Je retrouve dans un sourire la flamme de mes souvenirs
Avec Brynjár
Apaisée par le calme environnant, Anya ferma les yeux un instant. Elle avait quitté la ville pour quelques jours, ne supportant plus la constante agitation et la débauche de son lieu de vie. Le territoire des Enfants Perdus était proche, elle le savait, mais elle n'osait pas y retourner. Trop d'années s'étaient écoulées, et Anya savait également qu'elle n'était plus une enfant. La vie l'avait rattrapée, et elle avait dû grandir et devenir mature pour survivre. Mais ses années en tant qu'Enfant Perdue libre avaient été les meilleures de sa vie, sans aucuns doutes. C'était donc une sorte de pélerinage qu'elle effectuait aujourd'hui. La jeune femme portait un pantalon et un mini-haut de danseuse orientale violets, et avait revêtu par-dessus une cape noire, qui camouflait aussi bien son visage que son corps. Elle ne portait ni sac ni accessoires, ses cheveux détachés lui donnaient un air un peu sauvage quand elle sortait la tête de sa capuche. La seule chose qu'elle avait emmené pour son périple était le couteau qui ne la quittait jamais, attaché à sa cuisse.
Après s'être nourrie de quelques fruits rouges sur un buisson non-loin, la brune s'approcha de la rivière afin de boire un peu, près de la cascade. Elle était en train de s'abreuvoir quand un bruit derrière elle la mit sur ses gardes. Alerte, elle se releva rapidement et silencieusement, prenant son couteau pour le cacher dans sa manche. Anya attendit sans rien dire, ne sachant pas à quoi s'attendre. Peut-être était-ce juste un lapin, ou un Enfant Perdu et dans ces cas-là elle n'avait pas à s'inquiéter. Mais d'autres créatures rôdaient dans cette forêt, et mieux valait ne pas tomber nez à nez avec elles...
You bring good to my lonely life, honestly it's hard for me to look into your eyes. When, I say that I would be nothing without your love I feel the rush and it's amazing. Maybe I've been always destined to end up in this place, yeah. I don't mean to come off selfish, but I want it all. Love will always be a lesson, let's get out of it's way. Cause I know, all I know, all I know. I'm a prisoner to my addiction. I'm addicted to a life that's so empty and so cold. I'm a prisoner to my decisions
La cabane était vide. Dehors, les rires et les cris des enfants perdus retentissaient. Brynjár inspira profondément, il avait décidé d’aller se balader dans la forêt des quatre saisons. Cet endroit magique le faisait toujours rire, pouvoir passer d’un terrain enneigé et faire une bataille de boules de neige à quelques sauts dans les feuilles orangées d’automne ... c’était le pied ! Depuis son retour au Hangman’s Tree, Brynjár s’efforçait de sourire, de rire avec les autres, de leur prouver que malgré les années passées dans les confins de la terre, il restait encore le même. Pourtant, rien n’était plus faux. Ces années cauchemardesques l’avaient changé. Son retour des mines était difficile, Bryn y pensait encore très souvent. Il revoyait des visages, ceux de ses amis coincés là-bas. Et puis surtout, il y avait ce visage ...
Une peau halée, de grands yeux doux, un sourire bienveillant encore gravé dans sa mémoire. Et puis les gouttes de sueur dues à l’effort sur son front, les grimaces de douleur à cause de ses muscles endoloris. Brynjár perdit le sourire. Elle devait être en vie, elle devait tenir le coup. Souvent, le jeune garçon avait envie d’aller la retrouver, de tout faire pour la sauver. Mais la simple perspective de se retrouver là-bas, de poser le pied sur cette maudite île, de se retrouver à nouveau piégé, enchaîné, humilié, jeté comme un rat au fond d’une mine sans fin qu’il avait été lui-même assez idiot pour créer ... Bryn n’en pouvait plus. Une voix dans sa tête se mettait à hurler telle une Banshee dès qu’il songeait à y retourner.
