Le jour s'était levé. Ce matin-là, le soleil était apparu. Rien d'anormal pour un matin dira-t'on, et justement, là était le point sensible: le retour à la normale. Feitsy reviendrait-elle de son escapade? Peter s'était posé la question, l'espace d'un instant. Puis il avait décidé qu'il verrait plus tard, le temps n'était pas à ces futilités, il arrivait enfin à point nommé.
Il était parti tôt ce matin, beaucoup de ses amis dormaient encore, quand il avait pris la décision de partir. Son petit poignard et sa nouvelle fronde accrochés à la ceinture, il avait marché longtemps, déjeunant quelques fruits en route, s'abreuvant dans de petits ruisseaux de la montagne. Il s'était fait discret près de la crique du crocodile, et enfin après des heures de crapahutage il arrivait à destination: One-Eyes Willy. La ville des pirates... La trouverait-t'il? Il l'espérait, il était d'humeur massacrante en ce moment, il avait besoin de passer ses nerfs, il avait besoin de baston, de casser le nez les dents ou les genous d'un mec. Il n'y avait pas de raison particulière, on aurait pu penser à la frustration de voir une des siens partir pour peut-être ne plus jamais revenir, mais non: il avait juste besoin de se défouler. Voilà trop de temps (au moins 5 jours!) qu'il tournait en rond à l'arbre, s'en était trop.
Les rues étaient bondées,la ville commençait à s'activer. Sans trop faire de vagues pour le moment, Peter déambula, regardant autour de lui de ne pas la croiser, mais c'était peine perdue. Des commerçants, des gueules cassées, gueules de bois, gueule de loup, des gueulards, des gueulés, des gueuletons, des dégueulés et des gloutons, les rues d'One Eyed Willy étaient bien différentes du calme de l'arbre. A la fois excitant et blasant: la vie d'adulte était triste, avec toute cette violence tous ces alcools... Quoi que ça Peter ne dirait pas non pour goûter une fois, ce serait une bonne expérience!
Enfin il arriva sur une petite place, où il pensait la trouver. Non pas qu'il connaissait ses habitudes mais puisque c'était ici qu'ils s'étaient vu la dernière fois, pourquoi pas une autre fois? Après tout, peut-être était-ce son lieu de prédilection du moment? Ou bien peut-être que pas du tout. Mais ils avaient bien dit qu'ils se reverraient, la dernière fois, alors il était logique que ce soit à cet endroit là. L'endroit était bondé de gens en plein commerce, l'ambiance restait tout de même tendue: apparemment, l'équipage d'un navire tâchait de vendre cher son butin, ce qui ne plaisait pas au reste de la foule... Une baston. Ce serait tellement parfait! Peter monta les marches d'une maison et grimpa au petit muret à côté: il pouvait tout voir et tout entendre, il n'était pas trop haut ma foi en cas de besoin et pourrait sauter sans mal, l'endroit était parfait! Il pourrait même se servir de sa fronde s'il le voulait...
[Rp situé avant que Naïla soit pourchassée par plusieurs pirates et séjourne quelques semaines chez Magnus]
Naïla vivait chaque jour la même routine: se lever, chasser, vendre ses trouvailles, tuer un ou deux pirates en fonction de sa chance, acheter à manger avec la petite somme gagnée, dormir et revivre cette journée encore et encore. Si ça la dérangeait ? Bien sur que non? A vrai dire, elle n'avait jamais rien connu d'autres que ces passes-temps. Elle ne se voyait pas faire autre chose. Elle vivait pour son désir de vengeance. Pour rien d'autres.
Naïla n'avait pas d'amis. Elle n'avait que Mingan. Et lui aussi finirait par partir. Comme tous. C'était une sirène, ce qui signifiait qu'elle vivrait pour l'éternité. Elle était destinée à voir ceux qu'elle aime partir alors à quoi bon s'attacher? A quoi bon connaître de bon sentiment tel que l'amour et l'amitié ? Elle n'en savait rien. Pour le moment, le seul sentiment qui l'animait était le désir de vengeance et rien d'autre.
