternelle alors autant en être un peu fier.
« Je m’appelle Malo. Et je me sens mieux, grâce à vous ! Merci mademoiselle ... » Malo… voilà un prénom qui ne colle pas particulièrement à ce visage, mais Emérya elle n’en fait pas un cas, bien que ses sourcils se froncent légèrement sans qu’elle ne le désire. Après tout, certains ont été affublés de prénoms qui ne collent en aucun cas à leurs traits ou à leurs personnalités dès la naissance. Lorsque ses yeux parcourent son visage, elle n’a pas l’impression que ce prénom a été créé pour lui, mais qu’elle importance ? Elle part dans des fabulations qui n’ont rien à voir avec le sujet ici présent. La naïade étire alors un doux sourire, ses iris ne quittant pas le visage de l’homme. « Heureuse de voir que vous n’êtes pas dans un état aussi lamentable que je le craignais. » Son sourire s’élargit, oui elle est effectivement soulagée de constater qu’il va bien. « Oh et moi c’est Emérya. » Son sourire ne s’éteint pas lorsque ses iris clairs parcourent à nouveau les traits de l’homme. Il est extrêmement séduisant, elle n’avait pas encore pris le temps de le remarquer et maintenant qu’elle y songe c’est plutôt flagrant.
« Je crois pouvoir continuer mon chemin dans cet état, je peux peut-être vous raccompagner ? Je m’en veux de vous avoir fait perdre du temps ! » Sa mère lui dirait de partir, elle lui dirait qu’elle en a déjà fait assez, qu’elle a déjà assez désobéit. Elle lui dirait de tourner les talons immédiatement et de refuser son offre. Après tout, selon Rheïane les hommes ne désirent qu’une seule et unique chose : obtenir les faveurs des femmes. Cependant, la sirène n’a pas l’impression que cet homme pense à mal. Il est blessé, il ne doit pas avoir la tête à ça. Et si tel est le cas, elle n’y peut pas grand-chose. Emérya, elle ne connait pas bien les hommes. Elle n’a jamais eu de figure paternelle, elle n’a jamais eu d’oncle… Il n’y a qu’Égéon son cousin et Nathorod son ami... Voilà où s’arrête ses minces contacts avec la gente masculine. Pour ainsi dire, bien qu’elle soit très intuitive, peut-être a-t-elle plus de difficulté à cerner les hommes que les femmes ?
« Il m’arrive de passer du temps à Blindman’s Bluff mais je ne vous avais jamais croisée. Vous devez probablement vivre quelque part loin de cette cité, je me trompe ? » À nouveau, elle sourit, bien que le visage de sa mère lui revient en tête. Elle lui dirait de ne pas lui mentionner où elles vivent, elle lui dirait de ne pas se fier à lui. De quoi rendre une jeune femme paranoïaque, non ? Elle hésite, Emérya. Elle aimerait que les avertissements de sa mère lui échappent, elle aimerait pouvoir penser par elle-même, mais dans sa position, ça lui est plutôt difficile. Pas par peur que la foudre de sa mère s’abatte sur elle, mais plutôt qu’elle s’abatte sur cet homme. La sirène se mord maintenant la lèvre inférieure, continuant de le fixer.
« Non, vous avez raison. J’habite non-loin des camps indiens. Et merci pour votre offre, c’est aimable, mais je ne veux pas vous déranger. Je doute que ma maison se trouve sur votre chemin. D’ailleurs, dans votre état vous ferez mieux de vous rendre chez un médecin ou à votre demeure afin de vous reposer. » Elle lui sourit avec douceur. Emérya, elle a choisi la voix de la sagesse, comme sa mère lui a inculquée. « À vrai dire, c’est moi qui devrais vous raccompagner… sinon qui vous protégera des abominations qui peuplent les alentours ? » La sirène étire un nouveau sourire, cette fois espiègle. La voix de sa mère laisse place à une toute autre sagesse. Même si cet homme n’est pas aux portes de la mort, elle ne peut pas le laisser seul. Elle se doute que même blessé, il a plus de chance de vaincre un pirate qu’elle, mais peu importe, elle a des principes, des valeurs.
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Il ment, il ment à ces deux grands yeux d’un bleu perturbant qui le fixent. Et pourtant, cette identité, elle est peut-être devenue sienne au final. Malo, Aodren, qu’importe. Ni l’un ni l’autre n’existe réellement, ni l’un ni l’autre n’a de consistance. L’un n’est que le fruit de son imagination et l’autre qu’une traînée de cendres à jamais abandonnée dans un champ au fond de la mer. Se présenter sous le nom d’Aodren aurait été aussi faux que n’importe quel patronyme. La vérité, c’est qu’il n’était plus vraiment quelqu’un. Il n’était plus grand-chose, le triton ! Si ce n’est un fantôme errant, poignardant à l’occasion une tête mise à prix.
