Après le départ de Tankred, ce fameux pirate qui m'avait sauvé d'une mort presque certaine, je m'aventurai dans les rues de la ville nommée Blindman's Bluff. Le sol était détrempé, boueux et glissant. Les maisons me rappelaient celles qu'on trouvait aux abords des grands ports de pêches dans ma bonne vieille Angleterre. Soupirant, mes mains serrées l'une contre l'autre, je m'enfonçais plus dans le cœur de la petite ville, cherchant un visage amical à qui je pourrai possiblement demander assistance et secours. Seulement, tous les visages que je croisais, toutes les personnes qui me miraient, n'avaient pas l'apparence d'une petite bourgeoisie ou de la noblesse. Je n'avais rien contre les roturiers, bien au contraire, mais vu ma situation, je préférais reporter mon attention vers des gens qui sauraient me comprendre. Après plusieurs heures de déambulation, j'en arrivais à la conclusion qu'il ne devait pas y avoir une classe plus haute que les autres dans ce pays. La pluie se mit à tomber bien plus forte et plus rude que le petit crachin qui laissait des perles brillantes dans ma chevelure. Je m'abritais comme je le pus devant une étale de légumes. Observant les trombes d'eau descendre du ciel capricieux de cette fin d'après-midi. Le temps passa, l'étale ferma ses portes et je me retrouvais maintenant seule, dans cette ruelle qui se vida peu à peu, trempée jusqu'aux os, ma sous-robe détrempée et collant à ma chair qui se rafraîchissait de plus en plus. Je frappais à une porte, demandant de l'aide, j'avais froid et je voulais juste m'abriter, mais on m'envoya sur les roses, je finis ma course dans une taverne près du port, ici, j'étais au moins protégée du temps capricieux.
Frissonnante, je m'approchais maladroitement de l'âtre de la cheminée, posant mes mains près des flammes pour les réchauffer. Ma personne entière dégoulinait d'eau de pluie, maculant le sol de la taverne. La chaleur était salvatrice, mais elle fut de courte durée. Deux hommes, épée au ceinturon et tricorne fixé sur le crâne, s'approchèrent de moi, l'œil luisant d'une mauvaise action. « Alors ma poulette…on veut se réchauffer ? » Ne voyant aucun mal dans sa phrase, je lui souris timidement. « Oui, il fait froid et je suis trempée » Il mira mon corps moulé dans cette tenue peu correcte et je me sens très mal à l'aise. Sa langue passa sur ses dents noircies, faisant claquer son muscle lingual tout en approchant de mon épaule et déposa sa main sale sur ma personne. « T'es mignonne ! J'ai besoin qu'on s'occupe de moi ! » Mon cœur se met à battre rapidement, je scrute les alentours, les gens attablés ne s'occupent des affaires des autres ici. « Viens ! » Il me saisit par le bras et m'entraîne dehors avec son ami, sous le regard des autres clients qui ne font rien. J'ai beau m'époumoner, hurler à l'aide, personne ne bouge le petit doigt. De nouveau sous la pluie battante, je me fais pousser contre un mur, l'homme se colle à moi, me faisant respirer son odeur buccale dont je me serais bien passée. Sa main descend le long de ma cuisse et je le gifle fortement. « Ne me touchez pas ! » Il s'emporte et ma gifle à mon tour, me provoquant une douleur cuisante.« Arrête de bouger comme ça…on ne va pas te faire de mal…ma belle ! » « Non, on veut juste s'amuser avec toi ! » Ils rient, leurs mains sur moi, ils me dégoûtent. A ma grande chance, un coup de feu est tiré tout près de nous, les deux hommes s'arrêtent dans leurs attouchements et je donne un coup de genoux à celui qui se trouve le plus proche de moi. Il vacille t chute sur le sol, je prends mes jambes à mon cou, fuyant le plus loin possible de cet endroit. Je cours sans m'arrêter, sans regarder derrière moi. Je finis par m'arrêter, un peu en dehors de la ville, trouvant une barque sous un pont, je m'y dissimule et je craque. Laissant mes larmes prendre la place sur mes joues pâles. J'ai peur, j'ai froid, je suis seule et cette lassitude qui m’envahit de plus en plus. Épuisée, peut-être bien un peu fiévreuse, je me couche dans la barque, me recroquevillant comme je peux, attendant le sommeil salvateur qui me fera croire que tout va bien.
J’ouvre les yeux, lorsqu’on me secoue doucement. Un homme au visage bon et aux pupilles inquiet me mire alors que mon cerveau brumeux a du mal à sortir de sa torpeur. Je me redresse prenant conscience de la situation, et me coinçant dans un coin de la barque. J’ai le front chaud, les yeux qui me brûlent, je frissonne, j’ai faim, j’ai peur et lui, il est là, il s’assoit devant moi, dans cette embarcation qui est sans doute la sienne. Ai-je dormi longtemps ? Je ne saurais le dire, il pleut encore et encore et j’ignore s’il est encore le soir ou le matin. Il finit par me tendre le grand et long manteau qu’il porte sur lui, afin de me tenir plus chaud. C’est gentil…je me méfie, je ne veux pas revivre la situation de la taverne. Pourtant, je me tente à un merci, tel un murmure. Il me demande ce que je fais sur sa barque et je me sens prise à défaut. « Pardon, je…je vais m’en aller…il pleuvait et…elle était là…je ne savais pas où aller…Et » Mes larmes coulent de nouveau sur mes pommettes. « Je suis désolée, je vais m’en aller… »
Un soir comme beaucoup d'autre soir. Une soirée de plus à rester assis dans un bar miteux, une bouteille de rhum pour seule compagnie. Les effluves de l'alcool qui commençaient petit à petit à prendre possession de son esprit. Pas assez, jamais assez pour chasser les même visions d'horreur de son esprit. Elles revenaient sans cesse, le harcelaient sans relâche malgré le nombre d'années qui étaient passées. Il n'avait plus conscience du nombre exact. Les jours et les nuits se suivaient et se mélangeaient sans qu'il puisse les distinguer. Depuis combien de temps exactement était il sur ce nouveau bateau? Combien d'années cela faisait-il qu'il avait quitté son Angleterre natale? Quand était-ce la dernière fois qu'il avait étreint sa femme dans ses bras? Il ne savait plus... Cela n'avait plus d'importance désormais.
Il continuait de boire, ne prêtant pas attention aux bruits habituels qui résonnaient dans la taverne. Engueulades d'ivrognes, bagarre d'homme blessé dans leur orgueil et cherchant à prouver quelque chose avec leurs poings. Quoi exactement, ça il ne le savait pas. Qu'ils n'étaient pas lâches? Qu'ils n'avaient peur de rien? C'était des conneries, ils avaient tous peur de quelque chose au plus profond de leur être et tenter de nier cette évidence était un effort inutile.
