Des souvenirs et des retrouvailles × ft. MELU&BRYN
Il y a longtemps, dans une autre vie, je courais dans ces bois, j'étais une petite enfant, aux cheveux blonds pâles, je riais aux éclats. Azalya, ma fée, me tournait autour, nous rions ensemble. Il y a longtemps, dans une autre vie, j'étais une enfant perdue. Rien que d'y penser, mon coeur se serre, mes souvenirs sont là, intacts, je me souviens des plus belles choses, de gros événements, et de quand je suis partie, sans regrets. Je ne regrette rien. Mais parfois, les souvenirs sont là et je n'y peux rien, je ne suis que nostalgique. J'aimerais retrouver les enfants perdus, les serrer contre moi, leur dire combien je les aime et partir. J'aimerais retrouver ma fée et lui dire encore et encore combien je l'aime. Nos adieux ont été déchirants, je l'ai regardé lui disant que j'allais partir, elle le savait, elle ne m'en voulait pas. Elle savait que tôt ou tard, j'allais partir et elle m'a clairement faire comprendre et dit qu'elle avait tout fait pour profiter de ma présence au maximum. Je me souviens avoir souris et pleuré.
Je soupire, je regarde autour de moi, je déglutis. Je suis devenue trop grande pour ça, trop âgée et surtout, je suis devenue un adulte. Je regarde la forêt, je sais que quelque part, vit les enfants perdus, mais je ne sais plus où. La magie, certainement, pour les protéger et les préserver. Pour qu'aucuns pirates ne sachent où ils sont pour les tuer. Je souris, faiblement et c'est le coeur lourd que je me retourne.
Vêtue d'une robe bleu pâle, les cheveux sagement coiffé et attaché je lève ma tête et « Brynjár ? » appelle je en souriant, reconnaissant le jeune homme qui me fait face. Nous faisons presque la même taille, même s'il me dépasse légèrement, sauf qu'il a l'air plus enfant que moi, disons qu'aujourd'hui, j'ai atteint la maturité, mais aussi l'âge d'une jeune femme d'une vingtaine d'année. Je lui souris, heureuse de le retrouver « Cela fait longtemps, tu vas bien ? » lui demande je en souriant
es pieds nus frôlaient la neige, s’entassant joyeusement dans la substance blanche et fraiche. Brynjár ressentait un long frisson jusqu’à son échine et pourtant, un large sourire illuminait son visage enfantin. La raison ? La forêt des quatre saisons était son endroit préféré. Le gamin adorait y gambader durant des heures. Souvent, il enlevait ses chaussures pour mieux sentir les feuilles mortes craquer sous sa plante de pied ou la neige lui caresser la peau. Il passait pour un sauvage aux yeux des individus venant simplement se balader dans le coin ! Mais après tout, tout le monde sait que cette forêt, c’est chasse gardée pour les enfants perdus.
D’ailleurs, le jeune garçon se faisait un malin plaisir d’effrayer les curieux qui rôdaient dans le coin. L’Arbre du Pendu n’était pas si loin et mieux valait éviter de les laisser faire le tour du propriétaire. Et puis, il fallait l’avouer, Bryn adorait voir leur visage se décomposer lorsqu’il se cachait dans les feuilles et qu’il imitait une grosse voix d’arbre magique. La plupart du temps, les gens partaient en courant en hurlant au monstre ! Mais parfois, ils sortaient leur arme et alors le gamin perdu devait ruser.
Mais aujourd’hui, pas de menace à l’horizon. Non car dès que Bryn eut remis ses chaussures et qu’il eut fait quelques pas, un visage familier se dessina à l’horizon. Ses longs cheveux blonds, très pâles, entouraient un visage juvénile. Elle n’était plus une fille perdue et pourtant, Brynjár trouvait que physiquement, elle avait encore toute sa place parmi eux ! Cela étant, la demoiselle avait pris une route différente. Chemin qui l’avait menée vers la vie d’adulte, vers la solitude loin de sa fée. D’ailleurs, à son approche, Maurice commença à bougonner. Il ne l’aimait pas, Melusine. Il la considérait comme une vilaine fille, une mauvaise fréquentation. En effet, elle avait abandonné sa fée en choisissant de devenir une adulte et ça, Maurice ne le tolérait pas.
