Le regard de la jeune femme soutient celui de son aînée. Emérya, elle a tendance à se soumettre à sa mère et à ses ordres, mais elle en a marre. Si elles avaient une relation normale et saine, la brune pourrait se confier à sa mère, elle pourrait lui dire où elle va, sans se cacher. Cependant, elles n'ont pas ce genre de relation, Rheïane est trop dure avec elle, trop sévère et elle lui empêche de faire ce qu'elle désire, par peur de la perdre. Emérya, elle a l'impression d'être une enfant dans le corps d'une adulte, car si son physique a évolué, elle a l'impression que ses pensées ne le peuvent pas. Comment peut-elle découvrir la vie d'adulte alors qu'on la traite comme une gamine ? Elle n'en peut plus qu'on lui dicte quoi faire, elle n'en peut plus de lui obéir comme s'il le fallait. Elle aime sa mère, elle la respecte, mais ça devient trop lourd pour elle et elle ne gère plus la situation. Elle sait que sa mère ne veut pas mal faire et peut-être Rheïane ne se doute-t-elle pas du mal qu'elle fait à sa fille en la surprotégeant ?
Aujourd'hui, la plus âgée des deux femmes est arrivée de justesse pour venir en aide à sa fille. Maintenant, elle lui reproche d'être venu en ville, sans sa permission et elle a cet homme malfaisant pour exemple afin de lui montrer que la Cité est dangereuse. Si Emérya n'était pas venu à Blindman's Bluff, jamais elle aurait croisé cet homme et jamais il ne l'aurait attaquée afin d'obtenir quelques pièces d'or et peut-être plus. Elle n'est pas idiote, Emérya, même si sa mère essaie de l'enfermer dans ce cocon de protection, elle connait les dangers de la ville et de toute l'île Imaginaire. Malgré ça, elle ne peut pas s'empêcher de vivre, elle ne peut pas rester encabaner, par peur de rencontrer des personnes mauvaises.
La belle brune n'a jamais su affronter sa mère plus que quelques minutes, mais en ce moment, elle éprouve la force de lui dire ce qu'elle pense, ce qu'elle ressent. Elle n'a pas envie de la laisser l'engueuler sans rien dire, sans rien faire. Ainsi son regard soutient le sien, Emérya elle fixe sa mère sans broncher. Elle sait au regard de son aînée que le flot de sermons s'en vient et qu'elle n'y échappera pas, c'est pourquoi elle parle avant sa mère. « Je sais ce que tu vas me dire et je n'ai pas besoin de l'entendre. Je ne suis plus une fillette, tu n'as pas à me faire la morale. » Son ton est ferme, elle reste forte, elle se veut sérieuse. Elle n'a pas envie qu'une dispute éclate, mais elle sait que c'est inévitable. Peu importe ce qu'elle dira, sa mère va détruire ses arguments, le sien étant beaucoup plus valable à ses yeux. Elle a besoin qu'on lui ouvrent, elle a besoin d'entendre la vérité. Emérya, elle n'est plus cette gamine qu'elle a élevée, elle est cette adulte qui tente d'apparaître dans le monde des grands. Et si par le passé elle a laissée sa mère lui dicter quoi faire, aujourd'hui elle n'en a plus envie. Elle désire se tenir sur ses pieds et lui prouver qu'elle n'est plus une enfant.