Il releva les yeux en entendant des cris sortant de l'ordinaire. Au milieu des injures habituelles il avait entendu la voix d'une femme appelant à l'aide. Le temps qu'il sorte le visage de son verre de rhum elle était déjà partie. Il n'avait eu le temps de ne la voir qu'un instant, pauvre jeune fille trempée emportée par deux brutes. Leurs intentions étaient claires. Nul besoin de les examiner de plus près pour savoir ce qu'ils comptaient lui faire. Ces enfoirés... ils étaient moins que des hommes à ses yeux. Peut être pensaient-ils faire preuve d'une virilité démesurée en agissant ainsi avec une femme, en la prenant de force et contre son gré. De son point de vu, il n'y avait rien de plus répugnant et de plus opposé à ce que devait être l'honneur et l'orgueil d'un homme digne de ce nom.
Il jeta quelques pièces sur la table et se leva pour braver la pluie à la recherche de la jeune femme. Il était hors de question qu'il la laisse se faire battre et violer par ces êtres humains répugnants. Il était peut être devenu un pirate, mais il lui restait son honneur. Il n'était pas dit qu'il laisserait une femme sans défense face à son terrible sort.
Il releva la capuche de son manteau et s'enfonça dans la nuit, essayant de retrouver l'endroit où ils avaient pu l'entrainer. Il n'y arriva cependant pas. Des éclats de voix retentirent dans son dos, le stoppant net au milieu de la chaussée.
- Ehh!!! Le pirate!! Viens par là j'ai deux mots à te dire...
Il se retourna en soupirant pour tomber nez à nez avec le marchand qu'il avait croisé l'autre jour au marché, l'espèce d'abruti qui avait tenté de l'escroquer. Il avait une petite idée de ce qu'il lui voulait et il sentait qu'il n'allait guère apprécier ça.
- Je vous écoute...
Il lui sourit, le narguant plus qu'autre chose avec son attitude volontairement courtoise. Il n'y avait rien de plus énerver pour un type qui chercher à se battre que de voir ses efforts pour énerver la partie adverse vains.
- Tu m'as ridiculisé l'autre jour au marché!
Il lui sourit davantage, ravi de voir l'homme s'emportait tout seul.
- Non... vous y êtes parvenu très bien tout seul. Maintenant si vous n'avez rien de plus intéressant à me dire, je vais vous laisser.
Il fit une petite courbette devant le marchand et se retourna, repartant à la recherche de la jeune femme. Il entendit puis vit l'impact de la balle qu'il venait de tirer, se figer dans un mur à quelques mètres de lui. Il était certainement trop éméché pour réussir à tirer droit. L'alcool lui avait donné le semblant de courage qu'il lui manquait pour oser l'affronter et régler le différent qu'il pensait avoir avec lui. De son point de vue, l'affaire était réglée depuis longtemps. Il avait voulu l'escroquer. Il ne s'était pas laissé faire. Il était parti voir la concurrence. L'affaire était close. Ce n'était apparemment pas le cas pour ce type et son égo blessé.
Il l'entendit vaguement vociféré dans son coin tandis qu'il s'éloignait. Trop saoul pour tirer et également trop saoul pour pouvoir le poursuivre. Il était inutile qu'il perde son temps avec lui, il avait plus important à faire.
Il tourna en rond un moment, essayant de retrouver la jeune femme, en vain. Où qu'ils l'aient emmené, ils semblaient l'avoir bien caché. Il soupira avec lassitude. Il s'en voulait, se sentait vide et épuisé. Il tenta de ne pas penser à ce qu'ils étaient entrain de lui faire. Il ne pouvait plus rien pour elle désormais.
Il tenta de se faire une raison, de chasser la jeune femme de ses pensées. Il était temps pour lui qu'il retourne au navire. Il se dirigea vers sa barque et se figea en voyant qui s'y trouvait. Il l'avait finalement retrouvé. Après tout ce temps passé à la chercher, elle était là, se cachant dans sa barque. Curieuse ironie du destin.
Il se pencha vers elle et la secoua doucement. Il se recula et s'assit dans un coin de la barque tandis qu'elle se relevait vivement et se réfugiait dans le coin opposé. Il ne savait pas qui elle était, ce qu'elle faisait là et comment elle s'était trouvée dans cette situation, mais une chose était certaine elle n'allait pas bien. Elle avait l'air effrayé et il lui semblait voir un début de fièvre dans ses yeux. Cela n'avait rien d'étonnant, vêtue comme elle l'était, sous cette pluie, elle n'allait pas survivre très longtemps.
Il se redressa et retira son manteau qu'il lui tendit. Elle était gelée et en avait certainement plus besoin que lui. C'était le minimum qu'il pouvait faire avant de lui trouver un endroit chaud où elle pourrait passer la nuit en sécurité. Il lui sourit gentiment tandis qu'elle se décidait à le prendre et lui murmurait un merci. Il céda à son impulsion et lui posa la question qui lui brûlait les lèvres depuis qu'il l'avait retrouvé.
- Que faites vous dans ma barque?
« Pardon, je…je vais m’en aller…il pleuvait et…elle était là…je ne savais pas où aller…Et »
Il se redressa et s'approcha d'elle tandis qu'il voyait les larmes se mettre à couler sur ses joues. Il se mordit la langue, se reprochant d'avoir été aussi brusque dans sa question. Elle était effrayée et il n'avait fait que l'effrayer davantage.
« Je suis désolée, je vais m’en aller… »
- Non... non!
Il leva ses mains, essayant de l'empêcher de bouger ou de tenter de sortir. De toute façon, il se tenait entre elle et le quai. Elle ne pouvait pas partir sans passer par lui. Il se rendit compte alors que son attitude était certainement entrain de l'effrayer davantage. Il se mordit la langue et se força à lui expliquer avec douceur.
- Je les ai vu vous emmenez hors de la taverne. Je suis sorti pour vous retrouver mais je n'ai pas réussi. Alors je suis surpris de vous retrouver dans ma barque.
Il attendit un instant, hésitant à continuer au risque de poser une question qui la mettrait davantage mal à l'aise.
- Comment avez vous fait pour vous échapper? Vous ont-ils... est-ce qu'ils vous ont fait du mal?