- Salut Melu ! Je vais bien et toi ?
Brynjár n’était pas parvenu à en vouloir à Melusine d’avoir quitté les enfants perdus. Lui-même, à son retour des mines de Barbe Noire, avait eu un gros moment de doute. Mais tout cela appartenait au passé, aujourd’hui le jeune garçon était à nouveau épanoui parmi les siens. Il espérait sincèrement que Melu aussi, était heureuse. Maurice se nicha au creux de son oreille pour lui susurrer de fausser compagnie à la jeune fille. Cela fit rire Bryn mais il secoua négativement la tête. Au lieu de quoi, il désigna du doigt le petit être sur son épaule et reprit à l’adresse de la jeune fille :
- Je suppose que tu te souviens de Maurice ?
La fée lui fit les gros yeux. Brynjár ne put retenir un éclat de rire enfantin. C’était amusant de voir ce petit homme tout rouge de colère. Décidément, l’amour entre Melusine et Maurice, ça ne serait pas pour tout de suite ...
Des souvenirs et des retrouvailles × ft. MELU&BRYN
Je regarde mon jeune ami, mon coeur se serre lorsque je me souviens de ces années à passer à jouer ensemble, à se confier et à rire avec nos fées, mais j'ai grandis et je suis partie. Je remarque Claude bougonner, Brynjár me demande si je me souviens encore de lui. Je déglutie et souris tout en hochant la tête « Oui bien sûr et ... j'ai l'impression qu'il ne m'aime plus comme avant, mais je comprend ... il croit que j'ai abandonné Azalya, mais j'ai beaucoup discuté avec elle, nous savions qu'un jour ou l'autre ça allait arriver, j'ai toujours été très curieuse » dis je en haussant les épaules « D'ailleurs, comment va-t-elle ? » demande je ensuite, curieuse mais aussi soucieuse de savoir comment aller ma fée depuis mon départ. Certes, elle ne l'est plus, mais je la considère toujours comme telle, bien que beaucoup de choses ont changées.
Le jeune homme face à moi ressemble trait pour trait à un jeune garçon, un adolescent qui plus est. Il a eu énormément d'épreuves et nous nous relativement pas mal rapprochés, devenant des amis, mais aussi comme des frères et soeurs. Je suis soulagée qu'il ne m'en veuille pas de mon départ et qu'il soit toujours autant souriant et bienveillant à mon égard. « Hum ... ça vous dis de marcher un peu ? » demande je. La forêt ne me fait pas peur, je la connais par coeur, bien que désormais, je ne puisse plus revenir dans mon ancienne demeure, la magie fait son chemin et m'empêche de pénétrer à l'arbre du pendu, ce qui est normal, et je le conçois. A vrai dire, je n'ai plus réellement chercher à y aller. Je sais que je ne le peux plus, c'est un fait que j'ai accepté. « Je suis contente qu'entre nous tout aille bien, même si j'ai grandi et que je suis devenue une jeune femme, ça me rassure que tu ne m'en veuilles pas » me confie je en souriant « Vous êtes les bienvenus dans ma maison, si toi ou les autres enfants perdus comme les fées avez besoin de quelque part où vous cacher, vous savez que vous pouvez venir vous réfugier chez moi » lui dis je en souriant
« oh et racontes moi tout ! Comment vous les enfants perdus ? Avez vous eu des aventures virevoltantes ? » demande curieuse, les yeux brillants je n'avais qu'une hâte : c'était qu'il me raconte tout. Je voulais tout savoir, de leurs aventures, de ce qu'il se passe actuellement avec les pirates, s'ils ont ramené d'autres enfants perdus à l'arbre, bref je veux tout savoir
Melusine paraissait de bonne humeur, en bonne santé, heureuse même. Brynjár ne s’imaginait même pas vivre loin de l’Arbre du Pendu et des autres enfants perdus. Pour lui, c’était tout bonnement inconcevable. Maurice, pour sa part, tenait fortement rigueur à la jeune fille d’avoir abandonné sa fée. Bryn fut cependant surpris d’entendre Melusine parler de son départ de l’Arbre comme d’une fatalité, de quelque chose qui se devait d’arriver tôt ou tard. Or, lui, il ne se voyait pas partir. Ni aujourd’hui ni jamais. Que devait-il donc comprendre dans tout ça ? Penchant la tête sur le côté, le gamin se laissa une minute pour y réfléchir.