Partie de la maison par la mer en lançant mon enfant seule dans notre demeure je n’imaginais pas qu’elle me désobéirait, pourtant c’est ce qu’elle a fait. Chanceuse ou malchanceuse, je croisais mon enfant dans les rues de Blindman alors que je sortais de la demeure d’un homme que je venais de croiser et avec qui j’avais passé un moment agréable. De bonne humeur, oui, je l’étais jusqu’à apercevoir la silhouette menue de ma fille se promenant sans mon autorisation dans cette cité qui pour elle représentait plus un danger qu’une simple promenade sur notre plage. Les hommes sont tous dangereux à mes yeux et pour ma fille, elle est trop innocente, elle ne sait pas se défendre et encore moins contre la ruse et la violence de ce monde. J’en suis sans doute en partie responsable, mais je peux me permettre de la perdre bêtement. Contrariée, je prends tout de même le temps d’observer ses mouvements sans intervenir dans cette promenade interdite. Que fera-t-elle si je la laisse rentrer à la maison, me mentira-t-elle ? L’osera-t-elle seulement ? Rien que l’idée me fait hérisser le duvet de ma chair. Telle une ombre, je prends le parti de ne pas me faire voir d’elle et lorsqu’elle sort enfin de la ville, je suis ses pas avec prudence. Sur le chemin vers notre maison, un homme sort de la forêt, ses petits yeux vicieux et avides se posent sur mon enfant, il lui parle tout d’abord, s’approchant…bien trop près. Mon cœur de mère est en alerte, je sais qu’il lui veut du mal, que pourrait-il lui vouloir d’autre, pourtant, je me contrôle, je ne veux pas intervenir, sans doute pour lui donner une leçon. Seulement, l’homme vient à la menacer d’un couteau, la pointant sur son cou et je ne peux laisser les choses aller plus avant. Je sors du tapis de végétation qui cachait ma présence sans que l’homme ne me voit, Emérya a juste le temps de m’apercevoir qu’un craquement sinistre retentit, je viens de briser la nuque de ce voleur, de cet humain malveillant. Son corps retombe lourdement sur le sol terreur, je le mire un instant, le délaissant très rapidement pour croiser les pupilles craintives de mon enfant. Je suis en colère, elle peut le sentir. Pourtant, quelque chose change, elle me défit, nos regards s’affrontent, une chose qui ne s’est jamais produite avant ce jour. Mes yeux se plissent, j’entrouvre mes lippes, mais ma fille me coupe dans mon élan prenant la parole.
Emerya : Je sais ce que tu vas me dire et je n'ai pas besoin de l'entendre. Je ne suis plus une fillette, tu n'as pas à me faire la morale.
Surprise oui, je le suis. Ma colère contre son acte inconscient est pourtant bien présente, dans chaque pore de ma peau, dans mon regard, elle le sent, j’en suis certaine. C’est sans doute la raison de son agressivité envers moi. Mon sourcil s’arque, la mirant toujours, avant de détourner mon regard du sien, tout en faisant quelques pas sur sa droite. « Vraiment ? Tu n’es plus une fillette ? Sais-tu te battre ? Comment allais-tu seule mettre à terre un homme deux fois plus puissant que toi ? Je serai curieuse d’apprendre ta version, mais je t’en prie, Chérie…Donne-la-moi ? Car… » Je lève un index vers le ciel, faisant semblant de réfléchir à ce qu’elle vient de dire. « Si tu ne veux pas que je te fasse la morale, c’est que tu sais que tu as fait une chose qui n’est pas bien ? Une erreur…une bêtise…craindrais tu que je te réprimande pour m’avoir désobéis et pire encore…mentis ! Ta réaction, chérie, ma douce enfant que je chéris, est celle d’une enfant prise en faute et tout ce que tu pourras me dire ne changera pas le fait que tu ne devrais pas être ici et que sans moi, cet homme t’aurait blessé d’une manière que tu n’imagines pas ! Qu’il t’aurait sans doute ôté la vie, glaçant le sang qui coule dans tes veines et cela ! M’est…INTOLÉRABLE ! »
Les iris de la jeune sirène ne se détachent pas du visage de la femme qui se tient devant elle, visiblement en colère. « Vraiment ? Tu n’es plus une fillette ? Sais-tu te battre ? Comment allais-tu seule mettre à terre un homme deux fois plus puissant que toi ? Je serai curieuse d’apprendre ta version, mais je t’en prie, Chérie…Donne-la-moi ? Car… » Rheïane lève un index au ciel, l'air de réfléchir, sans toutefois le faire, avant de continuer. « Si tu ne veux pas que je te fasse la morale, c’est que tu sais que tu as fait une chose qui n’est pas bien ? Une erreur…une bêtise…craindrais tu que je te réprimande pour m’avoir désobéis et pire encore…mentis ! Ta réaction, chérie, ma douce enfant que je chéris, est celle d’une enfant prise en faute et tout ce que tu pourras me dire ne changera pas le fait que tu ne devrais pas être ici et que sans moi, cet homme t’aurait blessé d’une manière que tu n’imagines pas ! Qu’il t’aurait sans doute ôté la vie, glaçant le sang qui coule dans tes veines et cela ! M’est…INTOLÉRABLE ! » Emérya, elle ne bronche pas, elle écoute les paroles de sa mère, attendant qu'elle finisse ses réprimandes. Elle déteste l'ambiance qui règne entre sa précieuse mère et elle-même. Elle déteste s'énerver et énerver sa chère mère, mais aujourd'hui, elle doit prendre sa vie en main, elle doit cesser d'être cette enfant que Rheïane veut conserver à tout prix. Aussi bien l'enfermer dans une bulle, tant qu'à y être ! Les paroles de sa mère pourraient lui glacer le sang dans les veines, lui rappeler qu'elle ne sait pas se défendre et que sa mère l'a sauvée d'une mort certaine, mais plutôt que ça, elle sent la colère qui gronde.
