Les indiens l'ont mis en pièces et paradoxalement, c'est l'une d'entre eux qui s'attèle à le recoller pièce par pièce. Jud avait été inconscient de mettre l'indienne face à un dilemme si énorme et au fond, il avait sincèrement espéré qu'elle accepte. Qu'elle abandonne tout pour partir avec lui, partir vers une aventure nouvelle. Mais la jeune femme avait des obligations, des besoins et des devoirs. En un sens, le pirate pouvait le concevoir. L'homme se contenterait donc d'un baiser éphémère, d'une étreinte rapide et d'un départ à nouveau. Pour l'heure, Jud voulait profiter de l'instant. Cha'kwaina avait été piégée la première fois, il ne lui avait pas laissé le choix que de l'embrasser. Cette fois, il voulait que le baiser soit son initiative à elle. Que la belle lui prouve qu'elle aussi, elle avait envie de se rapprocher de lui. Et contre toute attente, Cha vint déposer ses lèvres sur celles du pirate.
Le forban glissa un bras autour de la taille de la belle et l'enlaça tendrement. Il prolongea le baiser, sentant le corps chaud et fluet de la demoiselle contre le sien. Cha'kwaina ne l'accompagnerait pas mais au moins, elle ne le laissait pas dans le flou. L'indienne recula son visage pour s'excuser, porter sur ses frêles épaules le poids des actes de toute sa tribu. Mais Jud, il s'en foutait. Pour lui, ça appartenait déjà au passé. Ils lui avaient, au final, permis de la revoir. De partager ces moments privilégiés avec elle. Ce laisser-passer avait été douloureusement gagné mais le pirate parvenait à voir le verre à moitié plein. Pour une fois. L'homme pencha la tête et reçut un nouveau baiser. Il fixa ensuite Cha en souriant.
- Oublie ça. C'était rien.
Sa main se glissa dans le dos de Cha'kwaina et il la souleva, l'emmenant avec lui sur le lit où il l'allongea. Venant s'allonger à ses côtés, le pirate ne se positionna pas par-dessus la belle mais bien à ses côtés. Jud ne comptait pas lui en demander trop. Leur histoire était quelque chose de beau, quelque chose qu'il chérissait. Il ne la salirait pas, il ne briserait pas tout. Avec Cha, il voulait bien mieux que cinq malheureuses minutes de plaisir avant de partir en courant comme un voleur. L'homme tendit le bras et le passa derrière la tête de la belle brune. Il l'attira contre son torse pour qu'elle puisse y poser la tête et caressa ses cheveux, son cou, ses épaules douces et son dos.
- Il va nous falloir un point de rendez-vous ...
L'homme se pinça les lèvres, observant le sommet en pointe du tipi. Quel endroit pourraient-ils élire comme refuge ? Quelle partie de Neverland accueillerait l'étrange duo qu'ils formaient ? Un sourire espiègle se dessina sur ses lèvres tandis que ses phalanges se perdaient dans le cou de Cha'kwaina. Jud venait de songer à un endroit où se retrouver ... un endroit atypique.
- On pourrait se voir à Pixie Hollow ! Il faudra juste éviter qu'une fée ne nous repère où elle me fera ma fête ...
Il retint un éclat de rire, ils ne devaient pas attirer l'attention sur eux. Jud était un pirate, l'espèce la plus détestée de Neverland. La forêt des quatre saisons était le territoire des enfants perdus, ennemis des forbans. De même pour Pixie Hollow qui appartenait aux fées, ennemies des pirates elles aussi. Pourtant, le marin n'avait pas dit son dernier mot ! Neverland n'était pas si petite que ça et ils avaient plein de cachettes où aucun regard indiscret ne pourrait venir les déranger. Ni indien, ni gamin perdu, ni fée ni même pirate. Jud ne voulait plus appartenir à aucun de ces groupes, il voulait juste être avec Cha'kwaina. Le temps de leurs retrouvailles.
- Et qu'est-ce tu penses de la forêt des jeux? C'est un territoire plutôt calme, parfois explorés par les enfants perdus mais nettement moins qu'auparavant. Et il y a quelques maisonnettes où on pourrait sans doute se réfugier de temps à autre.
Le pirate acquiesça à sa propre suggestion, Jud était heureux d'avoir trouvé un terrain plausible. Cha'kwaina ne serait jamais acceptée par ses amis pirates et lui, ne serait jamais toléré parmi les proches indiens de la jeune femme. Ils n'avaient donc d'autres choix que de jouer les exilés.