Alors que je souhaitais passer pour quitter l’embarcation, l’homme m’en empêcha et je restais assise, mes grands yeux sur lui, il ne semblait pas me vouloir du mal, mais après ce qui était arrivé dans la taverne, je ne pouvais pas être certaine qu’il soit bon ou mauvais. Sur mes gardes, je l’écoutais tout de même me parler. De plus, j’avais chaud, mes yeux me brûlaient de plus en plus et tout ce que je désirais, c’était dormir dans un lit, un endroit au chaud avec un feu, un lieu rassurant et sans eau, par pitié, plus d’élément liquide sous moi.
Alistair : Je les ai vus vous emmenez hors de la taverne. Je suis sorti pour vous retrouver, mais je n'ai pas réussi. Alors, je suis surpris de vous retrouver dans ma barque […] Comment avez-vous fait pour vous échapper? Vous ont-ils... est-ce qu'ils vous ont fait du mal?
Me retrouver, il voulait m’aider, il n’était donc pas comme tous ceux que j’avais suppliés du regard alors que ces deux horribles personnages me tiraient vers l’extérieur. J’avais eu de la chance, beaucoup de chance et même si ce canot n’était pas le sien, j’appréciais sa sollicitude à mon égard. « Je ne sais pas… » Je revois les images dans ma tête et je suis si lasse, j’ai envie de pleurer de nouveau. « Je me suis sauvée, ils n’ont pas eu le temps de me blesser…merci en tout cas de vous en assurer, Monsieur. Je ne savais où aller, je ne connais personne dans ce pays, je suis fatiguée, j’ai faim et…est ce que vous pouvez m’aider, savez où je pourrais dormir le temps de trouver un travail…n’importe quoi qui…oh seigneur…si vous saviez comme je regrette mon Angleterre…mes parents… » Il ne devait probablement pas connaitre mon pays non plus, comme Tankred qui m’avait recueilli à moitié vivante en pleine tempête. J’aurais donné n’importe quoi en cet instant pour être ailleurs plutôt qu’ici. Cet environnement, ce pays me rendaient maussade et mélancolique, c’était comme si, une présence se jouait de moi et de mes sentiments. Mais au final, peut-être n’était-ce que la fièvre qui parlait. Alors que l’homme me répondait, mon ouïe perdit en intensité, ma vue devint floue, la terre se mit à tourner et rapidement, tout devint noir.
Je m’éveillais, je ne savais ni combien de temps s’était écoulé, ni où j’étais. Après un temps d’adaptation, je remarquais la souplesse du matelas où je me trouvais, la chaleur dans l’âtre et la douce lumière des bougies près de mon lit, posées sur une table de chevet. J’étais à l’abri, une chemise de nuit propre et sèche. Je décidais de me redresser, j’avais l’impression que j’avais dormi bien trop longtemps, mon esprit était pâteux et peu enclin à la réflexion complexe. Une voix douce et amicale me parvint près de la fenêtre et je mirais l’homme qui était avec moi dans la barque, d’après mon dernier souvenir. « Bonjour…je suis toujours à Neverland ? » Je ne savais plus où se situait la réalité du rêve, sans doute cet état léthargique qui était encore bien présent dans mon sang. « Vous m’avez aidé, mais je ne connais même pas votre nom et vous ne savez même pas qui je suis » Il me sourit et je lui répondis avec un large rictus. « Je suis Lady Lyra Spencer, mon père…mais…cela n’a plus d’importance ici…Lyra suffira »
Il s'en voulait de l'avoir questionnée ainsi. Ce n'était pas le moment de l'interroger sur ce qu'elle avait vécue. Elle avait besoin de calme, de repos, d'un endroit au sec pour se reposer mais surtout elle avait besoin d'oublier cette terrible soirée dans un endroit où elle serait en sécurité. Discuter de ce qu'il s'était passé dans cette barque sous la pluie ne l'aiderait pas.
« Je me suis sauvée, ils n’ont pas eu le temps de me blesser…merci en tout cas de vous en assurer, Monsieur. Je ne savais où aller, je ne connais personne dans ce pays, je suis fatiguée, j’ai faim et…est ce que vous pouvez m’aider, savez où je pourrais dormir le temps de trouver un travail…n’importe quoi qui…oh seigneur…si vous saviez comme je regrette mon Angleterre…mes parents… »
Il était soulagé. Elle n'avait rien eu. Il n'avait pas réussi à arriver à temps mais au moins ces fils de chiens, ces bons à rien, n'avaient pas eu le temps de lui faire du mal.
Il fronça un peu les sourcils à sa remarque, entendant qu'elle venait d'Angleterre. Son pays à lui aussi... Combien de temps cela faisait-il qu'elle l'avait quitté? Il y avait peu de temps certainement vu qu'elle semblait d'arriver à peine ici. Peut être pourrait-elle lui donner des nouvelles de chez lui? Peut être qu'elle connaissait ses parents? Peut être savait-elle ce qu'ils étaient devenus depuis son départ?
Il se rapprocha, essayant de contenir son excitation. C'était la première fois depuis tellement de temps qu'il revoyait quelqu'un de son pays natal. Mais le temps qu'il s'approche d'elle, la fièvre semblait avoir gagner le combat contre elle. Elle était évanouie, ou du moins assoupie.
Il soupira. Il ne pouvait pas la laisser ainsi. Elle ne survivrait probablement pas si elle devait passer la nuit ici. Il passa ses bras autour de son corps et la prit dans ses bras tandis qu'il sortait de la barque. Il pouvait sentir son corps brûlant de fièvre au travers de son manteau. Il marcha un moment, essayant de trouver une chambre dans un établissement tranquille. Il n'avait pas envie que des ivrognes et des voleurs viennent l'importuner à nouveau.
Il trouva finalement son bonheur, un peu à l'écart du port, un bâtiment à l'aspect propre et peu chic. Enfin chic.... tout était relatif bien sur. Il déposa son précieux fardeau dans un coin en face de la cheminée, profitant que la salle était déserte pour la laisser en sécurité. Il arrêta la serveuse, fort charmante au demeurant, et lui expliqua la situation. Une demi heure plus tard, sa belle endormie était installée dans un lit aux draps propres, dans une chemise de nuit tout aussi propre. Un feu brûlait dans l'être et la réchauffait.
Il s'installa alors dans le fauteuil en face de celui ci et attendit qu'elle se réveille. Plusieurs heures passèrent avant qu'elle ne s'agite sur son lit et ne se redresse. Il lui sourit, reposant le livre qu'il avait trouvé et qui l'avait occupé pendant ce temps.
- Bonjour... Je suis content de voir que vous avez fini par rejoindre le monde des vivants.
Et soulagé, de voir qu'elle s'en remettrait. Les compresses humides qu'il avait posé sur son front l'avait aidé à faire baisser un peu sa fièvre mais maintenant qu'elle était réveillée, il pourrait la soigner de manière plus efficace.
