Feisty n’avait jamais été un modèle d’obéissance. Chaque interdiction lui donnait une douce envie d'enfreindre les règles, elle voyait chaque ordre donné comme une limite qu'on lui imposait, une limite qui ne demandait qu'à être franchi. Assise dans sa cabane, la jeune fille s'ennuyait ferme, coincé aux camps. La faute à la météo générée de l'île. Ces derniers temps, Neverland s'était vu frapper par de nombreuses tempêtes, d'une violence jamais vue, sans que personne ne parvienne à expliquer ce curieux phénomène. Feisty, se fichait bien des causes qui avaient provoqué une telle déchéance sur l'île, tout ce qu'elle voyait, c'était le résultat. Les animaux étaient devenus fous, voire féroces. Hier, un sanglier lui avait même laissé un souvenir pas très joli à voir sur la hanche droite. Face à tous ces événements, pour le moins inhabituel, il avait été décidé pour la sécurité de tous, que personne ne devait quitter le camp seul. Sécurité. Le mot était aussi ennuyeux que le concept. Feisty se laissa tomber à la renverse dans son hamac. Comme si quelques gouttes de pluies un peu fortes et une biche enragée allaient leur faire du mal ! Non, les événements étranges qui s'abattaient sur l'île ne l'effrayaient pas. Si ses compagnons voulaient se terrer dans leurs cabanes en attendant que la tempête passe, grand bien leur fasse. Elle, n'allait pas se laisser pourrir ici.
Poignard, sarbacane et lance-pierre attaché à sa taille, Feisty se glissa hors de sa cabane. L’arbre du Pendu était une superbe aire de jeu. Pourtant, elle s’y sentait à l’étroit. Elle étouffait. Surement parce qu’on lui avait interdit de sortir depuis l’accident du sanglier de la veille. La fillette désobéissait délibérément en se faufilant hors du camp pour rejoindre la forêt des quatre saisons. Les remontrances de Rufio, elle ne les craignait pas plus que ces gros nuages menaçants qui flottaient au-dessus de sa tête. Après tout, ce n’était pas sa faute si son corps tout entier hurlait, en manque d’action et d’adrénaline. Feisty était un électron libre. Ce n’était pas comme si elle avait l’intention de s’aventurer loin de toute façon. Elle voulait simplement prendre un peu l’air, chasser une bestiole ou deux et ramasser quelques fleurs sur le passage. Les bestioles, c’était pour justifier sa sortie clandestine. Les fleurs, c’était pour Le Fluet. Feisty avait récemment découvert que le gamin était allergique à une certaine espèce. Elle comptait en cacher sous son hamac pour provoquer chez lui une chaine d’éternuement. Une petite blague innocente qui, pour Feisty, avait également des aires de vengeance. Cet idiot l’avait barbouillé de boue dans son sommeil. On ne provoquait pas La Bagarreuse impunément.
Feisty ricanait en imaginant le visage rougit du Fluet lorsqu'un bruit la coupa net dans son élan. Les sens en alertes, elle se retourna. Les alentours étaient déserts. Il n'y avait pas âme qui vive. Pourtant, elle était persuadée d'avoir entendu une branche craquée. Forcé de constater qu'elle était bel et bien seule, l'enfant perdu se remit en route, en courant cette fois. Direction, le territoire des bêtes sauvages. Il y avait toujours des prises intéressantes là-bas.
Elle courait depuis plusieurs minutes déjà lorsqu'un nouveau bruit l'alerta. Encore un. Ce n'était pas possible. Quelqu'un la suivait. Sans crier gare, elle s'arrêta et se retourna. Croyant voir un mouvement dans la végétation, elle s'approcha sur la pointe des pieds, poignard à la main. Si c'était un pirate, elle allait lui faire regretter son espionnage. Mais à sa grande surprise, ce n'est pas un pirate qu'elle découvrit en écartant les buissons. « Jarod ? » Elle rangea son arme. « Mais qu'est-ce que tu fais là ? Tu sais pas qu'on n'a pas le droit de sortir du camp seul. » Elle-même ignorait la mesure de sécurité, mais peu lui importait. Jarod lui faisait souvent la leçon, et la petite se faisait une main plaisir de faire de même avec son aînée, bien qu'elle soit loin d'être bien placé pour lui faire ce genre de remarque. Puis, les pièces du puzzle s'assemblèrent doucement dans son esprit. « C'est toi qui me suis depuis tout à l'heure ! » S'écria-t-elle. Feisty le foudroya du regard. Ce n'était pas la présence de Jarod qui l'agaçait, mais bien qu'il l'ait suivi depuis l'Arbre sans qu'elle s'en soit rendu compte. Elle qui s'était crue discrète… Peut-être ne l'était elle pas autant qu'elle le prétendait. « Si tu es venue me chercher, je te le dis de suite, je rentre pas, enfin, pas avant d'avoir fait ce que j'avais à faire. D'façon il pleut même pas. » Feisty aurait peut-être mieux fait de se taire. À peine eu t'elle prononcé ses paroles, qu'un éclaire déchira le ciel, bientôt accompagné d'un coup d'un énorme coup de tonnerre. La tempête allait leur tomber dessus.