« Si je réagis comme une enfant, c'est parce que tu me traite comme telle ! Tu ne me laisse pas voler de mes propres ailes. Tu ne me laisse pas vivre la moindre expérience ! Tu m'enferme dans ce cocon de protection en disant que c'est pour mon bien, alors que c'est pour le tien ! » Emérya, elle secoue vivement la tête. Habituellement, elle aurait déjà cédée, mais en ce moment, elle se tient fermement sur ses pieds, droite devant sa mère, à lui dire ce qu'elle pense réellement. Elle l'aime de tout son être, mais elle n'en peut plus de cette relation malsaine. Alors qu'elle prend une courte pause entre deux phrases, Rheïane entrouvre les lèvres pour parler, mais la jeune sirène la coupe avant qu'elle ne prononce le moindre mot. « Attends, je n'ai pas terminée... Je sais que tu ne veux pas me perdre, mais à tenter de me conserver de la sorte, tu vas me perdre ! Je me sens emprisonner... un enfant de douze ans a plus de liberté que moi ! C'est malsain, maman. » En ce moment, elle gère cette colère qui grimpe en elle, elle la contrôle du mieux qu'elle le peut. Elle ne veut pas lui donner raison, si elle réagit comme une enfant, c'est parce qu'elle la pousse à bout. Si elles avaient une relation normale et saine, Emérya n'aurait pas à réagir de la sorte. Elle n'aurait pas l'impression d'être un oiseau à qui on a coupé les ailes. Elle n'aurait pas l'impression d'être une gamine dans le corps d'une femme. Elle pourrait être mariée, avant un enfant peut-être. Plutôt que ça, elle est une jeune femme de dix-neuf ans qui ne connait pas grand chose à la vie. Une jeune femme de dix-neuf ans qui cherche à découvrir le monde qui l'entoure et toutes les merveilles qu'il contient. Elle sait que la vie n'est pas toute rose, que des gens mauvais existent, mais elle veut découvrir toutes les facettes du monde par elle-même.
En ce moment, Emérya se sent plus forte que jamais. Si elle flanche à chaque fois dans ses tentatives de discussion avec sa mère, à cet instant, elle ne flanche pas. Emérya, elle ne détourne pas les yeux, elle ne le veut pas. Elle veut lui prouver qu'elle ne rigole pas, qu'elle en a assez, que ça ne peut plus durer. Elle veut une relation saine, elle veut une relation normale, comme celles qui unit les mères et les filles qu'elle connait. La sirène ne veut pas se séparer de sa mère, elle veut tout simplement créer un léger faussé entre eux, afin qu'elle lui laisse vivre sa vie. Bien sûr, Emérya, elle a encore besoin de sa mère et de son amour, elle en aura besoin toute sa vie, mais pas à ce prix. Elle doit vivre d'elle-même, elle doit vivre ses propres expériences...
Emerya : Si je réagis comme une enfant, c'est parce que tu me traite comme telle ! Tu ne me laisse pas voler de mes propres ailes. Tu ne me laisse pas vivre la moindre expérience ! Tu m'enferme dans ce cocon de protection en disant que c'est pour mon bien, alors que c'est pour le tien !
Mon enfant le sera toujours et même si je suis consciente de ce que je fais avec elle, elle ignore quels dangers pourraient la menacer, pire encore, elle ne sait pas ce que moi, j’ai pu vivre pour réagir avec elle de cette manière. Nous sommes tous victimes de notre passé, je n’étais pas ainsi avec lui…lui était mon trésor et je lui laissais même le loisir de plonger dans l’océan sans aucune surveillance. Lui que je n’ai jamais pu soustraire à mon cœur de mère…J’ouvre la bouche, non pour crier, car je viens d’être assaillie par des sentiments bien plus forts que cette simple dispute. Emérya me coupe, elle a visiblement bien des choses à me reprocher.
Emerya : Attends, je n'ai pas terminée... Je sais que tu ne veux pas me perdre, mais à tenter de me conserver de la sorte, tu vas me perdre ! Je me sens emprisonner... un enfant de douze ans a plus de liberté que moi ! C'est malsain, maman.