« Bonjour…je suis toujours à Neverland ? »
Il soupira et se contenta de hocher la tête à sa question. Il aurait aimé pouvoir lui dire que ça n'était qu'un mauvais rêve, qu'ils n'étaient plus à Neverland mais de retour dans leur Angleterre. Malheureusement, il ne pensait pas qu'il pourrait un jour dire ça.
« Vous m’avez aidé, mais je ne connais même pas votre nom et vous ne savez même pas qui je suis »
Il se contenta de lui sourire. Cela n'avait que peu d'importance qui ils étaient. Ils n'étaient plus ces personnes là. Ils n'étaient plus personne ici. Il n'était plus l'homme qu'il avait été en Angleterre. Il n'était plus le Lord, le fils, le mari qu'il avait pu être. De son ancienne vie, il n'avait garder que son statut de médecin, y ajoutant simplement celui de pirate et... et rien de plus. Plus rien de tout ça ne comptait désormais.
« Je suis Lady Lyra Spencer, mon père…mais…cela n’a plus d’importance ici…Lyra suffira »
Il écarquilla les yeux un instant, en entendant son nom. Spencer... ce nom remontait un echo d'un souvenir enfoui au fin fond de sa mémoire. D'une autre vie, de bals dans de grandes salles richement décorées, de parures toutes plus belles les unes que les autres, d'hommes importants, de Lords et de Ladys...
Il se détourna et alla remplir une tasse à la petite bouilloire qu'il avait mis à chauffer au dessus du feu. Il revint et s'installa à ses côtés. Il lui tendit la tasse et attendit qu'elle la prenne.
- Ce n'est qu'un peu de tisane. Cela aidera à faire baisser votre fièvre.
Il la regarda boire et profita de ce moment pour continuer à parler.
- J'ai payé la chambre et les repas pour le reste de la semaine. J'ai également laissé un peu d'argent sur la table de nuit. Ainsi vous aurez le temps de vous retourner et de trouver un travail. Vous pouvez garder la chemise de nuit ainsi que les vêtements qui se trouvent sur la chaise là bas. Je vous rassure, ce n'est pas moi qui vous ai déshabillé et installée, c'est la serveuse. Reposez vous Lady Lyra. Vous êtes en sécurité ici.
Il lui sourit pour la rassurer. Il n'était peut être plus un Lord mais il gardait encore un minimum de savoir vivre pour ne pas dépasser cette barrière.
- Quant à mon nom... Je m'appelle Alistair, Sir Alistair McDouglas. Mais comme votre titre le mien neveut pas dire grand chose non plus ici. Mais je serais curieux d'avoir des nouvelles de notre bonne vieille Angleterre quand vous vous sentirez mieux bien sur.
Non, les convenances ici n’avaient plus lieu d’être. Déjà dans le navire qui devait l’emmener vers ce Nouveau Monde, les choses avaient changé. Ce n’était pas le protocole qui me manquait, mais plus le confort qu’il m’apportait, l’habitude, tout ce que je ne retrouvais pas ici sur cette île mystérieuse perdue au milieu de nulle part. Je me redressais davantage pour recevoir la tasse toute fumante que cet homme à la bonté sur les traits venait de me tendre. « Merci infiniment pour votre sollicitude »
Alistair : Ce n'est qu'un peu de tisane. Cela aidera à faire baisser votre fièvre.
J’étais encore faible, je la sentais de nouveau, cette mélancolie qui me rendait l’âme maussade, déjà avec Tankred, ce Viking pirate elle m’avait envahie. Doucement, je soufflais sur la boisson à la douce odeur pour la faire tiédir avant d’en boire finalement une gorgée salvatrice. La chaleur tomba doucement de ma gorge à mon estomac me provoquant une sensation plaisante et presque apaisante. Ma mère disait souvent qu’une bonne tasse de thé suffisait à retirer tous les maux du monde. J’esquissais un rictus affectueux en repensant à ma douce mère que je ne reverrais plus jamais.
Alistair : J'ai payé la chambre et les repas pour le reste de la semaine. J'ai également laissé un peu d'argent sur la table de nuit. Ainsi, vous aurez le temps de vous retourner et de trouver un travail. Vous pouvez garder la chemise de nuit ainsi que les vêtements qui se trouvent sur la chaise là-bas. Je vous rassure, ce n'est pas moi qui vous ai déshabillé et installée, c'est la serveuse. Reposez-vous Lady Lyra. Vous êtes en sécurité ici.
Je sentis mon cœur se réchauffer, mais c’était trop, je ne pouvais pas le laisser me choyer de cette manière sans lui rendre en retour la gentillesse qu’il venait de me prodiguer. « Je ne sais comment vous remercier, Monsieur, mais je ne peux accepter tant de choses sans vous promettre de vous dédommager d’une quelconque manière. Je vous en prie, laissez-moi, au moins faire preuve de gratitude envers vous ? Par ailleurs, je ne connais même pas le nom que vous portez »
Alistair : Je m'appelle Alistair, Sir Alistair McDouglas. Mais comme votre titre le mien ne veut pas dire grand-chose non plus ici. Mais je serais curieux d'avoir des nouvelles de notre bonne vieille Angleterre quand vous vous sentirez mieux bien sûr.
Ce cœur si meurtri quelque temps plus tôt, venait de bondir dans ma poitrine en entendant que lui aussi connaissait l’Angleterre, je n’étais donc pas folle. Précipitamment, je déposais ma tasse sur la table de nuit, pour faire un geste qu’il vienne plus vers moi. « Asseyez-vous Sir McDouglas, je ne pourrais pas être plus heureuse que de croiser un compatriote, fièvre ou non, je veux vous parler » Saisissant sa main, alors qu’il prenait plus sur le rebord de mon lit, je lui souris, d’une manière aussi sincère que l’était mon esprit en cet instant. « J’ai pensé en arrivant ici, sur cette île que j’avais perdu la raison, mais non, si vous aussi vous connaissez l’Angleterre, alors je ne le suis pas ! » Trop heureuse, je ne prenais pas garde à mon geste, cette paume qui se frottait avec bonté sur le dos de la main de cet homme encore inconnu. « Je trouverai toute la force du monde pour vous parler de Londres. C’est de là où je viens. Mes parents ont une grande demeure dans le nord de la ville, Kingstreet home, une grande étendu de verdure perdue entre la ville et la campagne. J’ai tant à dire sur Londres, mais…depuis combien de temps êtes-vous parti de…enfin d’Angleterre ? »
En effet, cela faisait assez longtemps et je n’étais encore qu’un bébé lorsqu’il avait quitté l’île de Bretagne. « Oui, cela fait longtemps en effet…et bien, Le Roi George II est au pouvoir depuis presque trois années à présent, il succède à son père George Ier. Nous avons eu deux années de querelle avec les Espagnols, suite à la Guerre de Succession pour le trône d’Espagne, des querelles qui sont allées jusqu’aux Caraïbes où nos navires ont subi beaucoup de pertes […] » Poursuivant mes informations, comme elles m’avaient été données, je l’informais de tout, du changement d’architecture aux derniers potins que mes oreilles avaient ouïe avant mon départ. Parfois, je l’observais, un rictus sur les lèvres, ce qui me faisait également sourire. Parler avec un homme qui me comprend était une bénédiction. Me sentant lasse et la fièvre remontant, Sir Alistair, me demanda de me coucher, qu’il reviendrait demain ou dans deux jours pour voir si j’allais bien. Je le remerciais encore avant de sombrer dans mes songes.