La laisser là-bas, pourtant, ça le tuait à petit feu. Brynjár se revoyait, complètement vidé de son énergie, drainé tel un cadavre ambulant dont tout le sang aurait été aspiré par un vampire. Le vrai démon, le seul et unique malfaiteur dans cette histoire ... c’était Barbe Noire. Maudit pirate, raclure des océans, pouilleux à l’haleine répugnante. Bryn le haïssait de chaque parcelle de son âme. L’enfant perdu aurait tout donné, jusqu’à sa propre vie, pour voir la tête de ce loup de mer sur une pique.
Ses pas le menèrent jusqu’à un coin de la forêt qui se trouvait sous un climat printanier. Ici, on pouvait voir des fleurs pousser, sans cesse, comme si elles pouvaient croître à l’infini. Ici, on s’enivrait de couleurs vives, douces, agréables mais aussi de senteurs florales, fruitées et chaleureuses. Au même titre que beaucoup de lieux sauvages sur l’île de Neverland, Bryn trouvait cet endroit particulièrement magnifique, féérique aussi. C’était tout cela qui lui avait cruellement manqué lorsqu’il était coincé sous terre.
Et brusquement, alors que Bryn était perché sur une branche d’arbre, les pieds balançant dans le vide, il aperçut une cape noire occupée près du point d’eau. Étrange. À sa silhouette svelte, il devinait une fille. Pourtant, dans ses souvenirs, il n’avait pas vraiment mémoire d’une fillette perdue s’encombrant de tels vêtements. Tant de tissu, ça vous empêche de courir facilement, ça risquerait de se prendre dans une branche ou de s’emmêler dans vos pieds durant une course. Brynjár s’approcha alors, curieux. Il vit un léger mouvement sous la cape, à tous les coups, elle l’avait entendu. Tout en riant, il lança :
- N’aies pas peur, je ne suis pas là pour te tuer ! Sauf si tu es une pirate ... là tu peux avoir peur parce que je serais ton pire cauchemar !
Bryn pouffa de rire. Intérieurement, il espérait qu’elle ne serait pas une pirate. Il avait sa dose de matelots pour le moment. Et puis là, elle pivota ...
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Avec Brynjár
Le calme bruit de la rivière l'apaisait, rendant sa solitude moins lancinante. Quand elle était une enfant perdue, Anya était insouciante et joyeuse, et aujourd'hui elle n'était plus qu'une ombre silencieuse, prête à déganier au moindre mouvement et ne faisant plus confiance à personne. Ainsi quand elle avait entendu un bruit derrière elle, son premier réflexe avait été de sortir son couteau, l'oreille alerte. On lui parla alors, ce qui la fit se retourner instantanément afin de faire face à l'intrus. C'était un Enfant Perdu apparemment, vu qu'il lui avait dit être un ennemi des pirates. Elle le regarda, et resta bouche-bée. Non. C'était impossible. Ca ne pouvait pas être...
Brynjár. Ou du moins son portrait craché. Le même regard chaleureux, le même sourire qui avait tant plu à Anya dans la mine. La brune faillit en lâcher son couteau de stupéfaction. Ca ne pouvait pas être lui. C'était sûrement une créature de ces bois qui avait le pouvoir de prendre l'apparence d'un être aimé, après tout il y avait tout dans cette forêt. Le visage toujours caché par son capuchon, Anya pointa son couteau en direction de l'apparence, bien que quelques mètres les séparent. Elle s'approcha de quelques pas, doucement, effarée de constater qu'il ressemblait exactement à Brynjár.
-N'approchez pas ! Qui... qui êtes vous ?
Anya constata que sa main qui tenait le couteau ne pouvait s'empêcher de trembler. Elle ne pourrait pas faire de mal à cette créature, pas si elle avait l'apparence de Bryn. Ou pire encore, si c'était vraiment lui ? La brune ne pouvait se résoudre à le croire, ça lui ferait trop mal si elle y croyait alors que ce n'était qu'un mirage ou une créature ayant prit l'apparence de Brynjár.
