But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.
Bouffie d'arrogance, elle refusait de capituler la diablesse. Même poings liés, elle maintenait cette mimique hautaine comme si une quelconque fierté pouvait la sauver de ce qui l'attendait. Seth esquissait un sourire victorieux, il s'imaginait déjà la reconnaissance du gouverneur de lui avoir offert sur un plateau d'argent, une pirate de cette trempe. Mais tout d'abord, il lui fallait garder une preuve, un souvenir, un trophée. Alors, l'homme sectionna quelques mèches rouges de la chevelure de sa cible. Celles-ci furent glissées dans sa poche et Seth lança un regard amusé à la pirate, cherchant à la provoquer. Elle lui rétorqua une phrase qui le fit éclater de rire. Bonny pouvait bien faire mine de ne pas savoir mais au fond, tous les deux étaient parfaitement conscients qu'il venait de gagner son trophée.
- Je leur réserve un sort bien plus glorieux que ce à quoi elles étaient réduites en trônant sur ta tête pouilleuse ...
Seth haussa vaguement les épaules. En Espagne, la piraterie existait évidemment ! Mais cela n'avait rien à avoir avec la surpopulation de loups de mer à Neverland. C'était comme si ces forbans avaient la main mise sur une partie de l'île. Le joaillier devait se faire à cette idée mais descendre dans leur repère, à One-Eyed-Willy, ne créait aucune once de joie en lui.
La tension semblait augmenter et Bonny perdait patience, c'est tout du moins ce qu'il lui semblait à la voir gesticuler sur sa chambre. Elle dévoila un bout de peau pâle et nargua Seth. La jeune femme redoublait d'ingéniosité car après avoir menacé personnellement son agresseur, elle passait par l'intermédiaire d'un plus gros poisson. Cependant, l'artisan avait un atout dans sa manche. Neverland était régie par différentes puissances qui s'entredévoraient. La piraterie était gangrenée par la mutinerie et les conflits entre bâtiments. Seth avait rapidement appris à tirer parti de toutes ces frasques aussi, il ne doutait pas une seule seconde de pouvoir prendre Bonny à son propre jeu.
- Je ne suis pas un pirate ma chère mais je suis loin de ne pas être au courant de vos problèmes actuels. Crois-tu que j'ignore la situation depuis la mort de Barbe Noire ? Ton capitaine est respecté, certes, mais il a bien d'autres chats à fouetter que de s'occuper d'honorer la mémoire d'une souillon ... les autres capitaines, eux, ne pleureront pas la mort d'une voleuse.
Seth esquissa un sourire. Il avait laissé traîner ses oreilles - ou plutôt fait traîne celles de ses gardes et domestiques - en ville, pour en apprendre plus. Barbe Noire étant mort, il n'y avait plus de roi des pirates. Qui dit plus de roi, dit plus aucun accord et plus aucune diplomatie. Anarchie. La laide, la sanglante, la pure. Et comme si cela n'était pas suffisant, des capitaines s'étant enfouis la queue entre les jambes du vivant de Barbe Noire, revenaient en quête de victoire. Les pirates étaient dans une bien triste période, voués à eux-mêmes. Cependant, Bonny marquait tout de même un point. S'il l'exécutait là, au vu et au su de tous, cela finirait bien par lui retomber dessus un jour ou l'autre. Fort heureusement, l'abattre ne faisait pas partie de ses projets.
- Ne pleure pas ma douce, je ne compte pas t'exécuter ici. Tu mérites pires. Demain, aux aurores, tu iras esquisser quelques pas de danse classique au bout d'une corde sur la place publique.
Il lui adressa un franc sourire, se sentant tellement fier, tellement fort. L'artisan avait l'impression d'avoir gagné un combat alors qu'il n'avait fait que la moitié du boulot. Après tout, ce n'était pas à lui de faire le sale boulot ! L'homme se redressa et souleva sa pinte, venant en versant une longue gorgée sur le visage de Bonny, aspergeant sa bouche mais aussi son nez, ses yeux et ses cheveux. Seth s'esclaffa de grands éclats de rire puis se laissa retomber sur sa chaise.