- Je suis bien là ...
Il pencha la tête, vint embrasser à nouveau Cha'kwaina et lui caressa la pommette du bout des doigts. Son front contre celui de la jeune femme, Jud ignorait s'il était en train de plonger à pieds joints dans le merdier le plus immense qu'il ait jamais connu ou si, au contraire, il s'ouvrait des horizons magnifiques. Cha lui donnait envie de prendre le risque.
- Tu comptes parler de moi à quelqu'un ?
Jud esquissa un sourire à cette idée. Lui, il allait forcément en parler à son meilleur ami. Ce frère qu'il n'avait jamais eu mais qu'il avait trouvé. Le pirate ne lui cachait rien, pas même les pires horreurs qu'il ait pu commettre. Donc il y aurait forcément quelqu'un au courant ... du côté de Cha, peut-être pas, il se posait sérieusement la question.
Son corps tout contre celui du pirate, ses lèvres s'unissent pour une seconde fois aux siennes. Elle se sent terriblement mal pour les souffrances que son peuple a infligées à l'homme pour qui son coeur se remet doucement à battre. Seulement, après des excuses qu'elle n'a sans doute pas à formuler, elle veut se plonger vers l'avenir, Cha'kwaina. Un avenir des plus incertains, certes, mais un avenir, tout de même. Il n'y a pas seulement que sa relation avec Jud qui est incertaine, sa vie au grand complet l'est et ça, depuis qu'elle souffre de ce mal inconnu. Cependant, elle s'est jurée de profiter de la vie autant qu'elle le pourrait, la brune, avant qu'il lui arrive un nouveau malheur. Alors se plonger dans une relation dont elle ignore complètement l'issue est sans aucun doute une façon d'en profiter. Elle ne peut pas refouler l'attirance et les sentiments naissants qu'elle a envers cet homme, pour l'unique raison qu'il n'est pas l'un des siens. Cha'kwaina, elle se doit d'affronter ce qu'elle éprouve à son égard, elle se doit de chercher à approfondir ce lien davantage.
Ses lèvres se séparent des siennes et le regard du brun est posé sur elle avec insistance, alors qu'un sourire illumine son visage. « Oublie ça. C'était rien. » Qu'il lui répond finalement, à propos des excuses qu'elle a formulés, quelques instants plus tôt. Elle ne dit rien, l'indienne, se contentant de baisser légèrement le visage. Mais ce n'était pas rien... ils lui ont fait du mal et il ne le méritait pas. Du moins, à ses yeux à elle, même si elle sait qu'il n'est pas tout blanc.
Sans un mot de plus, il vient glisser sa main dans son dos et la soulève, avant de l'emmener avec lui sur le lit et de l'allonger, avant de prendre place à ses côtés. Il passe ensuite un bras derrière sa tête et l'attire contre son torse. Elle s'y installe en silence, Cha'kwaina, fermant les paupières et profitant des douces caresses que lui offre le pirate. « Il va nous falloir un point de rendez-vous... » Elle étire un léger sourire, la brune, tout en réfléchissant. Il leur faudrait un endroit sur, où ils ne risqueraient pas de croiser l'un des siens. Un endroit où ils ne pourraient être vus. Dans un premier temps, il lui propose Pixie Hollow et l'indienne, elle reste pensive, l'espace d'un instant, levant le regard vers lui. « Et qu'est-ce que tu penses de la forêt des jeux ? C'est un territoire plutôt calme, parfois explorés par les enfants perdus, mais nettement moins qu'auparavant. Et il y a quelques maisonnettes où on pourrait sans doute se réfugier de temps à autre. » À ses paroles, un sourire vient illuminer son visage. Voilà une cachette fort intéressante à laquelle elle n'avait pas encore songée, la brune et pourtant, l'endroit lui semble tout indiqué pour ses rencontres. « La forêt des jeux, ça sera parfait. » Ses proches ne s'y rendent pratiquement jamais, donc ils y seront à l'abri des regards indiscrets. Un léger sourire flotte sur ses lèvres, alors qu'elle laisse courir ses doigts sur le bras du brun. Elle est bien dans ses bras, l'indienne et même si en ce moment, elle en veut aux siens pour ce qu'ils ont fait à Jud, elle sait que sans eux, ils ne seraient pas réunis, ce soir. Comme quoi, même les situations les plus difficiles ont elles aussi leur bon côté.