Et puis parfois, sur son chemin de lamentation, un petit éclat de lumière jaillissait. Il se manifestait de façon différente, inattendue. Cette fois, c’était sous l’enveloppe charnelle d’une demoiselle. Une jeune femme aux longues boucles brunes, à la peau douce et pâle, aux lèvres belles et parfaitement dessinées. Elle l’arrachait à ses complaintes éternelles, elle lui vendait un rêve qu’il ne pourrait jamais obtenir et ça lui faisait du bien, en quelques sortes. Elle se présenta enfin, Emérya. Prénom original, aussi surprenant que le contact de ses iris bleuté.
- Emérya, c’est très beau, hors du commun.
Cela lui faisait penser à un nom de pierre précieuse mais ça, Aodren le garderait pour lui. Inutile de griller les étapes et de prendre le risque de passer pour quelqu’un de lourd. Quand il lui proposa de la raccompagner, sa réaction ne fut pas instantanée et à vrai dire, bien que l’homme ait eu l’espoir qu’elle ait autant envie que lui de passer plus de temps en sa compagnie, cela démontrait bien qu’elle n’était pas idiote. Il enchaîna sur une remarque, une observation. Peut-être s’aventurait-il trop loin ? Peut-être risquait-il de tout faire tomber à l’eau, de la faire se sentir oppressée ou paranoïaque. Son but véritable n’était que de lui faire comprendre qu’elle l’intéressait, elle en tant que personne.
Son sourire rassura Aodren, au moins il n’était pas en train de passer pour un fou furieux. Elle déclina poliment son offre, situant vaguement sa demeure près des camps indiens sans toutefois trop s’aventurer à la situer. Décidément, elle n’était pas une jeune écervelée. Le triton devait avouer que ça ajoutait à son charme. Il avait toujours préféré les femmes intelligentes, avec du caractère. Contre toute attente, Emérya lui proposa de le ramener chez lui. Aodren esquissa un sourire malicieux. Lui qui vivait dans une grotte à moitié immergée, il était clair qu’il ne pouvait emmener la belle dans cet endroit. Il répondit tout de même à sa plaisanterie :
- Je ne saurais me passer de votre présence à mes côtés, en effet.
Il lui adressa un sourire puis lui indiqua le chemin. Aodren était un assassin, un mercenaire mais pas un incapable. Son métier, il le connaissait sur le bout des doigts. Il savait prendre quelqu’un en filature, il savait réunir toutes les informations. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il savait que la cible qu’il venait d’éliminer vivait à Blindman’s Bluff. Sa demeure serait parfaite pour accueillir la jeune femme, Aodren n’en doutait pas !
- Je ne vis pas à Blindman’s Bluff en général, je n’y suis que de passage mais j’ai bien un endroit où je peux dormir lorsque je suis en ville.
Aodren reprit la marche. Il ne vivait pas à Blindman’s Bluff en effet car le triton préférait amplement sa solitude, sa quiétude. Cependant, bien qu’il joue au loup solitaire, parfois il lui arrivait de souffrir de cet éloignement. Comme s’il n’était plus qu’une vulgaire créature meurtrière, maintenue par des forces occultes à l’écart de la population humaine et même aquatique. Aodren ne se sentait pas terrestre et ne se sentait plus triton. L’homme cessa d’avancer car déjà, le bâtiment se dessinait sous leurs yeux. Il s’approcha de la porte et sortit d’une main un fil et une aiguille pour crocheter la serrure. L’expérience faisant, le triton ne mit que quelques instants puis se retourna vers Emérya.
- La moindre des politesses serait de vous inviter à entrer boire quelque chose !
Il lui adressa un large sourire et lui désigna le hall, qui par chance était plutôt accueillant. L’homme qui n’aurait définitivement plus besoin de cette demeure avait un certain goût, il fallait le lui concéder. L’assassin revint vers la demoiselle et lui fixa droit dans les yeux. Il était temps de cesser de jouer au plus malin.
- Avant que vous ne refusiez mon offre, je tenais à être franc avec vous. Votre gentillesse m’a sincèrement touché et j’aimerai apprendre à mieux vous connaître, passer quelques instants de plus en votre présence. Accepteriez-vous de m’accorder cela ?