La demoiselle chercha alors à savoir comment se portait son ancienne fée, ce petit éclat de magie, de bonheur et d’espoir qui l’avait accompagnée durant tant d’années. Brynjár fut soudain extrêmement mal à l’aise. Il baissa la tête et se massa la nuque avec deux doigts. Maurice, à l’opposé, semblait se délecter de ce qui arrivait. Tout gêné, Bryn répondit sans même oser regarder Melusine dans les yeux :
- Elle se porte très bien. Elle aime sa nouvelle petite fille perdue.
Brynjár savait qu’il aurait été mal de cacher à Melusine la vérité mais la lui dire paraissait cruel. S’imaginant à la place de la demoiselle, le garçon perdu aurait beaucoup souffert de savoir Maurice protecteur envers un autre. Le lien unissant un enfant à sa fée était très privilégié, très spécial. Survivre à la mort ou la perte de l’un des deux était une épreuve que l’on ne souhaitait à personne. Après un bref silence où Bryn resta gêné et maladroit, Melusine proposa de marcher un peu. Maurice voulait partir mais le garçon lui fit signe de les suivre.
Elle se réjouissait de leur amitié qui continuait à survivre malgré les changements, malgré le fait qu’elle ne soit plus des leurs. Brynjár ne pouvait lui en tenir complètement rigueur. Lui-même, à la sortie des mines, avait eu ce genre de pensées. Évidemment, aujourd’hui, avec le recul, le garçon se disait qu’il avait été absurde d’y songer. Cependant, Melusine avait fait des choix et il les acceptait. Tous les autres enfants perdus ne faisaient pas forcément de même.
- Le prochaine fois qu’on jouera à cache-cache, je viendrai me cacher chez toi ! Personne ne me trouvera, je serai le meilleur !
Bryn en souriait déjà à l’avance. La vie n’était que jeu, friandises, bêtises, rires et amusements pour eux. Les responsabilités ? Très peu pour eux. L’amour ? Encore moins. Seule la notion de danger les maintenait encore dans une sorte de réalité. Sans compter que certains d’entre eux n’avaient plus aucunes limites et aucun sens du risque. Brynjár était tout de même bien conscient de ce qu’il pouvait lui arriver s’il baissait trop sa garde. Prendre les pirates à la légère ne faisait plus partie de ses plans.
- Je ne sais pas si les autres viendront par contre ... ils ne sont pas tous d’accord quand quelqu’un nous abandonne.
Le garçon perdu avait entendu parler de quelques cas d’anciens gamins de l’Arbre qui avaient pris le parti de les quitter. Ils étaient devenus adultes, avaient finis par fréquenter Blindman’s Bluff ou pire ... étaient tombés amoureux, s’étaient mariés et avaient eu des enfants eux-mêmes ! Cela paraissait immonde aux yeux de Brynjár. Lui, il ne voulait pas de ça, pas du tout. Peut-être que Melu, elle, elle s’imaginait maman un jour. Rien qu’à cette pensée, le gamin grimaça discrètement.
- Oh, tu sais, l’autre jour, on a capturé un pirate tout seul dans la forêt ! On l’a attaché au totem géant dans la plaine des jeux. Sauf qu’on a oublié de le détacher et qu’il est mort de soif après trois jours ...
Bryn pouffa de rire. La mort, bizarrement, ne semblait pas l’effrayer ou le traumatiser. Les enfants perdus avaient acquis le fait que les pirates tuaient, qu’ils n’avaient aucune pitié pour eux. Ils ne faisaient donc que rendre la pareille. Brynjár n’aimait pas tuer de ses propres mains, il n’était pas un guerrier et encore moins un bon combattant ! Mais s’il s’agissait de sa vie ou de celle de ses amis, il foncerait sans hésiter.