Trois jours passèrent et j’étais déjà bien remise, debout dans la chambre, j’observais par la fenêtre ce monde qui grouillait en bas, le marché aux poissons semblait rassembler de nombreuses personnes. On frappa à ma porte. « Entrez » Tournant mon visage vers la personne qui venait de demander l’autorisation d’entrer, j’affiche rapidement un large sourire en voyant mon sauveur. « Sir Alistair ! Quel bonheur de vous revoir enfin. Puis-je à mon tour vous offrir un thé, j’ai fait chauffer de l’eau et l’aubergiste m’a monté de quoi manger, si vous voulez nous pouvons partager ? » J’allais vers lui, lui prendre la main, mes yeux pétillants de le revoir depuis la dernière fois. « J’ai une bonne nouvelle, une amie de l’aubergiste cherche une aide pour sa ferme et elle m’a proposé à ce travail. Certes, je ne connais rien à tout cela, mais…j’apprendrai. Ce n’est pas comme si j’avais le choix, et vous ? Qu’avez-vous fait pendant ces derniers jours ? » J’avais repris du poil de la bête, c’était le moins qu’on puisse dire. Le moulin à paroles que j’étais venait de se mettre en marche, trop heureuse de revoir et de parler à un visage amical.
« Je ne sais comment vous remercier, Monsieur, mais je ne peux accepter tant de choses sans vous promettre de vous dédommager d’une quelconque manière. Je vous en prie, laissez-moi, au moins faire preuve de gratitude envers vous ? Par ailleurs, je ne connais même pas le nom que vous portez »
Ce n'était rien, réellement. C'était même un peu égoïste dans le fond. Cet argent... il n'en avait pas besoin. Il était sale, gagné par la piraterie de ses compagnons de bord. La plupart du temps il le noyait dans l'alcool, n'ayant que peu de besoins et la plupart étant satisfait par sa vie à bord. Et puis... cela lui redonnait bonne conscience, l'impression que l'homme qu'il avait pu être n'était pas encore totalement mort, qu'il restait un peu de bonté en lui, suffisamment pour aider une femme en détresse.
Il sursauta, tandis qu'elle reposait bruyamment la tasse à côté d'elle.
« Asseyez-vous Sir McDouglas, je ne pourrais pas être plus heureuse que de croiser un compatriote, fièvre ou non, je veux vous parler »
Il sourit timidement en réponse au sien. Il se laissa faire tandis qu'elle lui prenait la main et l'obligeait à s'asseoir sur son lit à côté d'elle. Sir McDouglas... il y avait tellement longtemps qu'on ne l'avait pas appelé ainsi. Il avait l'impression, non c'était le cas, que cet homme était mort depuis bien longtemps, depuis le jour où il avait fui l'Angleterre pour sauver sa vie.
« J’ai pensé en arrivant ici, sur cette île que j’avais perdu la raison, mais non, si vous aussi vous connaissez l’Angleterre, alors je ne le suis pas ! Je trouverai toute la force du monde pour vous parler de Londres. C’est de là où je viens. Mes parents ont une grande demeure dans le nord de la ville, Kingstreet home, une grande étendu de verdure perdue entre la ville et la campagne. J’ai tant à dire sur Londres, mais…depuis combien de temps êtes-vous parti de…enfin d’Angleterre ? »
Kingstreet home, cela lui rappelait vaguement quelque chose. Il lui semblait y être déjà allé, il y avait bien longtemps, quand son père avait décidé de le présenter au monde. De là à se souvenir de s'il y avait vu Lyra, c'était difficile à savoir. Cela remontait à si loin. Les gens, les lieux, les souvenirs, tout semblait se mélanger dans sa mémoire.
Il réfléchit un instant, essayant de retrouver depuis combien de temps il avait quitté l'Angleterre.
- Je ne sais plus trop. Je dirais une dizaine d'années. Le temps s'écoule étrangement ici. C'est difficile de me souvenir depuis quand je suis arrivé à Neverland et déjà avant cela faisait quelques temps que j'avais quitté l'Angleterre. Mais racontez moi. Je veux savoir ce qu'il s'est passé là bas.
Il l'écouta, notant mentalement chacun des détails qu'elle évoquait. Il n'osait pas vraiment la questionner davantage. Une question lui brûlait les lèvres. Il voulait savoir ce qu'étaient devenus ses parents, s'ils avaient réussir à se relever après la tragédie qui les avait frappé. Après toute la souffrance qu'il leur avait causé. Finalement il décida qu'il valait mieux s'arrêter là pour ce soir. Elle semblait épuisée, la fièvre la reprenait petit à petit. Ce n'était pas sérieux qu'il reste là à la fatiguer davantage en discussion. Ils auraient tout le temps plus tard.
- Il est temps pour moi de partir Lady Lyra. Vous devez vous reposer et je ne me suis que trop longtemps absenté du bateau.
Il se leva et retira sa main dans la sienne. Ce petit moment au coin du feu, cette discussion avec elle sur sa vie d'autrefois, la chaleur de sa main dans la sienne... c'était agréable, une douce torture dans le même temps. Elle faisait remonter en lui des souvenirs, des sensations qu'il avait perdu depuis bien des années. Les retrouver brièvement était un peu trop douloureux pour le moment.
Il l'installa confortablement dans le lit, remontant la couverture sur elle.
- Je reviendrais vous voir dans un jour ou deux. Si vous sentez que vous avez toujours de la fièvre, reprenez un peu de thé. Prenez soin de vous Lyra...
Après un dernier sourire il s'en alla, laissant la jeune femme seule dans la chambre et priant intérieurement pour qu'elle mieux.
