Drôle de paradoxe, drôle de paradoxe, oui en effet et depuis qu'il l'avait porté ici il n'avait censé d'y penser. Sa tirade sur les agissements de ces parents le laissa de marbre dans un premier temps. D'accord, ils avaient poussé le bouchon un peu loin. C'était naze comme idée. Surtout que lui aussi c'était fais avoir dans le fond. Bien comme il faut même. Il se souvenait encore du jour où ils lui avaient annoncés ça. Dans son cas c'était plus parce que ces parents ne supportaient plus de le voir seul. Il avait eu quelques relations, certes, mais jamais bien longues, et jamais bien sérieuses non plus. Disons qu'il était accro à son métier, que ces bijoux avaient beaucoup de valeur à ses yeux et qu'il aimait y passer du temps pour avoir un résultat plus que parfait. Quand il avait su, il se souvenant être aller le dire à son meilleur ami. Dans l'heure qui avait suivis l'annonce de « la bonne nouvelle ». et il se souvenait encore de sa réaction, comme si c'était hier. Il avait ris, d'abord. Puis son visage s'était figé quand il avait compris que ce n'était pas une blague. Aeden se souvenait que, à ce moment là, il avait vu quelque chose dans ses yeux. Quelque chose qu'il n'avait jamais vu avant. De la colère, certes, mais surtout de la frustration. Comme si on venait de lui enlever l'être le plus cher au monde de ses mains. Et à ce moment là, il avait compris que rien ne serait plus pareille. Et cela ne faisait que commencer....
« Tu sais, cette décision idiote de tes parents, puis des miens, ça m'a aussi affecté. Arrêtes de penser que tu es seule dans cette histoire. »
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« Aller bigorneau à trois cornes, dépêche toi ! » Aeden le regardait se trémousser sur la plage. Amon n'avait peur de rien, et c'était comme ça depuis qu'ils se connaissaient. Il n'avait pas peur de faire des blagues aux tritons plus âgés, puis de se faire courser dans les fonds marins pendant des heures. Il n'avait pas peur de parler aux sirènes du même âge qu'eux et de les inviter à sortir. Il avait peut-être que douze ans, mais Amon était plus fort que tout le monde. Ou du moins, telle était la vision d'Aeden, la tête toujours dans l'eau. « On... On pourrait nous voir, et on a pas d'habits. » « Et alors ? On s'en moque bien, non ? Il n'y a personne sur cette plage ! » Ses joues avaient pris une légères couleurs rosée. Aller. Il devait le faire. Pour lui prouver que lui aussi pouvait mettre les pieds sur terre. « Wouah, regarde ce fruit ! » Aeden avait rejoins son ami. Ses jambes tremblaient. « Attend, mais t'es jamais sortis de l'eau, pour marcher ? » « Non. » « Faut apprendre. J'veux dire, faut habituer tes jambes. Tu sais, venir ici, ça peut être utile. Si un jour tu te fais un tas d'ennemis en bas. » De ces yeux clairs il désigna la mer. Aeden haussa les épaules, peu convaincu. « Aller, on fait une course ! » « Amon... » Soudain il eut un cri aigu. Une femme se tenait là, devant eux, les yeux grands ouverts. « Oh je... Pardon les enfants mais... » Elle avait détourné le regard. « Où sont donc vos bas ? » « On en a pas m'dame ! » Ces yeux s'était alors écarquillé. Et elle eut vite fait de faire le rapprochement. « Des... des... » « Des tritons ! » Amon éclaté de rire en le hurlant. Et la femme avait hurlé. Sans doute avait-elle en tête les histoire terribles que l'on racontait sur leur espèce. Et il était vrai que... la plus part d'entre elles étaient vraies.
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« Et arrête aussi de penser tout savoir sur la terre. J'y ai déjà mis les pieds. Je n'aime pas ça, c'est tout. Parce que c'est dangereux, que ce n'est pas notre environnement normal. Tu n’appartient pas à ce monde. Il ne fera que te dévorer. Et je crois même qu'il a déjà commencé. »
Il désigna sa blessure, arquant les sourcils. Si elle pensait gagner à ce petit jeu... Et puis, depuis quand elle se souvenait du signe voleur de vêtement celle-là ?
elle sombrait dans des eaux trop sombres pour elle.
L'entendant parler que lui aussi avait été affecté par cet événement, elle roula des yeux. Bien-sûr qu'il avait été affecté. Elle était même persuadée que si il avait été poignardé c'était en partie pour cette raison. Pourquoi Amon aurait-il fait ça ? Quel intérêt ? Et le voilà, maintenant, en train de lui rappeler que la terre ferme la bouffait petit à petit. Balivernes ! Elle n'y croyait aucunement. Elle était toujours mieux là-haut qu'ici. Ça, c'était un fait avéré.