- Et puis l’autre jour, on a attrapé un drôle d’oiseau avec des plumes rouges, vertes, roses et bleues. Un peu comme un perroquet mais en plus féroce. On l’a appelé Tronchedecake. Ça lui va très bien !
Il adressa un large sourire plein de malice à Melusine.
- Tu ne t’ennuies pas toute seule dans ta maison ? Tu fais quoi pour jouer ?
Des souvenirs et des retrouvailles × ft. MELU&BRYN
Brynjár a l'air mal à l'aise lorsque je demande des nouvelles de mon anciennes fées, Azalya, je le regarde curieuse, espérant que rien de mal ne lui était arrivée, sinon je ne sais pas comment je réagirais. Azalya était ma fée, ma meilleure amie, celle avec qui j'aimais par dessus tout passer du temps à rêver, rire et discuter. Elle savait que tôt ou tard j'allais devenir adulte et de par son propre chef, elle m'a laissé faire, elle a juste profiter de ma présence. Elle savait que dans tous les cas, j'allais partir et devenir tout sauf une enfant perdue. Je regarde le jeune garçon, attendant sa réponse avec impatience, le coeur presque battant. Mais c'est alors qu'il me répond, elle se porte bien, je souris, elle a une nouvelle protégée, j'hoche la tête, le sourire radieux « Aaah ... je suis contente qu'elle s'est trouvée une nouvelle amie à protéger, c'est une très bonne fée et une très bonne amie, elle me manquera toujours » dis je en souriant.
Nous commençons par marcher, je sais que Claude n'est pas très content, il n'aime pas trop les adultes et je suppose qu'il me voit comme une traîtresse, et bien soit. S'il le désire, j'en suis une. Je ne dis rien d'autres, je ne fais que sourire et marcher pendant un bref instant avant de demander quelques nouveautés dans la vie de mon jeune ami. Je lui ai proposé de se cacher chez moi si jamais il avait un soucis, je souris à sa remarque « Sauf si tous savent que tu viens te cacher chez moi », le taquine je en souriant. Dans tous les cas, les enfants perdus étaient les bienvenus pour se cacher avant de revenir vers l'arbre ... d'ailleurs, comme me le confirme Brynjár, certains enfants n'aiment pas ce genre d'abandon « je sais, certains n'acceptent toujours pas ma décision » lui dis je avec sincérité
Aaaah l'arbre. Vous savez, mon ancienne vie me manque, mais en même temps, pas tant que ça. Je n'ai jamais essayé de revenir sur mes pas, car dans tous les cas, je sais que ça m'est désormais impossible de revenir vers l'arbre et la vallée des fées, le chemins m'est désormais interdit et je ne ferais que tourner en rond si jamais je souhaitais revenir vers les enfants perdus. En attendant, je demande quelques nouvelles à Brynjár. Mine de rien, cette forme de violence me répugne ... normalement, les enfants ne doivent pas vivre ce genre de choses, mais les enfants perdus sont insouciants de tout ça, en même temps, les pirates veulent les tuer, donc il est honorable de leur part de se défendre. Dans un sens, je suis bien contente d'avoir abandonné tout cela, même si l'aventure me manque ... mais comme je souhaite être tranquille, je suis posée en tant que couturière dans ma chaumière où personne ne m'embête « Faites quand même attention à l'odeur, un pirate mort est toujours pire qu'un pirate en vie » lui lance je en riant.