You bring good to my lonely life, honestly it's hard for me to look into your eyes. When, I say that I would be nothing without your love I feel the rush and it's amazing. Maybe I've been always destined to end up in this place, yeah. I don't mean to come off selfish, but I want it all. Love will always be a lesson, let's get out of it's way. Cause I know, all I know, all I know. I'm a prisoner to my addiction. I'm addicted to a life that's so empty and so cold. I'm a prisoner to my decisions
Lentement, elle se retourna. Ce maudit capuchon empêchait Brynjár d’apercevoir son visage. Sa curiosité était férocement malmenée, l’enfant perdu mourait d’envie de savoir qui se cachait sous cette parade de tissu. Il lui sembla apercevoir une bouche pulpeuse, aux lèvres bien rouges, accompagnées de hautes pommettes. Mais le coup d’œil fut si rapide que Bryn ne fut sûr de rien. Le capuchon était encore et toujours l’obstacle à sa compréhension. Brusquement, elle pointa une lame dans sa direction et avança à pas mesurés. Le jeune garçon ne broncha pas, il ne se sentait pas en danger donc il ne répliquerait pas. Son lance-pierre était fermement attaché à son ceinturon mais Brynjár ne s’en servirait pas. Cette fille lui paraissait plutôt sur la défensive qu’agressive.
Elle lui demanda qui il était mais Bryn ne put répondre. Il ne le put car dans cette voix, il reconnaissait des fluctuations familières. Ses sourcils se froncèrent. Souvent, plongé dans l’obscurité moite et opaque des mines, il avait discuté avec Anya. Alors, cette voix l’avait accompagné durant des heures bien sombres. Aujourd’hui, Brynjár avait l’impression de retrouver cette sonorité et pourtant, c’était impossible. Comment ? Comment aurait-elle pu faire pour se sortir de ce trou à rats ? Les mines ne comportaient aucune issue, il les avait imaginées lui-même donc il était bien placé pour le savoir. Et vraisemblablement, les sirènes et les tritons ne rôdaient pas tous les jours autour de l’île de Barbe Noire dans l’espoir de sauver un prisonnier. Non, ça ne pouvait être Anya.
- Je suis un enfant perdu, je pensais que ça se voyait ...
Bryn lui adressa un large sourire, visant ce visage dissimulé. Le jeune garçon ne parvenait toutefois à s’ôter de la tête cette voix. Elle lui rappelait tant de souvenirs, tant de bons comme de mauvais. Soudain, l’enfant perdu fut animé d’un espoir. Et si ? Et si Anya était parvenue par un miracle inattendu, à se défaire de l’emprise des pirates ? Il la savait forte et intelligente, elle aurait forcément pu ruser ou mettre au point un stratagème pour fuir. Plus Brynjár y songeait, plus cela lui paraissait plausible. La jeune fille hindou avait toujours su se montrer plus perspicace que la plupart des habitants de Neverland, elle aurait pu duper les pirates de Barbe Noire sans mal ! Ils avaient à peu près autant d’intelligence que les roches qu’ils avaient dû creuser durant des années ...
- C’est bizarre. Tu me rappelles quelqu’un. Une amie que j’ai perdue il y a très longtemps. Une amie que je regrette amèrement.
Il poussa un profond soupir. Anya lui manquait, il ne savait pas trop ce qui lui manquait le plus chez elle. Son rire communicatif même dans les pires situations ? Ses discours encourageants ? Sa façon surhumaine de voir une once de lumière là où clairement, il n’y en avait pas ? Bryn n’avait cessé de chercher un but à son retour au Hangman’s Tree depuis sa libération mais il sentait qu’Anya, elle, elle saurait l’aider. Elle saurait trouver les mots pour le réconforter et le remettre sur le droit chemin ...