- Inutile de me remercier. Pour ta dernière soirée d'existence à Neverland, il faut bien arroser ça !
D'un geste, il se releva et attrapa le bras de Bonny. Il l'attira avec lui au-dehors de la taverne. Le jeu était terminé. Désormais, elle marchait droit vers sa sentence.
I’ve tried to make this life my own, to find myself, I’ve searched alone. To let love go and let it in, I found it burning like a sin. I’ve worked it out, but learned it hard, it’s sad inside and life is out. Till I won’t settle down and watch either way.
Seth & Anne
Elle l’avait écouté répondre sans daigner user de salive pour lui répondre à nouveau. Visiblement il était renseigné mais renseigné qu’à moitié et surtout concernant Silver et la relation qu’il entretenait avec son second. En effet, c’était une erreur de croire que Bonny Blood n’avait aucune valeur aux yeux de Silver puisqu’elle était habile navigatrice, diablesse en combat et fine stratège, elle n’avait pas froid aux yeux et se nourrissait de piraterie à l’état brut. Elle avait beau être une femme, il lui avait souvent dit qu’il était bien plus satisfait de l’avoir en second que tout autre homme puisqu’elle prenait son rôle très au sérieux et ne se contentait pas de s’alcooliser nuit et jour comme certains imposteurs. De plus, leur amitié était suffisamment solide, pour qu’elle puisse avoir confiance en lui. Elle lui avait donné sa loyauté, il la respectait et n’allait certainement pas la laisser se faire déshonorer et le responsable de sa mort allait payer le prix du sang.
Le joaillier ne l’entendait certes pas de cette oreille mais elle ne comptait pas lui montrer qu’elle avait raison. Les enfers n’auraient pas la visite d’Anne Bonny, tout simplement parce qu’elle savait que son heure n’était pas arrivée. La jeune femme suivit l’homme du regard, n’énant que très peu surprise que celui-ci vienne approfondir les provocations en venant verser de la bière sur sa tête en la traitant comme une puante, une moins que rien. Elle n’aimait clairement pas ce geste, les pirates autour rirent de la situation, il l’avait humiliée et se sentait blessée dans son orgueil. La jeune femme secoua la tête, essuyant son visage d’un revers de manche mais ne put terminer d’éponger la bière qu’il l’avait déjà relevée en l’attrapant par le bras. Elle suivit au dehors de la taverne, coopérant en prétextant être blessée et fatiguée. Il allait sans aucun doute la mener au gouverneur ou aux cellules pour qu’elle soit pendue à l’aube effectivement ; elle n’aurait certainement pas de jugement. Anne était complètement salie, la bière avait retiré quelques tâches de sang mais laissait ses cheveux roux poisseux et collants. D’autant plus que ses vêtements étaient encore très humides, son allure trahissait d’une lutte acharnée. Pour autant, bien que fragilisée par tout ce qu’elle s’était pris dans la figure, la pirate ne comptait pas abandonner. Puisqu’il n’avait pas pris le soin de se faire escorter par d’autres brutes pour la mener aux cellules, elle allait profiter de cela pour retourner la situation. La jeune femme observait les alentours, attendant le bon moment pour agir. Elle allait bien voir s’il était aussi habile lutteur que tireur.