Aodren lui jeta un regard espiègle, sourire en coin et regard cherchant à capter celui d’Emérya. Il en avait séduit des femmes mais rien, absolument rien, ne lui confirmait que la belle brune accepterait ou pas ...
« Emérya, c’est très beau, hors du commun. » La brune le gratifie d'un sourire. Il est vrai que son prénom est plutôt rare, Emérya, elle ne connait personne d'autre qui porte ce prénom. C'est la première pensée que lui soulève les paroles de l'homme, mais aussitôt elle est rattrapée par la vérité : elle connait si peu de gens différents, si peu de femmes... Alors comment savoir s'il est si rare ? Comment savoir si le Pays des Songes n'est pas peuplé par une foule d'Emérya ? Elle ne sait pas, elle ne sait plus, mais quelle importance ? Elle aime le prénom que sa mère lui a donné, qu'il soit porté par elle uniquement ou par d'autres femmes, humaines ou sirènes. Non, ça n'a vraiment aucune importance.
Emérya, elle lui propose de le raccompagner, sous prétexte que sans elle, il n'arriverait pas à se protéger seul. Évidemment, elle n'est pas entièrement sérieuse, elle sait qu'elle pourrait le protéger de façon pathétique, tout simplement, mais elle ne veut pas le laisser marcher seul, dans son état. Elle préfère le savoir en sécurité chez lui, plutôt que trainant dans les rues, blessé. « Je ne saurais me passer de votre présence à mes côtés, en effet. » Il sourit et elle, elle en étire un nouveau. « Je m'en doutais. Ma présence est extrêmement réconfortante. » Elle laisse échapper un léger rire, ne détournant pas ses iris de ceux de l'homme. Emérya, elle a tendance à observer les gens, à les fixer, elle essaie de les décrypter jusqu'au tréfonds de l'âme. C'est une mauvaise habitude qui rend certaines personnes mal à l'aise, mais le brun ne semble aucunement l'être ou si tel est le cas, il n'en laisse rien paraître. C'est plus fort qu'elle et à vrai dire, elle ne s'en rend même pas compte, sauf si on lui en fait la remarque.
« Je ne vis pas à Blindman’s Bluff en général, je n’y suis que de passage mais j’ai bien un endroit où je peux dormir lorsque je suis en ville. » L'homme recommence à marcher et la naïade en fait de même, imitant ses pas. Elle sourit ses paroles puis ils marchent ensuite en silence. Emérya, elle profite de la noirceur et de la fraicheur du soir, marchant avec nonchalance. Sa mère lui dirait d'être sur ses gardes, mais elle ne l'est pas. Elle est légère, confiante, cet homme ne lui inspire rien de mal, bien au contraire.
Après plusieurs minutes de marche, une maison se dessine devant eux et il s'arrête, déverrouillant la porte, avant de se retourner vers la jeune femme. « La moindre des politesses serait de vous inviter à entrer boire quelque chose ! » Il étire un large sourire, avant de lui désigner un hall d'entrer à l'ambiance chaleureuse, accueillante. Elle devrait dire non, c'est ce que sa mère lui a enseignée et pourtant, elle a envie de dire oui, au fond, sans trop savoir pourquoi. Alors qu'elle pèse le pour et le contre, il se rapproche et se dresse devant elle, ses iris plongés dans les siens avec intensité. « Avant que vous ne refusiez mon offre, je tenais à être franc avec vous. Votre gentillesse m’a sincèrement touché et j’aimerai apprendre à mieux vous connaître, passer quelques instants de plus en votre présence. Accepteriez-vous de m’accorder cela ? » Il affiche un sourire en coin, un regard espiègle et à ce moment même, elle capte quelque chose qu'elle ne captait pas, quelques minutes auparavant. Elle l'avait cru trop blessé pour s'intéresser à elle, mais elle commence à voir un tout autre plan se dessiner devant elle. Après tout, un homme n'offre pas un verre à une femme sans raison. Emérya, elle se mordille la lèvre, ne le quittant plus des yeux. La voix de sa mère lui cri de ne pas accepter, mais c'est la curiosité qui prend le dessus. Elle n'a pas l'habitude des hommes, bien au contraire, mais quelque chose chez lui l'intrigue, l'appelle. Même s'il s'intéresse à elle, ça ne veut pas dire qu'il lui désire du mal. Et Emérya, au fond, elle aimerait en savoir un peu plus à son sujet, elle aussi.
