« Ici la nature parait si paisible, mais le destin est tellement imprévisible ... »
Une fois encore j'ai faussé compagnie à mon ami et garde du corps. Décidément, j'ai vraiment l'impression qu'il ne cherche même plus à me retenir, il me laisse partir. Surement parce qu'il sait qu'il ne se fera pas réprimander, en général c'est moi qui reçois les foudres de ma mère lorsqu'elle apprend que j'ai encore fuis de la ville. Cet après midi, j'ai décidé d'aller flâner sur la plage de sable blanc de l'est de l'île. C'est un endroit paisible et peu fréquenté, tout ce qu'il me faut pour m'exercer à marcher sur ces satanées jambes. Après avoir fait quelques sauts au dessus des vagues, je me laisse emporter jusqu'à la rive où j'échoue lamentablement sur la plage, vidée de toute énergie. C'est fou comme c'est grisant de sauter ainsi tel un dauphin, mais alors qu'est-ce que ça fatigue !
Après un petit moment à flâner sur le sable, à laisser les vagues passer sur mon corps pour enlever les petits grains qu'elles venaient juste de déposer, je décide enfin de me bouger un peu la nageoire. Après tout, je veux me perfectionner pour une bonne raison, pour Seyranëa, cette jolie brune qui semble avoir prit mon cœur en otage. Quelques secondes de réflexion, et après tout, pourquoi je m'embête à vouloir mieux marcher pour elle, elle ne sait même pas nager ! Bref, on verra bien, de toute manière maintenant que je suis là ... J'attrape les guenilles que j'ai récupéré au fond de l'eau un jour d'expédition et m'en habille tant bien que mal, c'est que ce n'est pas très pratique de tenir sur un seul pied.
Une fois paré, je commence à faire des petits allés retours le long des vagues qui rythment mes pas. à quelques reprises la vues de coquillages m'interpelle, l'envie de me pencher pour en chercher un jolie pour mère me titille quelque peu. Peut-être que si je lui ramène un bel œil de sainte Lucie, elle oubliera que j'ai encore fugué... Il n'en fallut pas peu à ma motivation pour être ébranlée à l'approche du prochain tas de coquillages amassés et entremêlés de quelques algues mortes. Accroupi, je suis tellement plongé dans ma quête du coquillage parfait que je ne remarque même pas les pas furtif d'une jeune indienne qui s'approche, et je ne sens même pas son regard se poser sur moi, décidément, les jolis coquillages ont une drôle d'influence sur moi.
« Ici la nature parait si paisible, mais le destin est tellement imprévisible ... »
Le jour s'était levée et comme à son habitude Vent-gris me surveille de loin. Je l'aperçois couché à côté de l'arbre qui borde notre habitation. Lorsqu'il me voit, il se lève doucement et s'approche. Je porte ma main à son museau et il la lèche. Sa langue chaude et humide me fait sourire. Il se retourne et prend le chemin de la rivière. Je décide de le suivre. En route je ramasse des fleurs, des champignons et des racines. Vent-gris s'arrête toujours lorsqu'il sent que je ne le suis plus. Il m'observe, surveille qu'il n'y ait personne autour et lorsqu'il entend un bruit, il se rapproche de moi et reste aux aguets. Je repars, il se remet devant et je le suis de nouveau. Vent-gris est un loup que j'ai recueilli quand il était petit. Il s'était cassé une patte et aurait pu mourir si je ne m'étais pas occupée de lui. Avec le temps il avait fini par retrouver une meute, mais il préférait resté avec moi. Nous nous étions apprivoisés et il avait fini par accepter Citrouille, un raton-laveur que j'avais sauvé aussi.
Vent-gris était retourné auprès de sa meute après s'être assurée que j'étais en sécurité. Je m'étais assise sur les rochers qui bordaient la mer. J'aime sentir l'odeur iodée l'air, j'adore lécher mes lèvres à la saveur salée. C'est une des choses que j'adore sur cette île, ces paysages tous différents, les saveurs, les odeurs, les couleurs… L'île est grande et offre une multitude de choses. J'essaie de ne pas trop m'aventurer vers les repaire des pirates, mais parfois je ne peux m'empêcher de me rendre dans les villes des blancs, je ne peux m'empêcher de flâner au-dessus des étalages. La mode des blancs me laissait perplexe, mais lorsque je trouvais un de leurs objets pour se protéger du soleil dans la forêt, je le récupérais et j'adoptais la posture de leurs femmes. Je les imitais et je m'amusais à l'abri des regards.