Après un petit moment de marche, exploitant le fait d’être dans un coin bien moins peuplé, Anne se rebella une fois de plus et donna un vif coup de pied dans le genou de son adversaire. Elle avait usé d’agilité et de vitesse pour qu’il n’ait pas le temps de réagir et qu’il se plie. Puis elle chargea, donna un violent coup d’épaule à la suite pour le déstabiliser et le faire tomber, profitant que le sol à cet endroit là était meuble et humide. D’un coup sec elle tenta de défaire les liens ou d’extirper l’un de ses poignets, mais sans succès, elle ne pouvait donc pas prendre d’arme pour venir le provoquer dans un nouveau duel. Ce n’était pas forcément un problème, il l’avait suffisamment énervée pour qu’elle ait envie de tuer autrement que l’embrocher. Or elle refusait de fuir pour se libérer ou elle pourrait à son tour perdre sa trace. Alors elle eu comme seule solution de lui asséner de violents coups de pieds dans le ventre le temps qu’il soit à terre. Les dents serrées, elle tentait de lui faire le plus mal possible avant de venir s’assoir sur son ventre et porter ses mains liées à son cou et commencer à serrer son emprise après l’avoir plaqué au sol.
Elle ne disait mot, appuyait sur sa gorge avec toutes les forces qui lui était possible de rassembler en plantant son regard meurtrier dans le sien. Son visage était délavé d’expression, néanmoins l’ont pouvait clairement distinguer toute la sauvagerie qu’habitait ses pensées. Elle voulait le voir dans l’impuissance, la regarder faire et s’éteindre avec cette effroyable et dernière image d’elle alors qu’au dernier moment un sourire s’étirerait sur ses lèvres : la satisfaction dans l’assassinat, repue de lui. Elle irait de nouveau dans cette taverne, prendrait place où il s’était assis, allongerait ses jambes sur la table et s’enivrerait en mémoire de cet homme qui avait cru bon pourvoir lui nuire et qui s’était fait rattraper par la réalité.
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Elle avait envie de le tuer. De l'écraser sous sa semelle comme un vulgaire cafard. Franchement, elle le cachait bien. Cette femme-là était solide, Seth n'aurait pu prétendre le contraire. Mais qui n'aurait pas eu envie de mettre en pièces un individu qui osait vous traîner dans la boue comme ça ? L'artiste y prenait un certain plaisir sadique, il fallait bien l'avouer. La pirate ne s'était pas gênée pour s'introduire chez lui, violant par là-même tous les principes de vie privée, de sécurité et de zone personnelle. Puisqu'elle avait mis le feu aux poudres, lui, ne faisait que suivre la logique en enfreignant sa zone à elle de confort ! Cependant, tous les amusements ont une fin et Seth savait que le leur touchait à son terme. Ils s'étaient battus comme des chiffonniers, avaient ricané, s'étaient insultés mais maintenant l'heure était venue de plier bagages.
Bonny n'opposa pratiquement aucune résistance et il aurait fallu être idiot pour ne pas savoir qu'elle ne tenterait pas quelque chose. Seth n'avait pourtant aucun autre choix. La diablesse avait emporté ses gardes six pieds sous terre et les dernières ressources monétaires en sa possession dans l'immédiat, avaient été redistribuées aux pirates qui l'avaient aidé. Autrement dit, ce serait Bonny et lui dans la nature luxuriante de Neverland. Le duo s'éloigna peu à peu de One-Eyed-Willy en direction de Blindman's Bluff. Le trajet fut silencieux, les deux adversaires devaient être épuisés après tant de coups et de coups bas. Seth n'était pas habitué à tout ça, ses journées se composaient plutôt de peintures, de dessins, des sculptures, de balades et d'observation du paysage.
Tout bascula quand il sentit une violente pression dans son genou, par miracle, celui-ci ne se brisa pas mais le força à se recourber. Bonny en profita pour lui asséner un violent coup d'épaule qui lui fit, honnêtement, voir des étoiles. Seth perdit son équilibre et la fourbe en profita pour le charger. Recroquevillé au sol, il essuya de violents coups de pieds au torse. Sa chausse s'enfonçant dans son thorax tandis que ses lèvres laissaient s'échapper des filaments pourpres. Bientôt, sa bouche fut repeinte de vermeille. Heureusement les coups cessèrent de pleuvoir et Bonny vint littéralement s'asseoir sur lui pour le maîtriser avec ses mains liées.