« Je suis bien là... » À nouveau, elle étire un sourire, l'indienne. Elle est bien, elle aussi. Sentiment qu'elle n'a pas éprouvé depuis des années, sois à l'époque où son époux était encore en vie. Jud, il penche la tête et vient l'embrasser, caressant sa joue du bout des doigts. Puis il reste tout près d'elle, son front contre le sien, alors que sa main à elle vient jouer dans les cheveux du pirate. Elle sourit la brune, sourire qui ne semble pas vouloir s'échapper, depuis les dernières minutes. Cha'kwaina, elle aimerait pouvoir arrêter le temps, afin que les secondes, les minutes ne filent pas aussi rapidement. Car bientôt, il devra repartir, Jud et elle appréhende ce moment, la brune, oh oui, elle l'appréhende grandement.
« Tu comptes parler de moi à quelqu'un ? » Il esquisse un sourire, Jud, sous ses propres paroles, alors que la peau rouge ne cesse de l'observer. À vrai dire, il y a peu de gens à qui elle pourra en parler, l'indienne. Normalement, elle en aurait parlé à Kimi, mais évidemment, elle ne le peut pas. Elle est extrêmement proche de son frère, Tuari, mais elle sait qu'il la jugerait pour ça, tout comme le reste de sa famille. Ainsi, il y a un visage, un seul qui lui vient à l'esprit, celui de Mingan. Ce dernier était très proche de son défunt mari, mais elle sait également qu'il ne la jugerait jamais. Mingan, il est si compréhensif, si ouvert d'esprit, il ne pourra que la soutenir, tout en sous-entendant qu'elle devra tout de même se méfier. L'indien, il n'a jamais aimé les loups de mer, encore moins depuis ce fameux jour, mais il fait assez confiance au jugement de Cha'kwaina, alors il comprendra. « J'ai un ami à qui je risque d'en parler. Mingan. Il peut être très compréhensif. Je crois que c'est le seul qui m'écoutera jusqu'au bout, sans chercher à me persuader de tout arrêter. » Elle étire un énième sourire, tout en dessinant maintenant des arabesques invisibles sur l'un des bras du brun. « Et toi, tu compte en parler à quelqu'un ? » Ses yeux le questionne. Elle connait peu de choses à son sujet, ni même au sujet des pirates en général. Elle ne sait pas s'il a de la famille, s'il est toujours en contact avec eux. Elle ne sait pas s'il a des amis proches, elle ne sait rien du tout, Cha'kwaina. À nouveau, elle se questionne à son sujet, elle est intriguée. Elle sait si peu de choses le concernant, tout comme lui en connait peu à son sujet. « Ou tu vas éviter de dévoiler que tu fréquente une peau rouge ? » Elle comprendrait s'il ne ressentait pas le besoin d'en parler ou même s'il désirait le cacher, tout simplement. Il ne font pas parti du même monde, ils sont des ennemis naturels ou du moins, c'est ce qu'il a été décidé.
Durant longtemps, Jud s'était interdit de s'attacher. A quoi bon ? Il finirait tout de même par pourrir dans un caniveau, tôt ou tard. Sa vie ne se déroulait que dans le sang et le fracas, que pouvait-il espérer de bien là-dedans ? Pourtant, Cha était parvenue à le faire douter. Lui faire oublier que son existence actuelle était chaotique. Jud n'avait même pas envie d'y penser, il voulait simplement profiter de l'instant. Profiter d'un moment de calme, de paix, pour rester tranquillement allongé aux côtés de la belle indienne. La tête de la douce demoiselle contre son torse, ses longs cheveux sombres glissant jusque dans son cou, ses doigts allant et glissant sur son bras. Jud appréciait cet instant, il faisait partie de ces moments qu'il garderait en tête lorsque son monde s'écroulerait. Le pirate ferma un instant les yeux, reposant sa vision éprouvée par une journée trop remplie.
Cha'kwaina l'écouta parler, elle réfléchissait beaucoup plus que lui. C'était elle qui calmait les envies d'évasion spontanées du forban, c'était aussi elle qui veillait à ce qu'il ne fasse rien d'idiot. Elle avait été là pour épargner la vie d'un indien, pour prouver à Jud qu'il pouvait résister à l'envie de supprimer un ennemi de sang-froid. Aujourd'hui, l'homme en était réduit à réfléchir à une cachette, un havre de paix où deux individus, censés ne pas se rencontrer, pourraient se rejoindre. La forêt des jeux s'imposa alors comme le domaine idéal aux yeux du duo. Là-bas, Jud et Cha pourraient être ensemble sans qu'aucune oeillade ou aucune menace ne plane au-dessus de leur tête.