Ce jour-là, le village était particulièrement animé. Naïla avait entendu parlé d'une partie de jeux entre les pirates. L'occasion idéale pour passer à l'attaque. En temps normal, la jeune femme usait de son charme pour les tirer dans ses filets, mais aujourd'hui, elle n'en avait pas la tête. Elle avait seulement envie d'en tuer un maximum et de ne pas s'amuser comme un chat avec une souris. Alors, elle avait utilisé la simplicité: son chant de sirène.
Les baston commençaient près du port en raison des mauvais joueurs qui ne voulaient pas voir leur bien partir. L'un d'entre eux en vola quelques uns et s'éclipsa sans que personne ne le remarque. Ce fut sa première victime. Naïla se plaça dans la rue où il se dirigeait et lui barra le passage.
« Tes parents ne t'ont jamais appris que voler était mal ? » lui demanda-t-elle.
L'homme l'envoya balader la poussant de son passage, ce qui déclencha un ricanement à la jolie brune qui se contenta de chantonner pour qu'il cesse tout mouvement et se retourne vers elle. Elle n'usait jamais de sa voix en temps habituel. Mais là, elle devait avouer qu'elle avait seulement envie de faire un massacre. Elle était d'une mauvaise humeur et elle n'était pas sûre de pouvoir se calmer de sitôt. Sortant un poignard de sa botte, elle lui planta dans le crâne avant de pousser son corps inerte dans la mer.
Ce fut à cet instant précis qu'un pirate la plaqua contre un mur, sa voix contre sa bouche pour l'empêcher de chanter, commençant à l'étrangler. Voilà un peu d'action. La jeune femme lui mit un coup de pied dans ses parties génitales et se mit à califourchon sur lui. L'homme lui planta son poing dans sa mâchoire, la faisant grimacer, avant qu'elle ne plante sa lame dans son épaule, faisant lâcher un gémissement de douleur à l'homme qui finit par pointer un revolver sur sa tempe. Ce fut désormais un jeu de regard entre eux. Le premier qui tuerait l'autre sans être tué. Et cela eut à la fois le don d'effrayer la jeune femme et de l'exciter. Elle aimait le danger, et n'avait pas peur de la mort. Voilà ce qui rendait la jeune sirène indomptable et dangereuse, aussi bien pour les autres que pour elle-même.
Spoiler:
Je suis désolé du temps de réponse. D'habitude je suis organisée, mais là je t'avoue que j'avais totalement perdu le lien de notre rp. Tapppppes moi
Et comment ça volait de partout, des poings, des mains, des pieds, des poignards, des têtes parfois, des bourses... Oh une bourse! Clochette l’attrapa vite au vol et revint sur Peter. Personne ne les remarquerait dans le bazar général. Pouffant aux répliques des uns et des autres, bien sur son petit perchoir, Peter eut la chance de voir celle qu'il cherchait du coin de l'oeil suivre un autre homme. Oh oh, alors comme ça elle allait s'amuser toute seule? Hors de question, Peter avait envie de botter des fesses, et Naïla serait la compagne parfaite! Mais comment la rejoindre sans se prendre les pieds dans le noeud de truand plus bas? Les toits, c'était assurément mieux. Cherchant un endroit où monter des yeux, il eut tôt fait de le trouver et se hissa dessus avant de partir en gambadant à la recherche de la sirène. Il tâcha de se pencher discrètement sur une ruelle, elle n'était pas là. Une autre encore n'était pas la bonne, et il allait en direction d'une troisième, quand il l'entendit chanter. Ses muscles se figèrent alors et lui et Clochette ne purent plus faire le moindre mouvement, dans une position inconfortable: celle de l'homme qui allait se pencher pour voir en bas. Alors la force de la gravité fit le reste, et lentement, le plus lentement au monde, Peter tomba du toit duquel il était, ne pouvait retrouver l'équilibre, ni même hurler son désespoir.