Ses mains vinrent se glisser sur le cou de Seth et elle pressa, enfonçant ses ongles dans sa chair et serrant les phalanges pour lui couper l'oxygène. L'homme se débattit, sentant l'air lui manquer. Ses pieds battirent violemment le sol et son visage perdit sa couleur naturelle pour prendre une teinte rougeâtre, menaçant de passer au violet. Dans un élan de lucidité soudaine, Seth se rabattit sur la seule idée qui lui vint. Une fois de plus, il se saisit de ses cheveux. Cette fois cependant, le contact n'avait rien de délicat. Seth enroula littéralement ses mains dans les mèches de la pirate et tira tel un forcené. L'énergie du désespoir lui fit tirer avec une puissance dont il ne se savait pas capable. Il lui sembla entendre comme un craquement sonore absolument horripilant mais peut-être n'était-ce que son esprit embrumé par le manque d'oxygène ?
Incapable de prononcer le moindre mot, l'homme ne pouvait se rattacher qu'à ces quelques mèches qu'il avait empoignée comme si sa vie en dépendait. Tout simplement car elle en dépendait ! L'artiste sentait ses poumons secs et sa vision se voiler. Le poids de la pirate posé sur son ventre l'empêchait de gagner un tant soit peu d'air. Dans un dernier effort, il donna une violente impulsion vers l'arrière pour tenter d'arracher une touffe de cheveux à la pirate ...
I’ve tried to make this life my own, to find myself, I’ve searched alone. To let love go and let it in, I found it burning like a sin. I’ve worked it out, but learned it hard, it’s sad inside and life is out. Till I won’t settle down and watch either way.
Seth & Anne
C’est dans une violence sans nom que leur duel avait reprit. Anne n’était pas réellement en position de force puisqu’elle était encore attachée. Néanmoins elle avait réussi à piéger son adversaire en l’ayant plaqué au sol pour l’étrangler. Appuyant sur sa jugulaire, les dents serrées, elle le voyait changer de couleur, elle sentait sa respiration s’écourter tandis que les premiers signes de suffocation lui arrivaient aux oreilles comme un si joli son. Elle lui ôtait la vie et se délectait de cette vision comme c’était toujours le cas lorsqu’elle venait à tuer quelqu’un dont la haine dépassait l’entendement. Lui qui avait cru bon la défier et la traiter comme une moins que rien, il ne récoltait que la mort. Elle la lui offrait avec grand bonheur, faisant longuement durer le plaisir afin de toujours se souvenir de son visage se crispant dans l’agonie. Il se débattait sous ses mains, elle sentait son corps se débattre mais usait de toutes ses forces pour parvenir à ses fins.
Malheureusement, elle n’eut pas eu le temps de calculer quand il agrippa fermement sa chevelure pour tenter de se défaire de son emprise, serrant aussi fort qu’elle lui serrait la gorge dans le but de la faire lâcher. Alors une course au temps se fit entre eux : qui craquerait le premier ? Anne grimaça, sa poigne dans sa tignasse était douloureuse, lui arrachait des plaintes et il tirait si fort qu’il en faisait craquer ses cervicales. Elle se payerai un bon gros torticolis les jours à venir et sentait déjà ses muscles répondre en se crispant désagréablement.
Anne tenta de ne pas lâcher son emprise et prendre sur elle, quitte à ce qu’il lui arrache les cheveux, elle voulait le tuer là maintenant et ne pas lui laisser le temps de reprendre le dessus. Mais il lui faisait mal et sa tête partait sur le côté sous les coups secs qu’il donnait. Au bout d’un moment il réussi à lui faire relâcher sa constriction mortelle sans qu’elle ne puisse faire quoi que ce soit, elle tomba sur le côté et son réflexe fut de lui attraper directement la main perdue dans sa chevelure rouge.