La perdre, des mots qui résonnent fortement en moi depuis que j’ai su que je portais de nouveau un enfant. Elle n’imagine pas combien, je m’étais perdue avant qu’elle n’arrive dans ma vie. Elle ignore ce que j’ai fait et qui j’ai pu être, elle ne connait que la mère aimante et bien trop possessive. Ne voit-elle en moi que cela ? J’ai été jadis également une femme sirène, mais plus encore, une meurtrière, je tuais sans discernement, j’ai sans doute fait bien plus de mal à certaines familles que je ne lui en fais à elle maintenant. Mon visage se ferme, j’aime mon enfant du plus profond de mon âme, il m’est intolérable de l’entendre me reprocher tout ce que j’ai fait pour elle ! Elle veut de la liberté, elle veut vivre sa vie…oui…et bien que cela m’arrache le peu d’humanité qu’il me reste aux tréfonds de mon cœur, je m’apprête à faire une chose qui va définitivement modifier mon existence. « Soit…tu veux ta liberté, vivre ta vie ! Alors, fais-le ! Je ne t’en empêcherai plus, tu as ma parole. » Je m’approche d’elle, la mirant avec un regard qui pourrait sembler menaçant et peut-être au final qu’il l’est. « Tu me reproches d’avoir été une mère et tu penses que mes efforts pour te garder en vie étaient inutiles ! Tu oses me jeter au visage tous les sacrifices que j’ai faits pour toi ! Tu ne sais pas de quoi tu parles ! Tu ne sais même pas qui je suis vraiment, car tu n’as été qu’une petite ingrate au final ! Sors de ma vie, Emérya ! Va, voyage, prends le large et ne revient qu’une fois que tu auras compris cette vie que tu veux tant découvrir ! Sache juste qu’à ton retour…ce n’est plus ta douce mère que tu retrouveras ! Tu viens de me briser à jamais, et j’ai grande peine pour toi, qui penses détenir la clé de l’existence ! Fais ton choix et fait le maintenant ! »
Je suis particulièrement dure, en réalité, je ne veux pas qu’elle parte, je l’aime bien trop et je sais également que la laisser partir est une erreur, bien entendu que je serai toujours auprès d’elle et que je l’aimerai, comme elle le mérite. Seulement, je suis en colère, pas seulement, contre elle, mais surtout contre moi, qui n’est pas su voir ce qu’il se passait pour elle. Je suis la première à donner des conseils sur la liberté de chacun et avec elle, j’en ai été incapable. Aveuglée par cette crainte de la perdre et de me perdre par la même occasion. Comme je regrette déjà mes paroles et à voir le visage de mon enfant, je le regrette encore plus. « Attends ! » Avant qu’elle ne donne sa décision, je viens l’étreindre fortement, laissant couler mes larmes silencieuses, mais lorsque je veux reprendre la parole, ma voix se brise par l’émotion qui émane de moi. « Je t’aime Emérya, tu es la plus merveilleuse des choses qui me soient arrivées. Oui, je suis sans doute trop protectrice, je le sais…Mais…j’ai mes raisons et peut-être qu’un jour, je trouverai le courage de te raconter qui je suis, qui j’ai été…Pardonne moi, mon ange…pardonne à une mère qui ne pourrait pas vivre en sachant que son enfant, la prunelle de ses yeux à trouver la mort…Je ne me le pardonnerai pas une seconde fois… »
Le visage de l'ainée se ferme et aussitôt Emérya, elle sait qu'elle a touchée une corde sensible. D'ailleurs c'est ce qu'elle cherchait à faire, sans toutefois chercher à la blesser. « Soit…tu veux ta liberté, vivre ta vie ! Alors, fais-le ! Je ne t’en empêcherai plus, tu as ma parole. » Emérya, elle reste debout, ses yeux posés dans ceux de sa mère. Elle sent son corps qui tremble sous le stress et l'émotion, mais elle ne veut pas la délaisser du regard, même malgré l'air menaçant maintenant présent sur le visage de sa mère. « Tu me reproches d’avoir été une mère et tu penses que mes efforts pour te garder en vie étaient inutiles ! Tu oses me jeter au visage tous les sacrifices que j’ai faits pour toi ! Tu ne sais pas de quoi tu parles ! Tu ne sais même pas qui je suis vraiment, car tu n’as été qu’une petite ingrate au final ! Sors de ma vie, Emérya ! Va, voyage, prends le large et ne revient qu’une fois que tu auras compris cette vie que tu veux tant découvrir ! Sache juste qu’à ton retour…ce n’est plus ta douce mère que tu retrouveras ! Tu viens de me briser à jamais, et j’ai grande peine pour toi, qui penses détenir la clé de l’existence ! Fais ton choix et fait le maintenant ! » Si son corps tremblait déjà, les paroles ne sa mère ne font qu'empirer ces tremblements. À présent, c'est la colère qui anime le corps de la jeune sirène, la colère, la tristesse et une vive douleur. Elle ne lui reproche pas d'avoir été une mère, elle lui reproche d'avoir été une mère contrôlante. Elle ne doute en rien de l'amour de sa mère pour elle, car elle sait à quel point elle l'aime et cet amour est partagé. Ce qu'elle lui reproche c'est de l'emprisonner, l'empêcher de vieillir, de s'épanouir. Elle ne veut pas la quitter, elle veut tout simplement qu'elle lui laisse de la liberté, qu'elle lui laisse faire ses propres choix.