Le chant s'arrêta au moment où le petit corps de Peter heurta l'obstacle en-dessous de lui: un chariot plein de foin. Du foin pour amortir sa chute! Ce foin vola d'ailleurs dans tous les sens quand le garçon tomba dedans, mais au moins il n'y avait pas de bruit. Espérant que personne ne l'ai remarqué, il releva la tête prudemment... Bingo! Naïla était en train de se battre avec un mec franchement louche, comme un pirate en somme, et ni l'un ni l'autre ne l'avait remarqué. Mais la situation sembla se corser quand la sirène reçut un coup de poing en plein visage... outch! Grimaçant rien qu'à penser à la douleur, Peter sortit sa fronde tout doucement, comptant sur le fait qu'ils ne le voyaient toujours pas. Il s'apprêta à tirer au moment où les deux combattants s'arrêtèrent, et que l'un tenait un pistolet. Quel arme déloyal... Trop facile!
Un coup précis sur la tempe. L'homme s'effondra. C'était parfait! Sautant en dehors de sa charrette, il fit une petite courbette face à la jeune femme lorsque ses pieds touchèrent le sol.
Bien le bonjour mademoiselle.
Il releva la tête, un sourire malicieux et des yeux pétillant.
Alors, on veut botter des fesses aujourd'hui? Partante pour avoir un super partenaire?
Il lui sortit son plus beau sourire, tel un enfant qui veut aller au cirque. C'était un peu le cas après tout...
Naïla se disait que si elle était rapide, elle pourrait trancher la gorge de ce pirate et s'en sortir sans la moindre égratignure. Cela valait-il le coup d'essayer ? Après tout la jeune femme avait un grand sens du danger. Le goût du risque faisait parti d'elle. Elle adorait sentir l'adrénaline monter dans son corps. Ses muscles étaient en feu, son coeur tambourinait contre sa poitrine. Elle avait l'impression de renaître, de tout pouvoir faire et accomplir. Comme invinsible. C'était dangereux vu de l'extérieur, mais il s'agissait du seul sentiment positif qui animait sa vie. Elle, elle n'avait ni famille, ni amis, ni amour. Elle était seule. Et il fallait bien occuper ses longues journées à sa manière.
La jeune femme s'apprêta à agir, mais au moment où elle allait trancher la gorge de ce piteux pirate, le voilà qu'il tomba lourdement sur le sol. La jolie sirène le regarda, hésitante, avant de comprendre que quelqu'un l'avait tué. Et la personne avait plutôt bien visé. Elle se tourna vers la source du bruit en gardant son couteau en main avant de voir un homme la saluer. Naïla fronça doucement les sourcils. Un enfant venait de lui sauver la vie. Elle n'avait rencontré que très peu d'enfants perdus, dont Peter Pan. Celui-ci avait du cran, mais c'était encore un gosse ! Et pourtant il avait l'air habitué à tuer. Décidément ce monde était encore plein de surprise.
« Bonjour. » dit-elle assez surprise.
Naïla n'était pas sûre de comment réagir. Elle le jaugea un instant avant de ranger finalement son couteau dans sa bottine après l'avoir essuyé sur le pantalon du pirate. Avant qu'il ne lui fasse sa proposition, la jeune femme en profita pour fouiller le corps et voir si il y avait quelque chose à en tirer. Quelques pièces, un petit récipient pour l'alcool, une arme... Rien de bien intéressant ou surprenant pour un pirate. Un pion en plus dans le cliché de son groupe. La jeune femme garda cependant ses quelques pièces. Elle en avait besoin pour se nourrir. Elle ne pouvait compter que sur elle-même pour se nourrir. Elle n'avait pas réellement de famille ici. Ni même d'amis. Sa vengeance était tout ce qu'elle avait.
Se redressant vers son interlocuteur, elle s'approcha un peu plus de lui avant qu'il ne se mette à lui proposer quelque chose d'assez surprenant. « Alors, on veut botter des fesses aujourd'hui? Partante pour avoir un super partenaire?». Peut-être n'était-ce pas une si mauvaise idée après tout. Il n'avait pas l'air mauvais dans en attaque et elle ne lui devrait rien. Ce n'était pas une si mauvaise idée après tout !
Peter se contenta d'éclater de rire avant de contourner Naïla pour aller faucher l'arme du malheureux défunt. La mort... Au court de sa longue vie, ce n'était pas la première fois qu'il avait à la regarder droit dans les yeux. Ni même à la causer, malheureusement pour un gamin de son âge...