Dans un souci d'en apprendre plus sur la belle, Jud chercha à savoir si elle parlerait d'eux à quelqu'un. La précarité de leur situation rendait les révélations difficiles. Si les gens le prenaient mal, tout partirait bien vite en problèmes incroyables. Pourtant, Cha'kwaina pensa à quelqu'un. Un indien, un homme qui apparemment pourrait comprendre sans trop juger. Le pirate acquiesça d'un mouvement de tête. Il se fiait au jugement de la belle pour se confier aux bonnes personnes. Naturellement, Cha lui retourna la question. Un éclat de rire faillit lui échapper mais Jud le retint, se rappelant qu'ils devaient se faire discrets. En effet, le visage de son ami de toujours venait d'apparaître dans sa tête. Il fallait qu'il parle de lui à Cha ...
Cependant, avant qu'il ait pu lui révéler à qui il comptait en parler, la jeune femme souleva un point. Jud aurait pu éviter d'en parler, il aurait pu faire profil bas et se taire. Sauf que le pirate était un mélange détonant de dynamisme et d'indépendance. Personne n'aurait été capable de lui imposer quoi que ce soit, s'il avait décidé de fréquenter une peau rouge, cela n'appartenait qu'à lui.
- Je parlerai de toi à mon plus vieil ami, mon frère. Il s'appelle Vlad et je ne peux rien lui cacher.
Il esquissa un sourire et vint à nouveau embrasser le cou de Cha puis glissa sa main sur son visage, Jud détestait devoir se cacher pour fréquenter la femme qu'il avait choisi. Pourtant, pour la sécurité de la belle, il le ferait sans broncher. Le forban aurait tellement aimé que les choses se passent autrement.
- Cha, ...
Soudain, un bruit l'interpella. C'était comme si quelqu'un débarquait dans le coin. Tel un fauve bondissant hors de son terrier, Jud se mit sur ses pieds. Il se baissa et roula sous le lit de l'indienne. Quelques bruits se firent entendre tout proche du tipi et puis, une voix retentit. Quelqu'un venait demander à la demoiselle si tout allait bien apparemment. Le pirate tâcha de ne pas respirer trop fort, de ne faire ni bruit ni mouvement brusque pour éviter tout soupçon. Cette situation était des plus inconfortable. Jud attendit quelques instants puis, quand la menace se fut éloignée, il rampa à moitié hors de sa cachette.
- C'est pas facile tous les jours de se retrouver rien que tous les deux !
Il pouffa de rire et se redressa péniblement. Jud s'approcha à nouveau de l'indienne et l'enlaça tout en venant lui dérober quelques baisers rapides.
- Tu aurais un vêtement à capuche pour me faufiler plus discrètement ?
Cha lui avait parlé de son frère, peut-être pouvait-elle subtiliser un vêtement à ce frangin qu'elle semblait apprécier ...
Dès l'instant où Jud lui avait demandé si elle comptait parler de lui à quelqu'un, c'est l'image de Mingan qui s'était formée dans son esprit. Depuis la mort de Lonan, l'indien était un des êtres de qui elle s'était beaucoup rapprochée. Puis lorsqu'il avait à son tour perdu la femme qu'il aimait, le lien s'était consolidé, entre les deux peaux rouges. Ils étaient bien différents, mais se ressemblaient à la fois, un tempérament calme et une grande ouverture d'esprit. Le chasseur, il était beaucoup moins sanglant et fermé que l'était son cousin, il comprendrait. Et même si à ses yeux ça serait une belle grosse bêtise, il ne ferait pas tout son possible pour la dissuader de se rapprocher du pirate. Du moins, c'est ce qu'elle pense, Cha'kwaina, mais elle sait que la vie réserve parfois de mauvaises surprises. Mais normalement, elle sait à quoi s'attendre avec lui, elle le connait assez bien.