*~*~*~*
Il lui fallut trois jours avant de pouvoir revenir. Une sortie en mer, un surplus de malade à soigner encore à cause de la nourriture infecte de cet incapable de Mouche et le temps avait filé sans qu'il puisse venir la voir. Il s'était arrêté au marché, flânant entre les étales, cherchant s'il y avait quelque chose d'intéressant. Il s'était finalement figé en voyant un article en particulier. Un médaillon, comme sa femme en portait un autrefois. Il ne sut pas ce qu'il lui avait pris, sur quelle impulsion il se décida pour aller acheter le médaillon. L'offrir à Lyra, ce serait... ridicule. Ce n'était pas un présent qu'on offrait à une inconnue que l'on avait sauvé. C'était un cadeau que l'on offrait à celle que l'on courtisait. Sauf que c'était loin d'être le cas. Elle était belle, il le reconnaissait. Mais il y avait bien longtemps qu'il avait cessé d'espérer rencontrer une femme. Le souvenir de son épouse ne cessait de le hanter. Il ne voulait en aucun cas tenter de la remplacer par une autre car à ses yeux, nul femme ne pourrait l'égaler dans son coeur. Alors ce médaillon c'était... il ne savait pas trop. Un cadeau un peu nostalgique de la vie qu'ils avaient pu avoir avant, une tentative de converser les personnes qu'ils avaient été un peu plus longtemps avant que ce pays n'ait irrémédiablement tout détruit d'eux. Peut être....
Il fourra le bijou dans sa poche et repartit à grands pas vers l'auberge où elle séjournait. Il frappa timidement à la porte et entra quand elle l'y invita.
Elle allait beaucoup mieux, cela se voyait. Elle respirait la santé, la vitalité et... la joie aussi. Il ne s'attarda pas bien longtemps sur la raison du plaisir de la jeune femme. Elle le prit par la main et l'entraina avec elle.
« Sir Alistair ! Quel bonheur de vous revoir enfin. Puis-je à mon tour vous offrir un thé, j’ai fait chauffer de l’eau et l’aubergiste m’a monté de quoi manger, si vous voulez nous pouvons partager ? J’ai une bonne nouvelle, une amie de l’aubergiste cherche une aide pour sa ferme et elle m’a proposé à ce travail. Certes, je ne connais rien à tout cela, mais…j’apprendrai. Ce n’est pas comme si j’avais le choix, et vous ? Qu’avez-vous fait pendant ces derniers jours ? »
Il lui sourit, ravi de la voir de si bonne humeur de découvrir la bonne nouvelle qui semblait la mettre dans cet état. Elle avait trouvé un emploi. Elle allait pouvoir s'en sortir par elle même après le coup de main qu'il lui avait donné.
- Je suis certain que vous vous en sortirez à merveille. Je suis heureux de voir que vous avez trouvé un emploi convenable.
Il n'aurait pas supporté si elle avait du se résoudre à vendre son corps comme le faisait certaines femmes. Il se serait débrouillé autrement. Il lui aurait donné tout ce qu'il avait mais il ne l'aurait pas laissé agir ainsi.
- J'ai été... assez occupé sur le navire qui m'emploie. Je m'excuse d'ailleurs de ne pas avoir pu venir plus tôt mais mes obligations m'ont retenues.
Il aurait voulu pouvoir venir plus tôt. Pendant ces quelques jours il n'avait cessé de penser à elle et de s'inquiéter de sa santé. Il était soulagé de l'avoir retrouvée en si bonne forme.
Il prit la tasse de thé qu'elle lui avait préparé et trempa doucement ses lèvres dedans. Il hésita un instant, puis finalement il sortit le médaillon qu'il avait trouvé pour elle.
- Ce... ce n'est pas grand chose mais... je l'ai vu tout à l'heure et j'ai pensé à vous. En souvenir de notre Angleterre...
Il prit sa main et déposa doucement le bijou à l'intérieur.
- Ne vous méprenez pas, je n'attends rien de vous en échange que ce soit pour la chambre ou pour ça. C'est juste... un cadeau.
Il effleura une dernière fois sa main et se recula, buvant une nouvelle gorgée de son thé.
Cet homme qui m’a tant aidé et qui s’est montré si bon avec moi, m’encourage à présent dans cette vie qui sera bientôt la mienne. Je sais que j’en demande un peu trop, mais s’il pouvait rester de mes connaissances, j’en serais plus que ravie. Après tout, je ne pense pas rencontrer de personne comme lui dans son monde tout nouveau. « Merci, je ferai de mon mieux, je ne crains pas de me salir les mains » Sir Alistair s’excuse de ne pas avoir tenu la parole qu’il m’avait fait. Ne pas venir plus tôt, mais, le simple fait qu’il s’en excuse me montre encore une nouvelle fois combien, il est éduqué et gentleman. Je posais ma tasse sur la petite table près de nous, le mirant pour lire en lui, bien entendu, je ne prétendais pas pouvoir le faire. Il était malgré tout un inconnu, mais un inconnu qui m’avait apporté un mince espoir dans cette nouvelle aventure que me donnait la vie. « Ne vous excusez pas, je vous en prie. Il est déjà fort généreux de votre part de m’avoir apporté tout cela » Je désigne la chambre d’un geste de main, ainsi que mes vêtements propres et bien que différents de ceux que je portais à Londres, chauds et agréables. « Je ne sais comment vous montrer ma gratitude, mais je sais que je le ferais un jour, lorsque je pourrai vous retourner votre gentillesse » Je lui souris, le voyant boire son thé avec cette élégance de mon pays. Je l’observe fouiller ses poches avant d’en sortir un bijou magnifique, une pierre bleue au reflet de nacre.
Alistair : Ce... ce n'est pas grand-chose, mais... je l'ai vu tout à l'heure et j'ai pensé à vous. En souvenir de notre Angleterre...