Ca oui, des idées, j'en ai plein, toujours!
Il tritura un peu l'engin qu'il avait des les mains dans tous les sens. Une arme à feu, bien lourde, voire trop pour lui... Il préférait de loin sa fronde, ou encore sa dague. Mais bientôt il faudrait qu'il trouve une autre arme s'il voulait être efficace... Il jeta tout de même l'arme sur le cadavre avant de se retourner vers Naïla.
Alors alors, une idée, il nous faut une idée. Et bien, nous sommes dans une ville de pirate... Quoi de mieux pour trouver des pirates! C'est déjà un bon début, non?
Et réfléchissant, il bougeait. Il bougeait toujours, il était incontrôlable ce garçon, toujours à bouger, à se mouvoir, faire les cent pas, marcher, sautiller, grimper, triturer quelque chose... Jusqu'à ce qu'enfin une idée vienne, et là! Enfin! C'était la paix, et il restait immobile... Au moins deux minutes...
Une taverne! C'est toujours trop cool d'aller mettre le bazar dans une taverne. T'en pense quoi? C'est cool non?
Ce qu'elle en pensait, il s'en fichait: Peter se mit à la recherche d'une taverne. Il grimpa sur la charrette et de là atteignit les toits. Marchant d'un pas à la fois agile et rapide, il scruta les ruelles qu'ils longeaient afin de trouver la taverne parfaite: grande, mais pas trop, pas trop près du port non plus que les renforts n'arrivent pas trop vite... Tout était calculé! Excepté peut-être le fait qu'ils n'étaient que deux? Tout à sa quête de taverne Peter eut soudain une question, et ne se gêna pas pour se retourner vers l'intéressée et la lui poser:
Naïla l'observa faire les cent pas. C'était fou comment il lui faisait penser à elle en ce moment même. Quand elle devait réfléchir, que quelque chose n'allait pas ou lui déplaisait, elle marchait dans tous les sens comme-ci la solution allait apparaître toute seule. Cela la fit donc intérieurement rire en le voyant s'agiter de tous les sens. Mais la jolie sirène ne parlait jamais d'elle et ne comptait pas le faire donc ses pensées resteront inutiles pour le moment, et il n'en saurait sans doute jamais rien.
« Bonne idée. Une taverne. Mais j'espère que tu sais comment t'y prendre et ce qui nous en coûterait si un témoin venait à réussir à s'échapper en ayant connaissance de nos visages, n'est-ce pas ? » dit-elle d'une voix neutre, ne laissant paraître aucun sentiment.
Naïla n'avait pas toujours été comme ça. Il fut un temps où elle était sociable, ouverte à tous. Elle papotait à toute occasion de tout et de rien, n'hésitait pas à parler d'elle. C'était il y a trois ans. Puis l'enlèvement des pirates survint. Leurs moqueries, leurs tortures, et voilà que venait s'y ajouter sa défunte amie, Emma. La jolie blonde n'avait rien demandé, elle avait juste tenté de la sauver, héroïquement. Mais l'océan déchaînait avait fait quitté le navire à la jeune Vairë qui ne sut jamais ce qu'était devenue le corps de son amie. Elle en eut parlée à personne, se renfermant chaque jour sur elle-même, ne parlant à personne, pas même ses parents ou un animal aquatique. Une bulle impénétrable qui l'avait suivi jusqu'à Neverland. A présent sur la terre ferme. Voilà pourquoi elle était ici: pour venger sa meilleure amie.
Elle grimpa à son tour sur le toit, tenant sa robe pour ne pas laisser entrevoir des parties inconvenantes. Ici, la vue était immense sur le village des pirates. Ils arriveraient à destination bien plus vite que prévu. Peter avait l'air d'être un garçon malin du peu qu'elle en savait sur lui. Elle pouvait lui faire confiance sur le lieu qu'ils choisiraient. Il semblait de plus agile. Un excellent partenaire malgré son âge. Mais quel était-il réellement ? Après tout, la moitié des gens ici n'avait pas l'âge qu'ils semblaient paraître. Entre les sirènes et les enfants perdus, il y avait de quoi se questionner sur le temps qui était passé depuis leur naissance. Naïla n'était pas bien compliquée: vingt ans physiquement comme mentalement. Elle approchait de ses vingt-et-un. Peut-être cesserait-elle de grandir après tout ? Elle n'en savait rien. Elle verrait bien ce que l'avenir lui réserve et si sa vie mérite d'être vécue plus longtemps ou non. Ou bien peut-être allait-elle mourir de la main sauvage d'un pirate plus tôt que prévu ?