Je sais que si je lui fais la morale sur le meurtre, les batailles et autres, je vais perdre. Et puis, ils ne peuvent que compter sur eux-mêmes. C'est alors qu'il me parle d'un perroquet, je souris, amusée, face au prénom choisi « Si j'avais été là j'aurais rajouté "Tronche de cake arc en ciel" ... comme j'ai toujours adoré tout ce qui était coloré » dis je en riant. La discussion bifurque sur mes amusements et sur ce que je fais de ma vie en général, j'hausse les épaules « Et bien ... je couds, je fais des costumes, des robes, etc. Mais j'aime aussi me promener dans la forêt, je vais souvent de l'autre côté de l'île avec mon cheval pendant quelques temps, les gens du village me trouvent bizarre mais ... j'aime bien, vivre ma petite vie dans mon coin et regarder ce qu'il se passe, rester aux aguets. C'est important de veiller sur vous même de loin et de savoir que vous allez bien » lui dis je en souriant
La réaction de Melusine le laissa sans voix. Brynjár ne parvenait à comprendre comment elle pouvait prendre cette nouvelle avec tant de philosophie. Son sourire trahissait sa bonne humeur alors que s’il avait été à sa place, il aurait ragé ! Maurice, sa fée, n’était pas là pour protéger quelqu’un d’autre ! C’était son protecteur, son ami, son confident. Le sien et celui de personne d’autre. Bryn ne voulait ni le partager ni le quitter. Égoïstement, l’enfant voulait que le petit être ailé ne s’occupe que de lui tel un bambin réclamant l’attention parental.
Il ne put répondre à ce qu’elle venait de dire, trop chamboulé par l’absence de colère chez Melusine après cette annonce. Ils reprirent leur marche et Melu proposa à Bryn de venir se cacher chez elle si besoin. Ce serait la cachette idéale ! Malheureusement, la jeune fille était consciente que les autres ne la portaient plus dans leur cœur. Certains continuaient à l’apprécier mais beaucoup reniaient ceux qui les quittaient. Partir de l’arbre, c’était renoncer non seulement à une famille mais aussi à toute une vie. Brynjár avait bien failli perdre la sienne lorsqu’il avait été capturé par des pirates mais heureusement, le destin l’avait ramené à l’Arbre.
- Non. Ils ne l’accepteront pas.
Il ne disait pas ça sur un ton méchant mais simplement réaliste, fataliste. Jamais les enfants de l’Arbre ne pardonneraient une trahison ! D’ailleurs, la traîtrise était punie d’exclusion à l’Arbre. Bryn voyait cependant le départ de Melusine plutôt comme un au revoir et pas comme un abandon. De toute façon, ils pouvaient toujours se voir de temps en temps. Bien sûr, elle n’était plus sa sœur mais tant pis ...
Alors qu’il lui racontait leurs aventures, elle lui fit une remarque qui sembla frapper Bryn. Il ouvrit grand la bouche et murmura, l’air révélateur :
- C’est pour ça ...
Cela faisait des jours qu’une horrible puanteur infectait la plaine de jeux, les enfants portaient des masques de feuilles humides pour aller y jouer ou n’y allaient plus du tout. Désormais, Brynjár devinait pourquoi. Il allait véritablement falloir jeter ce vieux pirate à l’eau une bonne fois pour toute ! Melusine avait aussi envie d’ajouter sa touche personnelle à Tronchedecake mais malheureusement, sa voix ne serait plus entendue à l’Arbre. Bryn lui adressa un large sourire.
La vie de Melusine, telle qu’elle la racontait, ne ressemblait plus du tout à l’existence qu’ils menaient en tant qu’enfants perdus. Elle ne citait aucun jeu, ne parlait ni de bagarre ni de chamailleries ni de défis ni de rires. Brynjár fronça les sourcils et posa un doigt sur les lèvres, l’air songeur.
- Et qui veille sur toi ?
À l’Arbre, tout le monde veillait sur tout le monde. Et surtout, l’île elle-même de Neverland protégeait les enfants perdus en empêchant un quelconque adulte d’approcher de leur repère. Mais Melusine était désormais vouée à elle-même et Neverland ne ferait plus rien pour la protéger des menaces. Bryn trouvait ça horriblement triste. Le pire dans tout ça, c’était qu’arriverait le jour où ses traits encore juvéniles laisseraient place à ces horribles plis dans la peau qu’arboraient certains pirates ou certains habitants. Ils appelaient ça des rides mais Brynjár les soupçonnait simplement de se craqueler comme des vieilles peintures défraîchies.