Lorsqu’il prit ma main pour me faire le cadeau de ce splendide présent, je ne sais si je dois l’accepter. Ce bijou devait être très onéreux et c’était à moi de lui rendre sa grâce et non le contraire. Bien vite, il ajoute que je ne lui dois rien, qu’il n’attend rien en échange de ce cadeau, mais cela me touche profondément. Sa paume s’écarta de la mienne dans une douce caresse et je me pris à le regarder encore, j’en avais presque les larmes aux yeux, tant de bonté dans cet homme pour qui je n’étais rien. L’empathie profonde qu’il m’avait montrée depuis notre rencontre ne pouvait que me toucher d’une façon profonde. « Je ne peux accepter, Sir Alistair…Je n’ai pas de quoi payer ma dette envers vous et encore moins accepter ce présent magnifique… » L’homme posa sa tasse et me repris la main pour enfermer le bijou et éviter que le lui refuse. Je compris en plongeant mon regard dans le sien que cela lui tenait à cœur, mais plus encore, qu’il avait besoin de cela, pour quelle raison, cela ne me regardait pas, mais c’était comme si, cet homme d’une générosité impressionnante voulait racheter son âme en faisant le bien autour de lui. « Alors, je l’accepte volontiers. Merci…de tout mon cœur »
Notre conversation s’en retourna vers l’Angleterre, il me demanda si par le plus grand des hasards je connaissais ses parents et après quelques réflexions, je me rappelais en effet un couple, amis de mes parents qui souvent venaient nous rendre visite durant les grandes réceptions que nous organisions dans notre demeure. « Je ne saurais vous dire, sondez leurs cœurs n’a pas été à ma portée, mais je sais que ma mère en a un jour parlé. Elle a parlé que Lady McAlistair avait eut grand mal à se remettre de la perte qu’elle avait subie. À l’époque je n’entrais pas dans les cercles de discussions. Je sais juste que… » Devais je lui annoncer ainsi. « Cela fait bien des années à présent…votre mère tomba gravement malade, elle n’est pas morte de sa maladie, mais elle ne se lève plus de son lit. Je regrette de n’en savoir davantage et de vous donner de si accablantes nouvelles de votre famille » Navrée de voir son visage se tendre, je m’approchais de lui sentant son désarroi ou peut-être que je me trompais. Bien que la convenance m’interdise dans le monde où je venais d’être aussi tactile avec un homme, après tout ce qu’il avait fait pour moi, je ne pouvais le laisser ainsi. Je déposais ma paume sur sa joue fraiche en signe de réconfort, un geste bien maigre, mais quoi faire d’autre. « Je suis véritablement navrée, vous pouvez me croire. Sachez une chose, je ne sais ni comment, ni pourquoi, nos chemins se sont croisés, mais si nous nous connaissions dans l’autre monde, alors ce n’est pas un hasard si nous sommes réunis aujourd’hui. Et si je peux vous aider d’une manière ou d’une autre, je le ferais, car j’ai une dette envers vous et cela pour le reste de la vie qu’on voudra bien m’accorder »
« Merci, je ferai de mon mieux, je ne crains pas de me salir les mains. Ne vous excusez pas, je vous en prie. Il est déjà fort généreux de votre part de m’avoir apporté tout cela. Je ne sais comment vous montrer ma gratitude, mais je sais que je le ferais un jour, lorsque je pourrai vous retourner votre gentillesse »
Il n'en doutait pas mais même si elle ne le faisait pas ce n'était pas grave. Voir son sourire fleurir sur ses lèvres, savoir qu'elle était en sécurité et qu'elle ne risquait rien, c'était cela sa vraie récompense et cela lui suffisait amplement. Il n'avait pas besoin qu'elle fasse quoi que ce soit pour lui. Il n'avait besoin de rien en fin de compte. Il avait perdu toute envie quand il l'avait perdu elle. S'abrutir l'esprit dans le rhum jusqu'à parvenir à refouler un minimum sa douleur, c'était la seule chose dont il avait réellement envie, et ça il doutait fort qu'elle la lui donne.
« Je ne peux accepter, Sir Alistair…Je n’ai pas de quoi payer ma dette envers vous et encore moins accepter ce présent magnifique… »
Il s'attendait à cette réponse. Elle était beaucoup respectueuse et bien élevée pour accepter ainsi un tel présent. Il n'en attendait pas moins d'elle. Et pourtant il se devait d'insister. Parce que ça lui faisait plaisir et que ce présent il l'avait acheté en pensant à elle.
Il posa sa main sur la sienne et referma ses doigts sur le bijou.
- Acceptez s'il vous plait... cela me fait plaisir.
Il sourit et relâcha sa main. C'était la première fois depuis longtemps qu'il prenait du plaisir à acheter quelque chose et à l'offrir à quelqu'un. Il ne voulait pas qu'elle lui retire ce petit semblant d'humanité, ce morceau de son ancienne, qu'il semblait avoir retrouvé grâce à elle.
« Alors, je l’accepte volontiers. Merci…de tout mon cœur »
Il lui sourit à nouveau puis se recula et se ré-installa dans son fauteuil. Il serra ses mains autour de sa tasse et en avala une légère gorgée, savourant la chaleur et la douceur du liquide. Cela faisait terriblement longtemps qu'il n'en avait pas bu. Depuis ces dernières années ses repas s'étaient principalement composés des rations de bord, de rhum et de bière.
Il soupira, hésitant un moment puis se décida à poser la question qui le taraudait depuis plusieurs jours.
- Pardonnez moi Lady Lyra si ma question vous importune mais... auriez vous entendu parler de mes parents?
Il voulait savoir, si ces derniers étaient toujours en vie, s'ils allaient bien, s'ils étaient parvenus à surmonter la déception qu'il leur avait infligé. Il espérait que ce soit le cas. Il ne voulait pas se dire que ce qu'il avait fait, avait gâché leur vie. Elle était jeune et peut être n'était-elle pas au courant du scandale qu'il avait provoqué à l'époque, mais il voulait essayer, peut être qu'il pourrait savoir.
« Je ne saurais vous dire, sondez leurs cœurs n’a pas été à ma portée, mais je sais que ma mère en a un jour parlé. Elle a parlé que Lady McAlistair avait eut grand mal à se remettre de la perte qu’elle avait subie. À l’époque je n’entrais pas dans les cercles de discussions. Je sais juste que… Cela fait bien des années à présent…votre mère tomba gravement malade, elle n’est pas morte de sa maladie, mais elle ne se lève plus de son lit. Je regrette de n’en savoir davantage et de vous donner de si accablantes nouvelles de votre famille »
Son coeur se brisa à cet instant là. Il s'attendait à ce que son départ les fasse souffrir mais ça... sa mère... sa pauvre mère... sa chère et tendre mère était malade par sa faute... Il la revoyait si belle et si souriante. Il se rappelait de ces nombreuses fois où elle l'avait étreint pour le réconforter. Il plongeait son nez dans son opulente chevelure et en respirait leur parfum. Elle avait toujours ce discret parfum de rose sur elle, quelque soit la saison il ne cessait de la quitter. Il se demandait aujourd'hui si elle sentait toujours aussi bon, ou si la maladie avait tout détruit de la femme qu'elle était. Il ne pouvait le supporter. L'idée qu'il était le responsable de son état... mais surtout le vide l'accabla plus que jamais en cet instant. Il réalisa qu'il ne pourrait plus jamais la revoir. Jamais il ne pourrait la serrer à nouveau dans ses bras et l'embrassa une dernière fois en guise d'adieu. Il réalisa alors, et cette pensée lui fit davantage de mal, qu'il ne gardait aucun souvenir de la dernière fois où il lui avait parlé. L'avait-il étreint? Lui avait-il dit à quel point il l'aimait avant qu'il ne soit trop tard et qu'il ne la quitte à tout jamais?