Ses interrogations ne durèrent guère longtemps puisqu'une question indiscrète la tira de ses pensées. Pourquoi détestait-elle les pirates ? Comme la plupart des gens ici, Peter Pan devait sans doute ne pas vouloir parler de lui, alors la jeune femme se contenta de lancer un "Et toi, pourquoi les détestes-tu ?" en le regardant. Sa question voulait surtout dire un "ne poses pas des questions que tu aimerais pas que l'on te pose" ou bien un "bien tenté, essaies une autre fois". Bien-sûr que la jeune femme n'allait pas en parler. Jamais.
Spoiler:
J'ai pensé à toi, j'ai regardé le dessin animé Peter Pan, ainsi que le film ce week-end. J'espère que ma réponse ira, je tenais à te répondre avant lundi malgré mes révisions !
Peter regarda Naïla avant de faire une énorme grimace.
Parce qu'ils puent et qu'ils sont moches!
Il éclata ensuite de rire et se tourna pour chercher à nouveau dans quelle taverne ils allaient aller faire un tour. La raison que Peter avait donné était la bonne, il n'avait pas de motif plus sérieux que ça. Après tout, c'était un enfant, avait-il besoin d'autre argument?
Mais toi t'as pas répondu à la question!
Il jeta un sourire malicieux à la jeune sirène avant de se tourner une énième fois -une vraie girouette. Soudain il pointa du doigt une lumière qu'ils voyaient plus loin, à trois rues de leur toit.
Viens, c'est par là! Je la connais celle-là, elle est pile comme il faut!
Ce n'était pas toujours que Peter allait semer la pagaille dans des tavernes, fautes d'avoir une taille et une agilité adéquate, mais avec Naïla il sentait que ça allait le faire. Comme elle l'avait si bien dit: Pas de survivants... Pas de problème chef! Ce n'était après tout pas la première fois qu'il tuerait. Une fois, il s'était demandé ce que ça faisait d'être mort... Et puis, il avait décidé d'oublier. Ça ne le concernait après tout pas!
Ils étaient enfin arrivés dans la ruelle désignée plus tôt, et Peter entra dans la taverne sans plus se poser de questions. Le silence se fit et les regards convergèrent vers lui. L'enfant perdu ne se démonta pas et se dirigea vers le bar, où il commanda l'alcool le plus fort. Il avait déjà bu une fois, du rhum il lui semblait... C'était fort ça non? Le barman rit et lui tendit un verre. Peter sortit un certain nombre de pièce d'une bourse volée au préalable et goba sa boisson.
Alors le temps s'arrêta, suspendu. Et elle vint lentement: la douleur... D'abord dans sa bouche, elle descendit lentement dans le gosier avant d'aller lui brûler son estomac, vide. Les larmes lui montèrent aux yeux, il les ferma: il ne montrerait rien. Soufflant un bon coup, il sourit, ouvrant les yeux avec précaution, qu'aucune larme ne coule. Une petite goutte d'eau salée s’effaça rapidement de son visage, et il lança au patron d'une voix plutôt fluette par rapport à celle qu'il avait à l'entrée.
J'ai vécu pire!
Le barman se contenta de rire, et quelques pirates suivirent, Peter décida qu'il l'aimait bien. Il se tourna ensuite pour voir si Naïla l'avait suivie, et avant qu'elle sème la pagaille, l'invita d'un geste à boire ce qu'elle voulait.
Nous ne sommes pas des sauvages. Commande ce que tu veux, j'ai de l'argent aujourd'hui! D'abord on boit un coup, ensuite on en distribue. Ça te va?