- Tu n’as pas peur de ... vieillir ?
Il évita son regard. Désormais, c’était une fatalité pour Melusine. Dans quelques années, elle deviendrait vieille et plus jamais il n’y aurait de retour en arrière. Cette pensée terrorisait Brynjár. La vie d’adulte le répugnait, sa jeunesse et son insouciance étant tout ce qu’il possédait au monde.
Des souvenirs et des retrouvailles × ft. MELU&BRYN
Je regarde Bryn', il a l'air surpris du fait que j'ai accepté que ma fée se soit trouvée une autre amie, je pense que c'est clair, je préfère la savoir heureuse avec une autre enfant que seule et triste, à me dire que c'est et se sera toujours ma fée, car ce n'est plus le cas. Et puis, quand comme je suis partie, ça ne sert à rien que je tente de garder ma fée, ce ne sera plus jamais comme avant. Lorsque j'évoque le fait que les autres n'acceptent toujours pas mon départ, je m'en suis doutée, car ils estiment que mon départ est en réalité un "abandon". Si certains ne me font pas de mal, c'est parce que Rufio veille au grain. Je me souviens être allée le voir pour lui annoncer clairement ma volonté de partir, il avait soupiré et m'a laissé partir, c'était soit ça, soit je restais mais il me chassait et il n'avait pas envie de devoir faire la deuxième solution et puis, il ne pouvait pas non plus me garder captive contre mon gré. D'ailleurs, j'espère que lui ou Peter vont bien, je regarde mon jeune ami « Rufio et Peter se portent bien ? » lui demande je, espérant que oui ... je ne les vois plus, je suis dans mes affaires d'adultes donc, c'est assez normal mine de rien.
Je finis par sourire, Bryn' et les autres se portent bien, il parle de pirates tués, emprisonnés ou traumatisés, lançant une boutade, je ne m'imaginais pas avoir raison sur un point : un pirate mort ça sent mauvais. Fichtre ... je ne me souviens plus de ce détail, à moins que déjà jeune je pensais à les enterrer ou les mettre loin de nous, que se soit dans la mer ou autre. Je ne veux pas dire que je pensais comme adulte, mais presque, c'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai grandit. Enfin bref. C'est assez "drôle" de voir que des enfants ne pensent pas forcément à tout, les pensées sont innocentes, tout en étant cruel, c'est ça un enfant au final.
Bryn' me raconta leurs dernières folies, je souris quant au nom de l'animal et ajouté une théorie de nom, il me rendit mon sourire, "si j'avais été là" ... je souris à cette pensée et continue d'avancer dans le calme paisible de la forêt. Bryn a beaucoup d'aventures, tant mieux pour eux, leur vie est comme un jeu à leurs yeux. Il veut savoir ce que je fais, j'hausse les épaules et raconte, lui disant que je veille de loin sur eux, que je fais quelques petites escapades en cheval. Il me demande alors qui veille sur moi, je pense à Ozvan sur le coup, mais ... notre relation n'est pas suffisamment ancrée pour que j'estime qu'il veille sur moi, en réalité, je pense que j'ai toujours veillé sur les autres « Et bien ... personne à vrai dire. A part moi-même, mais ... ça ne me pose pas de soucis » lui dis je en souriant et en haussant les épaules.