Jud, il acquiesce lorsqu'elle lui parle de son ami puis elle remarque le sourire qui se glisse sur son visage, lorsqu'elle lui retourne la question. « Je parlerai de toi à mon plus vieil ami, mon frère. Il s'appelle Vlad et je ne peux rien lui cacher. » Il sourit, le brun, avant de venir embrasser le cou de la jeune femme qui sourit à son tour. L'idée qu'il désire parler d'elle à un proche la rassure, en quelque sorte, ça signifie qu'elle a une certaine importance aux yeux du pirate et ça, c'est quelque chose d'important. Elle a tendance à s'écouter, l'indienne, lorsqu'une passion l'anime, elle fonce tête baissée, même si elle est très réfléchie. Elle plonge yeux fermés dans cette relation qui pourrait bien la mener nul part, au final. « Cha... » Elle plonge son regard dans le sien, attentive à ce qu'il va lui dire, mais ils sont interrompus par un bruit, une voix qui provient de l'extérieur du tipi. « Cha'kwaina ? » L'espace d'un instant, son coeur cesse de battre contre sa poitrine. En une fraction de seconde, elle se retrouve sur ses deux pieds et Jud sous son lit. Une fois assurée qu'il est bien caché et qu'il ne sera pas vu, elle s'approche de l'entrée du tipi, là où elle soulève un pan de tissu, avant de sortir. Devant elle se trouve Tokola qui la détaille de la tête aux pieds, alors qu'elle lui sourit doucement, un air interrogateur sur le visage. Il lui demande si tout va bien, ce à quoi elle répond oui, se faisant la plus naturelle possible. Après, ce n'est que la vérité, tout va très bien, même si elle sait qu'en réalité, il cherche à savoir si elle aurait vu le pirate. D'ailleurs, avant de s'éclipser d'où il vient, il lui glisse un mot comme quoi en cas de besoin, elle n'aura qu'à aller le retrouver.
Cha'kwaina, elle observe durant quelques instants sa silhouette qui s'éloigne, avant de regagner le tipi. Elle ressent une immense vague de soulagement qu'elle laisse paraître, lorsqu'un soupire franchit la barrière de ses lèvres. « C'est pas facile tous les jours de se retrouver tous les deux ! » Il pouffe de rire et elle étire un sourire, secouant légèrement la tête, alors qu'il s'approche et qu'elle se faufile dans ses bras. « C'est impossible, tu veux dire ! » L'indienne, elle profite de ses quelques baisers rapides, sachant pertinemment qu'il sera bientôt temps pour lui de partir. Elle aimerait qu'il puisse rester, seulement c'est compliqué et totalement impossible. « Tu aurais un vêtement à capuche pour me faufiler plus discrètement ? » Son regard posé dans le sien, elle vient doucement hocher la tête, avant de déposer un baiser sur ses lèvres et de s'éclipser vers une grande armoire. Cha'kwaina, elle l'ouvre et en sort une grande cape qui a autrefois appartenu à son mari. Voilà un vêtement dont elle n'a pas su se départir et maintenant elle y trouve une nouvelle utilité. Elle esquisse un sourire avant de s'approcher de lui et de l'aider à l'enfiler. « Ça devrait faire l'affaire. » Durant un instant, elle l'observe, une vague de nostalgie qui vient soudainement l'assaillir. À nouveau, elle vient se réfugier dans ses bras et dépose un nouveau baiser sur ses lèvres, avant de reculer son visage du sien et de l'observer. « J'imagine que c'est le moment de te faire sortir d'ici... » L'idée ne l'enchante pas du tout, mais il le faut. Il est en danger ici et même si c'est risqué de sortir du tipi, c'est la seule option possible. « Il est hors de question que je te laisse franchir le campement seul et comme je le connais beaucoup mieux que toi, je vais t'accompagner, jusqu'à ce que tu en sois sorti. » Cha'kwaina, elle ne veut pas le laisser seul, car si par malchance les siens réussissaient à mettre la main sur lui, elle voudra le savoir. Et si tel est le cas, ils se rendront vite compte qu'elle est de son côté, mais c'est le risque à prendre. Elle préfère ça à rester seule sous le tipi à se faire un sang d'encre pour lui. Et si l'idée ne l'enchante pas, elle s'en fiche bien, elle ne compte pas mettre une croix dessus.