Naïla sauta de toits en toits, suivant Peter dans sa cadence. Elle n'était jamais passée par "ce chemin" pour rejoindre un point de rendez-vous. C'était curieux, mais d'un autre côté pratique: elle passait inaperçue si elle s'y prenait bien ! La jeune femme envisagerait peut-être l'emprunt de cette voie à long terme. Du moins si aucun toit ne cassait sous son poids !
Vint alors la réponse à sa question. Comme ça Peter tuait des pirates seulement à cause de leur mauvaise odeur et de leur physique ? Drôle de manière de faire les choses, mais ça restait une raison. C'était un enfant, forcément il y avait des raisons différentes à tout âge. Puis, il lui retourna la question et la jeune femme le regarda d'un air qui voulait dire "ça ne te regarde pas", mais prit la parole en disant autre chose. « Ca ne t'avancerait à rien de connaître mes raisons. Je ne les aime pas. C'est tout ce qu'il y a à savoir. »
Naïla ne parlait jamais d'elle et avait tendance à se braquer et à parler sèchement quand on lui posait des questions. Et là en l'occurrence, elle lui répondit d'un ton assez sec. Ce n'était pas contre Peter, c'était seulement sa façon d'être. Elle n'avait pas l'habitude de la compagnie humaine et voyait toutes leurs paroles, tous leurs actes, comme quelque chose qui avait pour but de la nuire. Une vraie solitaire dans l'âme, peut être un poil trop associable.
Quelques minutes passèrent et ils pénétrèrent dans la taverne. L'ambiance était assez lourde. Rien de très jovial. Des pirates jouaient ici et là à des jeux de paris et de hasard, certains se prenaient la tête, d'autres étaient totalement torchés et les autres semblaient discutés avec Peter. Pourquoi attirait-il aussi bien l'attention ? Il semblait savoir s'intégrer facilement. De quoi faire jalouser n'importe qui. Pourtant ils avaient la ferme intention de les tuer. Dommage !
« Un verre de rhum, s'il vous plait ! »
Le garçon du comptoir lui amena rapidement son verre que la jeune femme but la moitié d'une traite. Sans étonnement le liquide lui brûla la gorge, lui arrachant une petite grimace alors qu'elle plissait du nez. Elle avait souvent bu des verres pour impressionner les pirates quand elle tentait de les charmer et de les tuer après. Et cela eut son effet, car une main baladeuse vint se rendre tout au long de son dos. La jeune femme se contracta et attrapa une fourchette qui traînait sur le comptoir. Sans attendre, elle la planta sournoisement dans la seconde main du pirate qui poussa un gémissement plaintif.
« On ne t'a pas appris les bonnes manières avec les femmes, crétin ! »
Elle parla d'un ton glacial, lui lançant un regard qui aurait pu le foudroyer sur place. Puis, elle attrapa son verre et le finit d'une gorgée, jetant un bref regard vers Peter pour voir ce qu'il faisait. Quelle douce bienveillance qui régnait chez la jeune Vairë, ça en était flagrant !
Une main lourde vint se poser sur son épaule alors que Peter commandait une pinte de bière, plus douce que l'alcool qu'il venait d'ingurgiter, qui lui montait d'ailleurs rapidement à la tête, le faisant sourire de manière somme toute idiote. Le bon côté des choses était que maintenant, au moins, il était bien détendu! L'envie de botter des fesses cédait quelque peu à la flemme, mais il était sûr que si Naïla s'y mettait, alors elle reviendrait au galop!
Alors, gamin, pas un poil sur la gueule et ça s'enfile du rhum? Ta mère s'inquiète sûrement pour toi!
Peter eut un rire sec, songeant au fait d'avoir une mère. Il ne se rappelait plus très bien pourquoi aujourd'hui, mais il était sûr qu'une maman c'était pas ce dont il avait besoin, et que s'il en avait eu une, elle ne se serait pas inquiétée pour lui. Mais ça lui allait très bien, au moins il faisait ce qu'il voulait!
Votre mère s'inquiète, à vous? Moi, je suis libre comme l'air!