Il redressa le visage quand il sentit une main venir se poser sur sa joue, le sortant brutalement de ses pensées.
« Je suis véritablement navrée, vous pouvez me croire. Sachez une chose, je ne sais ni comment, ni pourquoi, nos chemins se sont croisés, mais si nous nous connaissions dans l’autre monde, alors ce n’est pas un hasard si nous sommes réunis aujourd’hui. Et si je peux vous aider d’une manière ou d’une autre, je le ferais, car j’ai une dette envers vous et cela pour le reste de la vie qu’on voudra bien m’accorder »
Il posa sa main par dessus la sienne et lui sourit à nouveau, chassant pour un instant le chagrin qui venait de l'accabler.
- Vous n'y êtes pour rien. Je n'étais pas sot au point de penser que mon départ ne les avait pas affectés mais entre le soupçonner et le savoir il y a une différence.
Il serra doucement sa main entre ses doigts et la retira de sa joue. Il reprit sa tasse de thé et la termina d'un trait. Il se leva et lui tendit son bras, dans une maigre parodie de l'homme qu'il avait pu être autrefois. Vêtu de ses vêtements fatigués et gorgés de sel, ses cheveux en désordre et ses joues ornées d'un début de barbe, était-il encore le gentilhomme qu'il avait pu être?
- Me feriez vous l'honneur d'accepter de venir diner avec moi Lady Lyra? Vous n'avez aucune dette envers moi mais si vous tenez à m'être agréable d'une manière ou d'une autre, accepter mon invitation serait idéal.
Un simple diner pour continuer de ressentir cette impression qu'elle avait fait naitre en lui, celle que l'homme qu'il était n'avait pas encore été complètement détruit par le pirate.
Je voulais sincèrement porter secours et aide à cet homme qui avait été plus que bon pour moi. Lui dire ce que je savais le troublait, il suffisait de voir son regard changeant, ses sourcils se froncer anormalement. Oui, bien sûr qu’il en était affecté, le contraire en aurait été contrariant. Faisant de lui, une personne insensible. Lorsque sa main toucha la mienne, je sentis un réconfort, une chaleur au fond de mon ventre. Ses yeux se posèrent sur mon visage, il était bon, gentil et surtout, il me comprenait. Non, nous nous comprenions.
Alistair : Vous n'y êtes pour rien. Je n'étais pas sot au point de penser que mon départ ne les avait pas affectés, mais entre le soupçonner et le savoir il y a une différence.
Mon geste lui avait paru trop proche, je le pense puisqu’il retira ma main pourtant amicale de son faciès comme si, elle n’y avait pas sa place. Pourtant, je le jure, mon intention était louable et tout ce que je cherchais en réalité, c’était un peu de réconfort. Avec tout ce que j’avais traversé, il était la seule personne sur qui je pouvais me reposer. Ce n’était pas Tankred qui pouvait comprendre mes mots et mes pensées. Malgré l’homme qu’il était devenu, Alistair, lui voyait en moi. Alors que je songeais à m’excuser, sa main se tendit dans ma direction. Il venait de terminer sa tasse, elle trônait d’ailleurs sur la petite table. Ne pouvant refuser cette main, je déposais ma paume dans la sienne avec plaisir. Je saisis ce bras, qui comme les hommes de la bonne société s’apprêtait à sortir à la vue de tous.
Alistair : Me feriez-vous l'honneur d'accepter de venir diner avec moi Lady Lyra? Vous n'avez aucune dette envers moi, mais si vous tenez à m'être agréable d'une manière ou d'une autre, accepter mon invitation serait idéal.
Ma bouche s’étira en un rictus agréable, dessinant une légère fossette aux creux de ma joue. C’était une charmante invitation, une proposition que je ne pouvais pas refuser. D’une parce qu’elle était forte agréable et puis, parce que j’en avais envie. Une manière de me rassurer, il n’imaginait pas à quel point cette simple proposition gonflait mon cœur d’une joie et d’un espoir que je n’avais pas connus depuis bien longtemps. « J’accepte plus que volontiers votre demande, Sir Alistair, vous ne pouviez me faire plus beau cadeau…enfin…après votre magnifique pendentif. D’ailleurs… » J’attrapais le médaillon, lui donnant avant de me retourner relevant mes cheveux pour lui demander de me le passer autour du cou. « Pouvez-vous…s’il vous plait… ? » Je sentis une légère hésitation, avant de sentir la fraîcheur du métal sur ma peau, ses doigts parcoururent la chair de mes épaules, ses doigts habiles de chirurgien firent rapidement le geste sur le fermoir. « Merci » Je me tournais vers lui, posant mes deux doigts graciles sur le bijou somptueux. « Nous y allons ? » Son hochement de tête fut le point départ et rapidement, je repris son bras afin qu’il nous conduise vers l’extérieur. « J’aurais souhaité vous connaître lorsque j’étais encore à Londres. Certes quelques années nous séparent…mais…Je suis certaine que nous aurions eu des conversations des plus passionnantes. J’ai toujours eu beaucoup de mal à me faire comprendre ou entendre, déjà, par les hommes, amis de mes parents. Une femme trop bavarde ou trop intellectuelle déplait à la bonne société. Mais vous, vous ne semblez pas troublé par cette différence, c’est une chose que j’apprécie » Alors que nous avançons, je poursuis ma conversation seule, peut-être que je parle trop, c’est sans doute l’enfermement et la solitude des dernières semaines. Isolée en mer, puis jetée ici. Lorsque je m’en rends compte et surtout de la platitude de mes propos, je marque un temps d’arrêt. « Pardonnez-moi…je deviens aussi peu intéressante qu’une huitre » Ma remarque semble l’amuser, au moins, j’ai de l’autodérision. « Parlons de ce monde, de cette ville…dites m’en plus, je ne connais rien de plus que ce qu’à bien voulu me dire l’aubergiste. Et croyez moi, à part que je suis une île qui se nomme Neverland, qu’il y a des pirates, des sirènes et des enfants qui se perdent…ah oui, des indiens…je suis totalement perdue…alors, si vous vouliez bien m’expliquer tout ceci, je vous en serais éternellement reconnaissante »