« Ciach ort, focáil leat !! » Jura t-elle entre les dents
Il fallait qu’il la lâche d’abord si elle voulait entreprendre quoi que ce soit et ce n’était sans aucun doute pas gagné. La lutte acharnée allait continuer, elle s’attendait alors à devoir essuyer quelques coups avant de pouvoir de nouveau tenter de le tuer. La jeune femme vint attraper l’un de ses doigts, en forçant dessus elle commença à le tordre, menaçant de lui casser les os s’il n’accédait pas à sa requête.
« J’t’arrache les doigts si tu lâches pas ! » Cracha t-elle histoire que ce soit clair.
Anne planta son regard dans le sien, la haine faisait rage, elle lui aurait volontiers arraché la gorge avec les dents pour pallier à ce problème mais en lui agrippant la chevelure il gardait une distance de sécurité entre eux. Afin d’être sûr qu’il n’essaye pas de faire quoi que ce soit elle attrapa son arme à feu et la jeta le plus loin possible. Ils n’avaient désormais que leurs poings et leur colère pour s’entretuer ou qu’il finisse par la faire jeter en prison. Quoi qu’il en soit s’il comptait toujours l’y emmener, elle n’allait pas lui faciliter la tâche, Le chemin serait laborieux et compliqué puisqu’elle allait continuer de se débattre comme un véritable fauve.
La respiration saccadée sous l’effet de l’adrénaline, le visage couvert de sang, de bleus et autres lésions, Anne ne comptait pas décolérer ni même se calmer. Alors il aurait désormais beaucoup de mal à la maitriser pour qu’elle coopère.
« Lâche moi j’tai dit !!! » Lui hurla t-elle au visage.
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Un goût prononcé d'amertume lui caressait la langue. Des larmes se formaient aux coins de ses yeux, était-ce des larmes ou une réaction corporelle suite à la pression extrême des doigts de son assaillante sur son cou ? Sa colère s'était évanouie. Son corps était vide. D'oxygène, de volonté, de force. Seul restait l'instinct de survie plus puissant que jamais. Telle une alarme gigantesque retentissant jusqu'aux tréfonds de son for intérieur. L'artiste s'agrippa alors aux cheveux de son adversaire, enfouissant les deux mains dans ceux-ci et y enroulant ses poignets. Il aurait pu tirer jusqu'à s'en déboiter l'épaule tant l'homme était désespéré. Ne jamais sous-estimer la rage du désespoir.
Les deux individus exerçaient une danse morbide. Leur corps rendus bleus par les coups, s'entremêlaient dans des positions meurtrières. Le vermeille éclaboussait les lieux, des filets s'échappant par-ci par-là à mesure que l'échange devenait plus brutal, plus intense. Enfin, les doigts de la pirate perdirent de leur force et son emprise macabre se desserra. L'air entra dans ses poumons par toutes petites bribes, le laissant à peine respirer. Seth inspira profondément, cherchant à arracher l'oxygène à son environnement sans y parvenir totalement. Ses mains étaient désormais liées aux cheveux de son ennemie, tirer, toujours plus. L'artisan ne lâcherait pas avant de lui avoir tout arraché et d'avoir laissé un énorme trou au milieu de son crâne.
Elle approcha alors dangereusement sa main d'un doigt de l'homme. L'artiste en lui ressentit un frisson de terreur. Anne s'attaquait à ses mains, ses outils de travail ! La pirate ne l'emporterait pas, pas cette fois. Toucher à ses mains, à ses doigts, c'était s'en prendre à ce qu'il chérissait le plus au monde. Attaquer un ourson sous les yeux de sa mère reviendrait au même. Seth l'avait entendu jurer dans une langue barbare puis elle lui hurla de la lâcher sous peine de lui arracher les doigts. Menace qu'elle réitéra quelques instants plus tard alors que leurs regards se cherchaient, toujours plus enflammés par la lutte.