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Avec Brynjár
Une bataille mentale se déroulait dans la tête d'Anya depuis l'arrivée de l'intrus. Etait-ce vraiment Brynjár qui se tenait devant elle ? Elle ne l'avait pas vu mourir après tout, juste se faire exclure de la mine, quand il était tombé de fatigue et n'avait pas réussi à se relever. Le fol espoir que ce soit vraiment lui commençait à la saisir malgré elle. Elle hésitait, mais pointait toujours son couteau vers Bryn, au cas où. La brune continuait à s'avancer, lentement mais sûrement, sans quitter Brynjár du regard. Elle hésitait, chose qui ne lui arrivait d'ordinaire jamais. D'ordinaire la jeune femme savait toujours comment se sortir même des pires situations, il lui suffisait d'écouter sa tête plutôt que son coeur. C'était grâce à ça qu'elle était encore en vie à l'heure qu'il était, malgré tout ce qu'elle avait vécu. Mais là, c'était différent. Là où sa tête lui ordonnait de garder son sang-froid et de fuir, son coeur lui criait que c'était bel et bien Brynjár et qu'elle devait le rejoindre.
Ce dernier ne répondit pas de suite quand elle lui demanda de décliner son identité, comme si quelque chose l'intriguait. Avait-il reconnu sa voix ? Après tout, ils avaient été très proches tout les deux. Il lui répondit enfin, disant qu'il était un enfant perdu mais ne disant pas son nom. Mais ce qu'il annonça après acheva de convaincre Anya que c'était bel et bien Brynjár qui se trouvait devant elle. Il lui souriait, et la jeune femme finit par baisser son arme.
-C'est bien toi, Bryn ?
Tremblant légèrement, la brune ôta sa capuche, laissant enfin son visage à découvert, et lâchant son couteau. Elle ne bougea pas, n'osant pas s'avancer plus avant d'en avoir le coeur net. Elle était comme un chat sauvage qu'on essaierait d'apprivoiser, prête à s'enfuir à la moindre menace.
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Quelques mots. Son nom, à lui, prononcé par cette voix. L’enfant perdu écarquilla les yeux, un long frisson lui traversa l’échine. Hallucinant complètement, il avait bien vue la jeune fille ranger son arme pourtant elle restait méfiante. Comme s’il pouvait être un danger. Comme s’il aurait pu lui vouloir du mal, à elle ! Brynjár fronça les sourcils et se laissa glisser de la branche sur laquelle il était perché. Tant de questions se bousculaient dans sa tête. Était-ce bien Anya ? Et si oui, par miracle était-elle sortie de cette maudite mine ? Le garçon s’avança d’un pas, lentement, sans geste brusque ni parole virulente.
- C’est bien moi ... mais ...
Toute logique lui échappait. Non pas qu’il en ait jamais réellement cherché à Neverland ! Comment Anya pouvait-elle se tenir là sur ses deux pieds ? Soudain, Bryn réalisa une autre chose. La réalité le rattrapa, comme une main invisible qui se serrerait autour de son cou. Il l’avait abandonnée. Ils avaient parlé tant de fois de s’enfuir, de quitter cette maudite île tous les deux. Et pourtant, quand on l’avait jeté dehors, à bout de force, presque mourant, sur le sable brûlant de la plage et qu’il avait vu cette sirène prête à lui offrir la liberté ... Brynjár avait foncé. Le jeune garçon baissa alors la tête, piteux.
- Je suis désolé. Je ne voulais pas t’abandonner là-bas ...
Si seulement il avait pu, à ce moment-là, se redresser et aller la chercher. Ce fut impossible, à peine avait-il eu la force de se tirer et de se traîner jusqu’à l’eau. Brynjár n’avait cependant cessé de penser à Anya. À ce qu’elle avait dû se dire en ne le voyant plus revenir, à ce qu’elle avait pu penser. L’abandon, la mort, la désertion. L’enfant perdu n’assumait pas sa propre survie. Peut-être aurait-il dû y retourner. Replonger dans les méandres infernaux de ces mines avec pour seul soulagement le sourire de la belle. Mais comment éteindre l’éclat indomptable d’une bougie dans l’obscurité la plus totale ? L’espoir. Brynjár ne l’avait jamais perdu et quand enfin sa chance était venue ... il l’avait saisie à pleines mains.
- Mais comment as-tu fait pour sortir de là ?