Bryn me posa une question, je m'arrête et le regarde « Non ... tu sais vieillir ... c'est quand même une belle aventure. Même si je semble ne rien faire de mes journées, à part coudre ou me promener .... », je regarde ailleurs et fini par poser mon regard joyeux sur le jeune garçon « Avant je trouvais ça ... bizarre ... la grande personne, les décisions, tous ces machins qu'on comprend pas, mais aujourd'hui, je grandis, aussi bien dans mon coeur, dans mon corps ou dans ma tête, c'est étrange mais, non ... ça ne me fait pas peur » je souris et hausse les épaules « J'aurais peut être un jour un mari des enfants ... je vais vieillir mes enfants grandirons et puis ... je meurs. Tout simplement ... pour peut être revenir et vivre une nouvelle vie » lui dis je en souriant « Je pense être encore une enfant sur ma nouvelle vie, j'ai un regard neuf sur toutes ces choses, mais quand tu grandis après avoir vécu de longues années en tant qu'enfant perdus, tu penses pas comme les adultes qui sont là-bas ... parce qu'on a vécu beaucoup plus de choses qu'eux et on sait comment se préparer à cette nouvelle vie » lui dis je ensuite en souriant
elusine avait définitivement tourné la page. C’est la conclusion à laquelle arriva Bryn quand il la vit sourire, accepter parfaitement que sa fée ait un autre enfant à protéger, à aimer. Ce protecteur ailé qui les suivait partout, qui était une extension d’eux-mêmes à force de passer tant de temps ensemble, Melu était parvenue à s’en séparer. Cela impressionnait autant qu’effrayait Brynjár. Personne ne lui volerait Maurice ! Il en serait si dévasté, jamais il ne s’en relèverait. La jeune fille avait peut-être plus de tempérament que lui.
La demoiselle demanda alors comment se portaient Rufio et Peter, Bryn esquissa un petit sourire gêné. Il n’avait aucun souci à la mettre au courant à leur sujet mais il savait tout aussi parfaitement que plus jamais Melusine ne serait amie avec eux. Ou en tous cas pas avec Rufio. Car le leader ne tolérait pas l’abandon et avait sans doute renié Melu dès l’instant où elle avait quitté l’Arbre. Bryn se contenta alors d’un modeste :
- Ils se portent très bien, je pense.
Ils en vinrent alors à parler de leurs proches, de ces gens qui veillaient sur eux, qui les aidaient et les soutenaient au quotidien. Bryn avait tout une mini-armée d’enfants perdus pour le soutenir mais Melusine n’avait pas grand-monde. Elle lui avoua se débrouiller seule, assumer sa condition d’adulte pleinement et ne compter sur personne mis à part elle-même. Brynjár acquiesça en silence. Il avait du mal à concevoir cette nouvelle existence. Lui, il n’en voulait clairement pas.
Melu tenta alors de lui répondre quant aux années qui défilaient, quant à sa peau qui finirait par se flétrir telle une fleur usée par le mauvais temps. Bryjár était horrifié, elle en discutait ouvertement et assumait le fait que viendrait le jour où elle finirait par mourir. Le garçon faillit s’étrangler quand il entendit le mot « mari » et « enfants ». Ces notions étaient tellement étrangères aux enfants perdus, ils étaient incapables de s’imaginer dans ce genre de relation. C’était d’ailleurs le propre des habitants de l’Arbre de ne pouvoir s’y résoudre.
- Beurk ! Tu veux te marier ? C’est tellement ... beurk !
Ses joues devinrent rouges. Bryn fut frappé par ce qu’elle lui disait ... Sans pouvoir retenir sa question, il réagit avec toute l’impulsivité dont l’enfance vous garantit.
- T’as un amoureux ?
Il était absolument choqué, la bouche entrouverte et les yeux écarquillés. Bryn réalisa pour de bon que Melusine n’avait plus rien d’une enfant perdue. D’une enfant tout court. Elle était entrée par la grande porte dans le monde des adultes. Quelle horreur.
- Tu dis ça et pourtant ... tu veux te marier, avoir des enfants et mourir. Tu es plus proche d’eux que de nous maintenant, Melu.
Bryn lui avait dit cela sans animosité, pas du tout comme un reproche ou une fatalité mais plutôt comme l’énonciation d’un fait. Melusine était devenue grande, vieille même. Le peu d’année qui les séparait tous les deux était devenu un fossé. Brynjár baissa les yeux, légèrement troublé et touché par tout ça.
- En tous cas, je suis content que tu sois heureuse ! Je ne voulais pas que tu finisses triste.
Le jeune garçon se tourna vers elle et l’enlaça. Cette étreinte était toute naturelle, pleine de douceur et d’amour fraternel. Brynjár tenait à Melusine comme on tient à une sœur et malgré leurs différences actuelles, son attachement resterait le même.