Le combat n'avait désormais plus rien d'une danse. C'était plutôt le lynchage pathétique de deux chiens errants, réduits en lambeaux. Chacun avait perdu des plumes au cours de ce combat, ils puaient le sang et la sueur. Ils n'étaient plus que deux ombres, deux ridicules et affligeantes petites ombres perdues dans la nature d'une île bien cruelle à l'égard des siens. Seth savait qu'il ne gagnerait pas, pas comme ça. Bonny avait jeté son arme et elle lui briserait les doigts dès qu'elle aurait une prise correcte. Alors, sans y réfléchir plus, l'homme décida de faire ce qu'elle lui demandait.
Il lâcha ses cheveux, tout à coup, sans crier gare. La tête de Bonny, tirée de force vers l'arrière par les mains de Seth, bascula vers l'avant. L'artisan prit alors tout l'élan qu'il put, ramenant la tête dans le cou pour la propulser de toutes ses forces vers l'avant. Il fracassa son front contre le nez de la pirate, espérant le lui briser sur le coup. Jamais Seth n'avait induit une telle impulsion dans une frappe, cependant avant ce soir, jamais il n'était passé si près de la mort ! Les deux individus n'étaient plus que pourpre. Seth sentait un liquide chaud lui couler du front entre les deux yeux, glissant sur l'arrête de son nez comme s'il s'agissait du lit d'une rivière. Le pire, c'est qu'il ignorait si c'était sa propre substance ou celle de son adversaire.
- Crève !
Seth avait hurlé en se redressant brusquement, d'un coup brutal, il avait repoussé des deux pieds le corps de la femme. L'artiste rampa hors de la portée de son ennemie durant quelques secondes, gagnant un peu de répit éphémère où il put offrir un brin d'oxygène à son corps. Dans un élan de désespoir, Seth attrapa les plus grosses pierres qui lui passèrent sous la main et les jeta avec haine vers Bonny. Il visait la tête mais n'avait que bien peu de chance d'atteindre sa cible vu son état actuel. Tout son corps tremblait, la sueur coulait dans son dos et sur son torse et il sentait ses réserves s'éteindre. Le combat avait été bien trop intense, bien trop brutal pour l'artiste qu'il était.
Jetant les dernières pierres à sa portée, Seth se releva d'un bond et courut droit vers elle. Il l'attrapa par les bras et se jeta littéralement sur elle. Les deux individus tombèrent, dévalant la petite pente de la colline dans leur dos. L'artisan sentit des pierres lui frapper les flancs, l'une d'entre elles lui tapa l'arcade et sa vision se brouilla de rouge. Des branches lui égratignèrent les avants-bras et les jambes tandis qu'une brindille s'enfonçait dans son mollet. Ils roulèrent quelques longues minutes, dévalant la pente sans pouvoir réagir si ce n'est en laissant son corps glisser mollement.
Enfin, le supplice s'acheva. Leurs deux corps cessèrent de rouler, Seth fut propulsé plus loin quand ils cognèrent contre une ultime grosse pierre. L'artisan avait l'impression que tout son corps était désarticulé, que pas un seul os n'avait été épargné. Seth rampa, s'agrippant aux feuilles mortes, à la terre et aux racines sortant du sol. Il devait fuir, s'en aller. Que les crocodiles la bouffent ! Qu'un indien passe par là et achève le boulot ! Qu'un ours en fasse son quatre heures. Qu'importe ... Seth ne pouvait plus. Il avait été jusqu'au bout et au-delà mais c'était désormais avec l'au-delà qu'il flirtait. Tout son être lui hurlait de s'éloigner, de mettre autant de distance que possible entre lui et ce démon. Alors, docilement, il obéit à cette voix interne. Fous le camp, Seth. Fous le camp.