Je regarde la mer, parfois on aperçoit des baleines remonter au large et expulser l'eau, je trouve le spectacle fascinant, du coup il m'arrive souvent de me rendre en bord de mer. Un peu plus loin sur le sable, j'aperçois quelque chose qui se hisse sur la plage et j'assiste à un spectacle que je n'avais jamais vu auparavant. Une sirène se transforme en homme. J'avais déjà vu des sirènes, je n'apprécie pas la compagnie de la plupart d'entres elles, mais je ne les avais jamais vus se transformer. Je m'approchais de façon assez furtive. Je ne voulais pas qu'il m'entende. Il ramassait des coquillages. C'était un homme blond et assez grand, fin, bien sculpté. Je restais en retrait et l'observait se dépatouiller avec un amas de coquillage pris dans les algues.
C'est là que Citrouille fait son entrée et qu'il me dévoile à l'homme-sirène. Citrouille aime les coquillages et il déteste qu'on vienne sur son territoire pour lui voler sa précieuse marchandise. Il se jette sur l'homme en râlant et je me précipite sur Citrouille.
« Ici la nature parait si paisible, mais le destin est tellement imprévisible ... »
Le doux murmure de vagues berce ma petite ruée vers le coquillage parfait. De temps en temps des baleines percent le calme plat des mers lointaines. Je me perds alors à contempler ce magnifique spectacle qui s'offre à moi. Je connais cette envie de percer l'eau d'une nageoire, de nager nager nager le plus vite possible pour sauter le plus haut au dessus de l'eau. Le souvenir de cette expérience fait partir un frisson du bas de mon dos jusqu'au haut de ma nuque.
Tandis que je me débattais avec des algues pour pouvoir apercevoir les jolis coquillages camouflés par cette masse verte, je suis tellement absorbé par ma tache que je ne remarque même pas que l'on m'observe. Et je ne me rend également pas compte que qu'une boule de poils est en train de me foncer dessus. Je ne connais pas beaucoup les créatures terrestre, je sais juste que comme chez moi, sous l'eau, il y a de nombreuses espèces d'animaux et de plantes. Me voilà pour l'instant confronté à ce qui semble être la colère d'un truc tout poilus, gris et blanc, et qui semble assez caractériel. La surprise me fait sursauter, et le contact de cet animal, qui s'est précipité sur moi, me fait perdre mon équilibre si précaire et je me retrouve alors étalé sur le sol.
Une jeune fille sort alors de ce qui semblait être sa cachette et se précipite vers moi. Si je n'avais pas été complètement sous le choc et déboussolé, j'aurais très certainement prit peur et je me serais hâté (tant bien que mal) de rejoindre la mer. A première vue elle en voulait plus à l'animal de s'être ainsi jeté sur moi. Je suis un peu rassuré, elle ne semble ps me vouloir de mal. Mais tandis qu'elle se penche sur nous, je ne peux empêcher mon cœur de rater un battement. Si mon père me voyait, il me tuerait à coup sur... Le contact du sable chaud sur ma peau me détend quelque peu, en bon petit lézard qui se respecte (oui j'aime cuire au soleil sur la plage ou les rochers), je ne peux résister à cette lente torpeur qui s'empare de mes muscles. C'est la première fois que j'expérimente cette sensation sur mes jambes d'humain, c'est assez... déstabilisant et intéressant, totalement différent de ce que l'on peut ressentir avec une queue recouverte d’écailles.
La jeune fille se saisie alors de l'animal lorsqu'elle est près de nous. Je suis désolé pour lui, il est bien mignon mais je dois avouer que d'avoir son poids en moins sur mon torse me soulagea quelque peu. Elle semblait terriblement confuse que cette boule de poils, qui semblait lui appartenir ou être son amie, se soit précipité sur moi de la sorte. En même temps maintenant que j'y pense, je ne sais pas vraiment ce qui lui a prit... Partagé entre tous ces sentiments étranges qui s'emparent de moi, je ne sais trop quoi faire à part rester silencieux.