Sa tête s’était redresse, ses yeux se posant sur Anya. Ses sourcils froncés, sa bouche légèrement entrouverte, Bryn n’y comprenait rien. Pourtant, désormais qu’il était face-à-face avec elle et qu’il pouvait mieux voir son visage ... les choses prenaient un sens. La demoiselle semblait avoir changé quelque peu. Ses traits, autrefois encore si doux, si enfantins ! Ils étaient désormais plus anguleux, plus féminins, plus matures. Même son regard, assez sauvage de base mais encore plus intouchable à présent. Anya était devenue une antilope, prête à bondir hors de portée dès le moindre signal de danger.
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Avec Brynjár
Brynjár semblait aussi stupéfait qu'Anya de ces retrouvailles inattendues. Après tant de temps, la brune avait petit à petit perdu l'espoir de le retrouver un jour, pensant même que le jeune homme était mort. Il faut dire que la dernière fois qu'ils s'étaient vus, Bryn s'était écroulé de fatigue et les pirates l'avait brutalement transporté hors de la mine pour le laisser mourir ailleurs. Mais non. Il se trouvait là, devant elle, vivant et apparemment en bonne sante. Anya avait envie de pleurer et de se jeter dans les bras de son ami, mais n'en fit rien. Elle n'était plus du genre à montrer ses sentiments aux autres depuis qu'elle était seule. Le jeune homme arborait un air coupable, s'excusant de l'avoir laissée dans la mine. Touchée, la jeune femme lui prit les mains, tâchant d'empêcher les larmes de lui monter aux yeux.
-Tu n'as pas à t'excuser pour ça, Bryn. Au contraire, ta survie vaut bien l'année que j'ai ensuite passée sans toi dans cette mine.
Elle le regardait avec affection, constatant que lui aussi avait changé. Il avait grandit et s'était embelli tout en ayant gardé ce charme enfantin qui avait tant plu à Anya. Le jeune homme lui demanda comment elle avait réussi à s'enfuir, et la brune baissa les yeux, pas très fière de sa conduite et appréhendant la réaction de son ami. Elle l'invita à s'asseoir sur l'herbe tendre avant de s'asseoir à son tour.
-Après ton départ, j'ai beaucoup réfléchi à une manière de sortir de là; Et j'ai trouvé comment faire. Je me suis laissée grandir, et j'ai charmé un des pirates surveillants, Alec. J'ai fait naître en lui l'espoir d'un avenir commun, d'une vite tout les deux et même celui de fonder une famille, lui faisant croire que je l'aimais autant qu'il m'aimait. Je l'ai laissé nous mener hors de la mine, et une fois en sécurité... Je l'ai tué, et je suis partie.
Anya détestait parler de ça, peut-être parce qu'elle savait que c'était à ce moment précis qu'elle avait définitivement cessé d'être une enfant. Elle leva les yeux vers Bryn, attendant sa réaction.
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Les mains d’Anya trouvèrent les siennes, s’en emparant avec douceur. Ce simple geste rappela de nombreux souvenirs à Brynjár. Parfois, coincés dans les ténèbres d’une mine impitoyable, ils s’étaient tenu la main de la sorte. C’était une façon de s’offrir un peu d’espoir, de réconfort, de se dire qu’ils seraient ensemble envers et contre tout. Le visage du garçon se redressa vers Anya. Elle ne lui tenait pas rigueur de son abandon ! Au contraire, la demoiselle paraissait heureuse pour lui qu’il s’en soit sorti. Cela laissa Bryjár dans le doute. Comment faisait-elle pour ne pas le haïr ? Lui-même s’en était atrocement voulu. Ils avaient toujours dit qu’ils fuiraient ensemble, qu’ils s’en iraient tous les deux de ce cauchemar.
La curiosité de Bryn était donc éveillée, il était impatient de savoir comment Anya avait réussi à quitter les mines ! La belle brune l’emmena s’asseoir un peu plus loin et bizarrement, le garçon eut l’impression que ce qui allait suivre ne lui plairait pas. Anya avait ce petit air sur le visage, cette mimique qui trahissait un certain doute. Bryn se plaça confortablement et écouta la petite ruse qu’Anya avait mise au point.