« Dans ce cas, tu devrais être heureux que je vive là-haut. Comme ça, notre mariage tombe à l'eau. Tu fais ta vie, je continue la mienne. Et tout ira pour le mieux du monde. Et crois-moi, je préfère me faire bouffer physiquement que mentalement en vivant dans des eaux avec quelqu'un que je n'ai pas choisi. » Elle arqua les sourcils d'un air de dire 'autre chose à rajouter, peut-être?' avant de reprendre la parole. « Je vais voir mes parents, une nuit, comme tu m'as demandé de le faire et je retournerai aussitôt sur l'île demain. Mon escapade commence déjà à s'éterniser. »
S'éterniser. Quel beau paradoxe pour une sirène qui ne verrait pas la fin de sa vie à moins qu'elle meurt volontairement ou ne trouve la Mort au bout d'une lame. Quoi qu'il en soit, elle se redressa, malgré ses blessures et salua Aeden de la tête, le remerciant par pure politesse -et sans brin de joie dans sa voix- pour les soins qu'il avait effectué, et s'en alla, tout bonnement.
Elle dût mettre une bonne dizaine de minutes à nager ce qu'il lui aurait pris trois minutes en temps normal. Jusqu'à ce que son "ancien chez-elle" ne se dessine. Elle pénétra à l'intérieur. Rien à voir avec les belles "demeures" de l'île. A peine eut-elle franchi la porte que sa mère écarquilla les yeux en la voyant et appela son père. Ils tentèrent de la serrer dans ses bras, mais Naïla fronça les sourcils et se recula. Elle prétexta le mal qu'elle avait avec ses plaies, bien qu'il devait sans doute y avoir une part de mauvaise foi. La soirée se passa dans la discussion sur les nouveautés de leur vie, sur le fait qu'elle leur avait terriblement manqué, qu'ils ne comprenaient pas son départ. Mais leurs sourires s'envolèrent à chaque fois qu'elle leur répondit que son séjour ne durerait qu'une nuit. Qu'elle avait une nouvelle vie là-haut qui lui convenait. Elle faisait déjà un énorme effort de sociabilité en sortant d'un hochement de tête, des "oui" et des "non" à ses parents. Il ne fallait pas trop la pousser non plus.
Bien, elle entendait enfin raison. Enfin, presque. Disons qu'elle acceptait de parler à ses parents et c'était déjà ça de gagner. Au fond, il le faisait plus pur eu que pour lui. Qu'elle aille les voir, il n'en avait rien à faire mais eux... Eux c'était différent. Ils lui tapaient sur les nerfs dès qu'il l'apercevait, ils l'avaient déjà interrompu déjà plusieurs fois dans son travail et c'était toujours à cause d'elle. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Ce prénom il n'en pouvait plus de l'entendre. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. On ne l'asoociait qu'à elle, ou du moins, ses proches, les parents de cette dernière le faisait en permanence. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Naïla. Une horreur.
« Alors parfait, fait donc comme ça très chère. »
Et avec un peu de chance, tous le monde lui lâcherait la grappe avec leur questions à la noix. Et elle est où ta fiancée ? Et d'ailleurs, vous êtes toujours fiancé ? Pourquoi ton meilleur ami t'a filé un coup de couteau ? Ils étaient amants ? Ça fait quoi d’avoir été trompé avant même le jour de son mariage ? La ferme. Voilà ce qu'il répondait à chacune de ses questions quand ce n'était pas plus injurieux. Qu'ils aillent tous crever sur la terre. Qu'ils aillent se frotter à d'autre que lui pour changer.
Elle pouvait parler, la terre, il y avait déjà mis les pieds. Parce que son meilleur ami d'enfance le voulait, et qu'il l'avait fais parce qu'il l'adorait. Ils avaient fini par être coursé par une indienne complètement déchaînée. Qui les menaçait de mort. Et il s'était fais mal. Ses jambes fébriles n'avaient pas résisté à autant de course. Ses chevilles avaient dis stop et ce jour là, Amon lui avait sauvé la vie en le balançant dans l'eau. La terre, c'était nulle. Dangereux. Personne ne voulait d'eux. Les hommes, ils les mangeaient quand l'envie leur en prenait, rien de plus. Et ce jour là, il l'avait sauvé. Amon l'avait sauvé et dix ans plus tard, il tenterait de le tuer.
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« C'est qui elle ? » Il avait accentué le elle, croisé les bras sur ton torse et froncé les sourcils. La petite sirène aux cheveux d'or le regarda vaguement intrigué, puis paniqué et agita sa nageoire nacrée avant de partir rapidement. Amon leva les yeux vers lui, agacé. « T'as tout gâché Aeden ! J'allais lui demander de m'embrasser ! » « N'importe quoi. » Il était jaloux. Comme pas possible. Ils avaient treize ans et Amon courait déjà après toutes les sirènes de leur âge pour se faire embrasser. C'était débile. Complètement débile. Était-il le seul à ne pas avoir la tête dans les nuages à cet âge là ? « T'es jaloux ? Tu sais, si je me trouve quelqu'un, on ne cessera pas d'être ami, tu sais. » Foutaise, il allait le délaisser oui. Ce soir là il bouda comme sil savait si bien le faire. À ce moment là, le petit Aeden n'avait aucune idée de la proportion que prendrait son geste. De ce qu'avait interprété son ami. Il n'avait aucune idée que ce jour là, il avait participé à faire grandir tous l'amour et la possessivité qu'avait son ami pour lui.
elle sombrait dans des eaux trop sombres pour elle.