Ils discutaient des personnes importantes dans leur vie, assez pour qu'ils leur confient une vérité difficile à entendre, lorsque quelqu'un vint les interrompre. Tel un voleur, Jud dut disparaître. Il se faufila plus ou moins habilement sous la couche de Cha et espéra que l'indienne ne fasse pas entrer et inspecter en détails son tipi. Elle était bien assez intelligente pour ne pas faire une chose comme ça mais les soupçons devaient planer sur elle depuis leur dernier baiser devant une poignée des siens. Dès que l'importun s'en fut allé, Jud se releva et accueillit la belle entre ses bras. C'était une tâche ingrate et compliquée que de se retrouver rien que tous les deux, le poussant à aller jusqu'à s'étendre sous le lit de l'indienne. Ce genre de situations inédites l'amusaient tout de même, au fond. C'était risible de voir tout ce qu'ils devaient mettre en oeuvre. Mais au final, ça en valait la peine.
L'heure n'était malheureusement plus aux étreintes. Les indiens allaient paniquer de ne pas le trouver et de ne pas savoir s'il avait quitté le camp ou pas. D'ici quelques instants, toute la tribu serait en alerte et les choses se compliqueraient. Jud questionna donc Cha'kwaina sur un vêtement à capuche lui permettant de diminuer les risques. Elle l'embrassa une dernière fois avant de s'éloigner vers une armoire dont elle extirpa une cape. Le pirate acquiesça d'un grand hochement de tête positif. Ce serait parfait pour se glisser dans la pénombre sans attirer le regard. Cha revint alors vers lui, Jud l'amena contre son torse et caressa du bout des doigts son beau visage au teint halé. L'indienne lui susurra alors des paroles désagréables. C'était le moment. Il devait partir.
- Oui, il faut que j'y aille.
Cha enchaîna tout de suite, refusant d'abandonner Jud à son triste sort. Le pirate secoua négativement la tête et captura le visage de sa belle entre les mains, la fixant droit dans les yeux. Ensemble, ils risquaient beaucoup plus d'attirer le regard. Il valait mieux ne pas prendre le risque, d'autant plus que l'homme ne se le pardonnera jamais si la Piccaninny s'attirait le courroux de toute sa tribu pour l'avoir aidé et l'avoir côtoyé. Il ne pouvait laisser faire.
- Ensemble, on se fera tout de suite repérer. Surtout que les tiens savent qu'il y a des chances que je sois avec toi, ils sont loin d'être idiots. Si tu veux vraiment m'aider, cours dans la direction opposée à la mienne et attire l'attention comme tu le peux. Mais reste discrète, emmène-les sur une mauvaise piste sans que ça ne soit trop flagrant. Le reste, je gère.
Il vint déposer ses lèvres sur celles de Cha'kwaina, l'embrassant cette fois avec plus d'intensité car c'était le tout dernier moment d'intimité qu'il leur restait. Ses bras la serrèrent contre lui et il se recula ensuite, tenant la main de la belle dans la sienne jusqu'à ce qu'il ne le puisse plus. Le pirate rabattit alors le capuchon sur sa tête et se retourna une dernière fois vers la Piccaninny pour s'assurer qu'elle ne le suivrait pas et qu'elle suivrait le plan.
- Ne t'en fais pas, je vais m'en sortir. Quand je serais dehors, j'allumerai un feu à la lisière de la forêt. Quand tu verras la fumée s'élever dans le ciel, tu sauras que j'ai quitté le camp.
Jud revint rapidement vers la demoiselle et l'embrassa une ultime fois, filant ensuite aussi vite que possible. Le camp Piccaninny était animé, les indiens sortaient de leur tipi mais heureusement tout le monde n'était pas encore au courant. Beaucoup avaient simplement compris que quelque chose ne se passait pas comme prévu mais ne savaient pas exactement quoi. Jud profita de la confusion pour avancer sans se faire repérer, restant dans la pénombre, évitant les allées trop peuplées. Il fut parfois contraint de rentrer dans un tipi, priant pour qu'il soit vide. Par chance, ce fut à chaque fois le cas. Enfin, l'homme arriva aux portes du camp et dès que ce fut fait, il piqua un sprint comme un forcené en oubliant toute discrétion. Fonçant droit vers la forêt, le pirate se mordit la lèvre inférieure en tentant d'ignorer l'horrible douleur qui lancinait tout son corps.
Epuisé, vidé de ses dernières forces, Jud arriva dans la forêt. Aucun bruit, aucun cri, aucun hurlement de guerre indien. Le pirate se recroquevilla au sol et rassembla quelques branchages auxquels il mit feu puis il le nourrit avec un peu de verdure et quelques brindilles. A peine assez pour qu'une fine colonne de fumée ne commence à s'élever dans le ciel. Cha'kwaina verrait peut-être le message. Il l'espérait, en tous cas.