« D'accord. Oui, je veux bien entrer, quelques minutes. » Elle lui accorde un sourire et entre doucement dans sa demeure, alors qu'il la laisse passer devant lui. Emérya, elle pourrait entrer dans un piège, elle pourrait se laisser avoir, mais elle rejette ses pensées. Les avertissements de sa mère lui montent à la tête. Il y a des personnes mauvaises dans ce monde, elles ne sont pas toutes des hommes et tous les hommes ne sont pas forcément mauvais. C'est ce qu'elle cherche à découvrir par elle-même et de plus en plus. Elle en a assez qu'on lui dise comment sont les gens, sans qu'elle les voient pas ses propres yeux. Son sixième sens lui indique de lui faire confiance et ce soir, c'est ce sixième sens qu'elle écoute. Elle pourrait jurer qu'il ne lui veut pas de mal, la méchanceté se lit dans les yeux, après tout. Peut-être désire-t-il obtenir un peu de chaleur humaine de la jeune sirène, mais ça ne fait pas de lui un homme mauvais, tant et aussi longtemps qu'il ne la force pas. Une fois à l'intérieur, ses iris restent figés sur le visage de l'homme et à la clarté, elle peut enfin contempler ses traits. S'il lui paraissait très beau dans le peu de lumière, il était visiblement d'une beauté indéniable à la lumière, à un point où elle en fut presque décontenancé.
But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.
Durant un instant, Aodren resta pendu à ces belles lèvres rouges qui lui faisaient face. Il avait décidé de lui jouer la franchise, parfois il fallait s’y résoudre. C’était tout de même à double tranchant car la demoiselle pouvait décider de décliner et s’en aller, si tel était le cas, le triton n’aurait jamais le loisir de la découvrir davantage. Tout à coup, elle prononça quelques mots. Quelques simples syllabes qui firent naître sur le visage masculin un sourire épanoui. Emérya acceptait. Il en avait douté, vu la poignée de seconde en suspens mais Aodren était ravi de son acceptation. L’homme l’invita donc à entrer d’un geste de la main.
Désormais, tout ne serait que poudre aux yeux. Le triton n’était jamais rentré dans cette demeure, il n’en connaissait rien. Aodren n’était pas stressé pour autant, improviser faisait partie de ses compétences. L’assassin se dirigea vers une porte et l’ouvrit, dévoilant un placard exigu aux yeux de la demoiselle. Mauvais choix. Avant qu’Emérya ne se demande pourquoi il ne l’avait pas conduite au salon, Aodren retomba sur ses pattes.
- Je peux vous débarrasser de votre manteau ?
Pour le coup, Aodren était plutôt fier de sa trouvaille. Arriva alors l’instant fatidique, une nouvelle porte se présentait sous ses yeux. Intérieurement, il fit un bref calcul : il y avait clairement de très fortes chances pour que ça soit la pièce à vivre. L’homme tourna donc la poignée et pénétra à l’intérieur de la pièce. Bingo. De larges canapés étaient disposés autour d’une table basse, une imposante verrière dans laquelle trônaient d’anciens objets prenait une large partie du mur. L’intérieur avait un côté très sophistiqué, presque trop comparé à l’allure d’Aodren. Conscient du décalage, le jeune homme sut qu’il devait à nouveau improviser.
- Si vous vous posez la question, non, ce n’est pas moi qui ait fait le choix de la décoration. Mais cette histoire peut attendre, je préfère largement entendre la vôtre.
Aodren se dirigea vers l’un des canapés et s’y installa. Rarement dans sa vie, il avait connu un matériau aussi confortable et luxueux. Décidément, ce type avait de la ressource. De la main, il invita Emérya à venir prendre place à ses côtés. Une série de verres était posée sur une table à roulette, Aodren s’en empara et attrapa une bouteille d’un alcool bien vieillissant. À la simple odeur du nectar, l’homme sut que ça ne serait pas de la tarte. Il en versa deux verres et en tendit un à la jeune femme.
- À notre rencontre, aussi imprévue qu’agréable !
Il fixa le regard de la belle durant quelques instants puis avala d’un trait le contenu de son verre. Aodren retint une grimace, l’alcool était décidément bien brûlant. Il se laissa lentement retomber contre le dossier du meuble et tourna la tête vers la demoiselle. Le triton était réellement intrigué par elle et attendait d’en savoir plus à son sujet.
- Et lorsque vous ne venez pas au secours des blessés dans les rues de Blindman’s, à quoi vous occupez-vous ?
Aodren lui adressa un nouveau sourire. Il avait compris que la jeune femme n’était pas du genre facile. Il devrait déployer plus de bonne volonté et d’efforts pour persévérer.