- Tu t’es laissé grandir ?
Brynjár releva les yeux sur elle. Désormais, cela lui paraissait logique ! Il se disait bien que quelque chose avait changé chez elle. Anya n’était tout simplement plus une enfant. Le garçon perdu en était totalement horrifié. Il ne parvint à articuler un mot pendant plusieurs minutes. Le fait qu’elle ait tué un pirate relevait presque de la banalité. Mais qu’elle se soit servi de son charme pour y parvenir, qu’elle ait parlé de concepts d’adultes tels que le mariage ou la vie de famille ... cela le plongeait dans la confusion. Bryn acquiesça finalement après avoir mis un certain laps de temps à avaler la pilule.
- Tu n’avais pas le choix, tu as dû faire ce qu’il fallait pour sortir de là ! Je savais que tu y parviendrais, tu es une fille super intelligente !
Dans ce cas, pourquoi continuait-il à afficher ce sourire triste ? La vérité, c’est que Brynjár se sentait encore plus coupable ! De sa faute, Anya avait passé une année entière seule dans les mines. Elle avait presque été forcée de se laisser grandir pour pouvoir s’en sortir. Tout cela car il n’avait pas été capable de l’aider et d’honorer leur promesse. Le garçon perdu baissa à nouveau la tête, il ne savait vraiment plus quoi dire. Ils faisaient tous les deux partie de monde différent désormais mais Bryn n’en avait pas encore mesuré l’ampleur des écarts ...
- Mais tu n’es pas rentrée à l’arbre du pendu ! Où vis-tu depuis ?
Bryn pencha la tête sur le côté. Il apprenait l’histoire d’Anya comme on découvre les pièces d’un puzzle. Une par une, il emboîtait les différentes parties et le dessin commençait peu à peu à prendre forme. Malheureusement, ce n’était pas la voie la plus facile pour eux deux ! En effet, un enfant perdu et une jeune artiste de rue à One-Eyed-Willy, ce n’est pas courant comme tandem ! Brynjár serra les mains de la belle brune dans les siennes. Beaucoup de choses les éloignaient mais le garçon était si heureux de l’avoir retrouvée en vie et en pleine forme qu’il ne laisserait rien les séparer à nouveau !
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Avec Brynjár
En venant se perdre dans cette forêt, Anya s'était attendue à trouver beaucoup de choses. La paix. Le calme. Peut-être aussi était-ce un moyen pour elle de faire définitivement le deuil de sa vie passée. Mais jamais, au grand jamais, elle ne se serait attendue à faire face à un fantôme du passé. Un fantôme qu'elle avait tant aimé. Et pourtant, Brynjár se tenait juste devant elle, et elle lui avait pris les mains. Surprise, émue, mais surtout... heureuse. La jeune femme n'avait pas été heureuse depuis très longtemps, se contentant de survivre au lieu de vivre. Ils s'étaient assis afin qu'elle lui conte son histoire, et elle enleva sa cape tandis qu'elle parlait, se sentant en sécurité et ayant envie de laisser le soleil réchauffer son corps de danseuse. Quand elle lui annonça qu'elle s'était laissée grandir pour échapper à la mine, Bryn parut tout simplement horrifié, ce qu'elle pouvait comprendre même si ça la mettait plutôt mal à l'aise. Il se tut pendant quelques minutes, durant lesquelles Anya l'observait avec curiosité et appréhension à la fois. La brune comprenait que tout cela était dur à encaisser.
-Merci, Bryn... Mais crois-moi, si j'avais eu le choix, je serai resté une enfant. Tout est mieux quand tu es un enfant. Une fois que tu as grandi, tu es seul.
Il lui demanda ensuite où elle vivait, et encore une fois Anya se sentit un peu mal à l'aise, ayant peur qu'il désapprouve.