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Seth & Anne
Le combat continuait, sans relâche et dans une violence sans nom. Elle avait connu des duels dont le but était de s’entretuer mais elle commençait sérieusement à se demander si elle avait déjà vu autant d’acharnement. L’un comme l’autre avait suffisamment de motivation pour résister malgré les blessures mais Anne refusait catégoriquement de mourir de la main de cet homme. Tandis qu’elle lui tenait fermement la main, son adversaire cédait à ses menaces et relâcha ses cheveux pour lui donner un coup de tête. La jeune femme senti un vif picotement la prendre au nez qui lui arracha un gémissement de douleur et en portant machinalement sa main à celui-ci elle remarqua qu’elle saignait abondamment. La douleur lui paralysait le visage, la migraine cognait dans sa tête et il en profita pour lui jeter des pierres. Son corps déjà endolori souffrait davantage de ces coups, les pierres marquaient sa peau de larges rougeurs même à travers ses vêtements. Elle protégea sa tête, quitte à tout se recevoir sur des blessures déjà bien douloureuses, au moins elle ne craignait pas de se faire ouvrir le crâne. Elle tenta de se relever mais n’eut pas le temps de le voir arriver que propulsée en arrière, elle dévala une pente qu’il ne semblait pas avoir calculée non plus.
Le calvaire prit fin, allongée sur le bitume, le regard tourné vers le ciel, elle crut perdre connaissance tant la vision était trouble. Suffoquant sous les vives décharges qu’imprimaient ses blessures, Anne vit que son adversaire s’était relevé et déjà s’en allait en déclarant forfait. La pirate étira un large sourire, il avait fait une faute, il aurait pu la tuer à cet instant puisqu’elle était au plus mal et qu’elle ne se sentait pas la force de se remettre debout. Mais c’était le silence qui l’avait accueillie dans son funeste berceau. Anne observait la voute céleste se mouvoir sous ses yeux tandis qu’elle reprenait peu à peu ses esprits. C’était bel et bien fini, et elle se demandait si elle allait finir par faire une hémorragie interne et qu’elle allait mourir ici. On aurait vite fait de l’oublier, tout comme elle s’était oubliée elle-même.
Mais la mort ne venait pas, malgré elle, elle s’accrochait à la vie comme un parasite alors qu’elle aurait juste eu envie de cesser d’avoir mal. Sa respiration était sifflante, elle attendit tel un cadavre durant une bonne demi-heure avant daigner lever le petit doigt. Anne se releva finalement, posant un pied à terre, elle chancela et se rattrapa sur le muret pour se redresser complètement. La main tenant ses côtes, elle toussa pour cracher du sang et inspira doucement pour remplir de nouveau ses poumons d’air. Elle souffrait atrocement, faible et complètement déboussolée elle chercha son adversaire du regard. Mais il était bel et bien parti, sans doute très amoché également mais cela ne faisait que repousser l’échéance. Elle se doutait bien qu’il allait revenir vers elle aussitôt qu’il serait remis sur pieds et qu’il aurait plus de ressources pour venir à bout d’elle – cela n’était qu’un avant gout, à moins qu’elle ne décide de prendre de l’avance.
Anne essuya son front imbibé de sueurs froides d’un revers de sa manche. Elle étouffa une lourde plainte après quelques minutes de marche, sans doute à cause de côtes cassées et de ses nombreux hématomes qui allaient la clouer au lit durant quelques jours. Elle avait besoin d’aide, mais elle n’irait pas la chercher et préférait se faire oublier pendant un moment quitte à crever seule des suites de ses blessures. Anne prit le chemin inverse, retournant dans le centre ville en trainant sa carcasse, couverte de sang des pieds à la tête. Ceux qui la croisaient avaient des gestes de recul, de la crainte du dégout et sans doute de la curiosité sur ce qu’il s’était passé. Mais la pirate ne leur prêta pas attention, ils n’avaient toujours été que des fantômes pour elle, alors elle prit le chemin qui menait chez elle afin d’aller se laisser tomber sur son lit et enfin prendre du repos.