Propos incohérents, le pirate eut un air un peu penaud quelques secondes puis choisit d'éclater de rire face à la grande bouche du gamin. Peter siffla sa pinte d'une traite, tâchant de faire passer le fort goût du rhum qui lui brûlait encore un peu le gosier... Soudain il entendit un couinement, et se tourna vers Naïla pour voir un autre pirate s'ôter une fourchette de la main. L'enfant soupira et se rapprocha doucement de Naïla, baissant la voix autant qu'il le pouvait alcoolisé.
Discrets, tranquilles, boire un coup sans faire de vagues... Ca te connait dis-donc à ce que je vois!
Peter secoua la tête d'un air dépité, levant les yeux au ciel, avant de se ressaisir.
Bon, maintenant, le mieux serait de choisir notre plan d'attaque. Alors on va se tourner l'un vers l'autre et sembler avoir une conversation détachée à laquelle personne ne prêtera attention pour pouvoir regarder les autres clients. Ça te va? Regarde comme ça.
Il se tourna vers son tabouret, s'accoudant au comptoir, le regard dérivant sur les clients présents dans la salle. Il était encore tôt, mais les soûlards étaient néanmoins au rendez-vous. Son taux d'alcoolisme faisait dodeliner sa tête et tanguer les pensées dans son cerveau, le moindre petit détail lui paraissait incongrûment drôle, lui faisait afficher un sourire idiot.
Je pense que le mieux, c'est e déclencher une bagarre sans qu'on sache que c'est nous. Comme ça, on n'aura pas tout le monde à dos, ce sera plus facile de filer des gnions en douce, et de gérer! Facile comme plan non?
Naïla n'était pas la femme la plus élégante, la plus douce et la plus docile. C'était une vraie lionne impossible à mettre en cage. Elle agissait comme bon le semblait, quand elle le souhaitait. Elle suivait ses propres idées sans porter importance aux jugements des autres. Ce n'était pas quelque chose de simple de se détacher des commérages des autres, mais chez elle c'était un don naturel: elle s'en fichait éperdument. Voilà pourquoi à la réaction de Peter, elle le regarda dans les yeux et haussa les épaules d'un air de dire "qu'est-ce qu'il y a?". Avant de porter le verre à ses lèvres.
Le contenu se vida rapidement, alors que le pirate était parti à l'autre bout de la taverne injuriant et parlant tout seul. Il faisait un bandage sur sa main. Quel faible ! Une fourchette plantait dans la main et il gémissait déjà. Naïla roula des yeux à cette vision et se tourna sur son tabouret comme l'enfant perdu l'avait suggérer. Elle observa les clients du bar. Elle était très douée pour dénicher les petits détails.
« Tu vois l'homme là-bas en train de jouer aux cartes ? Il est malin mais il vient de changer discrètement les cartes du jeu. Son adversaire semble être bien entouré. Si l'on arrive à prouver sa tricherie en finesse, sa risque de déclencher une grosse bataille, tu n'es pas d'accord ? Et pendant qu'ils se battront, on s'occupera des simples spectateurs. »
Elle attendit son acquisition avant de finir d'une traite son verre et de grimacer. D'un petit saut, elle se leva de son tabouret et avança vers la table de jeu d'un air faussement aguicheur. Elle s'approcha du pirate tricheur, s'assit doucement sur ses genoux et lui murmura quelques mots à l'oreille. Assez pour que le pirate se sente à l'aise et lui sourit d'un air pervers. Nom de Dieu, qu'elle détestait agir comme ça avec ses êtres répugnants. Jouant la comédie comme une prostituée, elle laissa son doigt parcourir le corps du pirate jusqu'à sa manche où elle tira doucement dessus. Discrètement et assez fort. Assez pour que ses cartes de tricherie ne jonchent le sol. Un spectateur fronça les sourcils avant de lâcher un "qu'est-ce que c'est que ce bordel ?... C'EST UN TRICHEUR !". C'était parti. Naïla se redressa et recula dans le fond de la pièce alors que son adversaire dégaina son épée. Ce fut la même chose pour une dizaine d'autres qui suivirent leur "meneur". D'autres sortaient leur revolver. Rejoignant Peter, d'un air malicieux, elle se positionna à ses côtés, croisant les bras sous sa poitrine.