-Je ne pouvais pas rentrer. Cette vie n'est plus pour moi. Je suis partie vivre à One-Eyed-Willy, dans une toute petite maison que je partage avec des artistes de rue. J'en suis devenue une également, d'ailleurs... Je chante et je danse pour que les gens me donnent de l'argent... Et parfois, quand la journée a été mauvaise, je vole. C'est loin d'être une vie de rêve, je sais. Mais et toi alors ? Raconte-moi tout. Ta vie est sûrement plus palpitante que la mienne. Ta vie est redevenue comme avant, je suppose ? Les pirates vous embêtent-ils toujours ?
Elle lâcha les mains de son ami, ayant soudain conscience du fossé qui les séparaient.
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La retrouver pour la perdre à nouveau quelques instants à peine après avoir revu son visage. Brynjár sentait l’appréhension le dévorer de l’intérieur. Anya avait changé, elle était devenue plus ... adulte. Cela lui donnait le tournis. Et pourtant, à mesure que la demoiselle lui parlait, il comprenait, il compatissait. Lui-même, au fond de ces mines froides et sombres, avait douté. C’était dans ces instants de désarroi total que les convictions s’effritaient, que tout commençait à s’effondrer. Bryn ne pouvait la blâmer pour avoir trouvé un moyen de s’en sortir ! C’était même plutôt merveilleux pour elle. Dans ce cas, pourquoi se sentait-il si triste ? Comme si son Anya, la fille qu’il avait connu dans les mines, avait disparu ?
Anya lui confirma ce qu’il craignait : grandir était horrible. Le garçon fronça les sourcils et acquiesça. La demoiselle paraissait si triste, si mélancolique. Chaque mot qui sortait de sa bouche était comme l’une de ces mélodies doucereuses émanant des boîtes à musique. Bryn avait envie à la fois de l’enlacer fort à lui en faire oublier tous les malheurs qu’ils avaient vécu mais aussi de fuir à toutes jambes ! Car tout était de sa faute, à lui. Son manquement à sa parole avait mené Anya à grandir. Le garçon perdu s’en voulait tellement.
La simple évocation de One-Eyed-Willy fit écarquiller les yeux à Brynjár. Ce trou à rats était réputé pour être le repère des pirates, une ville où tous les vices des adultes se mélangeaient à la bassesse de sa population. Le garçon perdu ne put s’empêcher de redresser la tête et de fixer Anya, l’air du lapin prit dans les phares d’une voiture. Anya lui livra son quotidien, son dur labeur, son travail. Bryn réalisa à quel point la belle était encrée dans la réalité désormais, à quel point elle faisait pleinement partie de ce monde où l’argent régit toute l’existence. Sur le moment, il en perdit toute faculté de parole. Incapable de répondre à la question de la jeune fille, Bryn finit par totalement l’occulter. À quoi bon lui raconter son quotidien quand la culpabilité le dévorait ?
- Frappe-moi Anya !
Bryn se releva, prit les mains de la jeune fille et la fit se mettre debout sur ses deux pieds elle. Il se tenait debout, face à elle, les yeux grands ouverts et le regard affolé, les lèvres tremblantes.
- Il faut que tu me frappes, Anya. Que tu t’énerves, que tu te mettes dans une rage incroyable ! Tu peux aussi m’insulter ou me jeter des cailloux si tu veux ...
Le garçon acquiesça d’un hochement de tête, comme si se défouler sur lui aurait pu réparer quoi que ce soit. L’enfance, cet état insaisissable que Neverland leur offrait éternellement, avait glissé entre les doigts d’Anya. Elle n’était plus une fille, elle était entièrement devenue une femme.
- Tu peux pas me pardonner aussi vite. Tu peux pas. Je t’ai abandonnée là-bas et moi, j’arrive pas à me le pardonner. Tous les jours, je me dis que j’aurais dû rester avec toi !
Bryn baissa la tête, il luttait pour ne pas se mettre à pleurer. Anya avait tellement compté pour lui ! Elle avait été son soleil là où aucun rayon ne pourrait jamais les atteindre. Elle avait été son rire quand tout amusement semblait éteint. Aujourd’hui, Brynjár avait l’impression d’avoir perdu tout cela désormais qu’un univers les séparait. Aujourd’hui, Bryn avait l’impression d’être en deuil.