Ce fut sa première nuit chez elle depuis un moment déjà. Ce qui lui servait de chambre à coucher n'avait pas bouger d'un poil. Comme-ci elle n'était jamais partie. Revenir ici éveillait bien trop de souvenirs en elle. Bon comme mauvais. Fixant le sommet des eaux, elle ne put s'empêcher de penser au jour où sa nouvelle vie avait commencé.
Ce jour-là, elle avait fui vers le seul endroit inconnu: l'île. Quand elle avait été enlevée avec Emma par de sanguinaires pirates, elle n'avait pas compris pourquoi elle s'était retrouvée nue sur le bateau, elle n'avait pas compris ce qui était apparue à la place de sa queue, jusqu'à ce qu'elle pioche des renseignements ici et là dans les Océans. Quand elle échoua sur l'île, sa queue se replaça par une paire de jambes. Elle fut surprise, même si elle s'y était attendue. Elle resta là, totalement nue, à fixer cette nouveauté qui la fascinait, à la caresser du bout des doigts, puis un sourire traversa son visage. Elle se sentait libre, ici. Elle se releva, mais sa soif de liberté s'évapora bien vite quand elle tomba au sol quelques mètres plus loin. Naïla n'avait jamais appris à marcher avec ses nouvelles jambes qu'elle en avait perdu l'équilibre. Voyant une femme arrivant avec ses enfants, son premier réflexe en la voyant nue fut de leur cacher les yeux. Elle apprit bien vite qu'il s'agissait d'une indienne et cette indienne lui tendit la main malgré sa nature, totalement à l'opposée des pirates. Naïla s'était adaptée à sa nouvelle vie grâce à elle et aujourd'hui encore, elle lui rendait quelques fois visites. C'était grâce à elle qu'elle connaissait Mingan.
Elle avait gagné le sommeil, perdue dans ses pensées. Et quand elle se réveilla, l'Océan s'était éclaircie. Naïla avait gagné le repas du matin où ses parents avaient sorti les festivités. A croire qu'ils voulaient "l'épater" en espérant qu'elle reste ici. Dommage pour eux, ce ne serait pas le cas. Le repas se passa à merveilles, lui donnant presque envie de revenir les voir. Elle avait même rigoler avec ses parents, chose qu'ils n'avaient pas fait depuis longtemps et elle avait même accepté d'enlacer sa mère et son père. Quel exploit !
La matinée lui redonna goût à cette vie. Peut-être envisagerait-elle d'aller les voir quelques fois. Encore faudrait-il qu'elle se remette un peu mieux de ses blessures. Du moins, cela ne resta pas nécessaire bien longtemps car une mauvaise nouvelle tomba dans les environs de midi, bien qu'elle n'avait pas de notion du temps, ici. Sa mère l'informa que Aeden et ses parents venaient manger ici. Ce furent les derniers qui furent acte de présence avant leur fils. La conversation s'enchaîna, alors que Naïla se sentait assez mal à l'aise d'être ici. Puis la conversation vint sur elle. Le père d'Aeden.
« Au faites, Naïla, comment vois-tu ton mariage ? - Mon mariage ? - On ne lui a pas encore dit. - Je vois. Dans ce cas, je vais m'arrêter là. - Quoi ? Me dire quoi ? ... Bon sang, répondez-moi. - Les parents d'Aeden ont appris que tu étais encore en vie et que tu n'étais pas à l'origine de la tentative de meurtre de leur fils. Mais nous pensons tous les quatre que ta fuite aurait pu coûter sa vie. - Nous sommes tous d'accord pour dire que ce mariage serait un engagement en guise de dommages pour ce que tu as fais. - Vous vous fichez de moi ? Je ne me marierai pas. Et vous ne me reverrez pas si vous tentez de le faire, est-ce bien clair ? Je n'épouserai pas Aeden ! - J'ai bien peur que tu n'aies pas le choix, Naïla. Plusieurs d'entre nous t'ont aperçu sur l'île. Nous savons où tu vis, maintenant. - Ce fut une bien bonne blague, mais elle a assez duré. Je n'épouserai pas Aeden et même si vous me forciez à le faire, je ne m'offrirai jamais à lui. Et je pense que votre intérêt derrière ce mariage serait un descendant. Que feriez-vous sans descendant ? »
Elle arqua un sourcil avant de quitter leur habitation en disant que ce repas avait assez duré. Il ne lui fallut que quelques secondes après avoir quitté les lieux pour croiser Aeden. Il dut voir son visage grave car il lui demanda ce qu'il se passait. Un doux rire ironique quitta ses lèvres, il était froid, et n'avait rien d'un amusement. « Félicitations, Aeden Blackwood, vous allez bientôt m'épouser après un accord parental et stratégique. »