Elle n'a pas envie de partir, elle n'a pas envie d'écouter sa mère, mais elle n'a pas envie de réagir comme un enfant, elle n'a pas envie de s'excuser et de venir se cacher sous ses jupons. Un instant mitigée, son visage passe de la colère à la tristesse, mais Emérya, elle reste forte malgré les larmes qui tentent de s'échapper de ses yeux. Elle les ravalent et secoue la tête, s’apprêtant à parler, mais cette fois c'est Rheïane qui l'a coupe avant qu'elle prononce le moindre mot. « Attends ! » Sa mère s'approche et passe ses bras autour d'elle venant l'étreindre avec force. Les membres qui tremblent toujours, cette boule qui lui noue la gorge, elle n'arrive plus à retenir ses larmes. Elle ne veut pas perdre sa mère, elle est la personne qui lui importe le plus dans ce monde. Tout ce qu'elle désire c'est un peu de liberté. Elle veut avoir l'impression d'être une femme et non une gamine. « Je t’aime Emérya, tu es la plus merveilleuse des choses qui me soient arrivées. Oui, je suis sans doute trop protectrice, je le sais…Mais…j’ai mes raisons et peut-être qu’un jour, je trouverai le courage de te raconter qui je suis, qui j’ai été…Pardonne moi, mon ange…pardonne à une mère qui ne pourrait pas vivre en sachant que son enfant, la prunelle de ses yeux à trouver la mort…Je ne me le pardonnerai pas une seconde fois… » La jeune naïade échappe ses larmes, elle n'a plus aucun contrôle sur elles, ni sur son corps qui tremble toujours davantage. Elle se blottit contre sa mère, ses bras l'entourant à son tour.
« Maman... » Cette fois, c'est sa voix à elle qui se brise, mais elle continue sans tenter de cacher l'émotion qui s'échappe d'elle. « Tu sais bien que je t'aime aussi. Et je ne veux pas te perdre, je ne veux pas te quitter. Tout ce que je désire, c'est avoir l'impression d'être une femme et non une fillette. Je sais que tu as tes raisons de me surprotéger, mais j'ai également mes raisons de vouloir un peu de liberté...» Emérya, elle se retire doucement de cette étreinte et vient prendre le visage de sa mère en coupe entre ses deux mains. Ses deux grands yeux bleu noyés de larmes l'observent à quelques centimètres d'elle. « J'ai dix-neuf ans maman, je sais que je suis encore jeune, mais je ne suis plus une enfant. Je serai toujours ton enfant et j'aurai toujours besoin de toi, peu importe mon âge. Tout ce que je désire, c'est un peu de liberté. J'ai besoin de prendre mes propres décisions, m'imposer mes propres limites. Ça et ne pas te perdre. Je veux combiner les deux, maman. » Elle étire un léger sourire, tout en continuant de la fixer avec intensité. Les émotions traversent son visage, elles sont multiples, elles sont vives. Elle ne veut pas la perdre et elle espère qu'elle la comprendra.
Je sens ses mains se cramponner à moi, son corps trembler près du mien. Je l’aime, elle est ma chair et mon sang, elle est mon humanité et ma raison d’être la mère aimante que je suis. Mes mots ont été durs, la colère m’aveuglait, comment ai-je pu me montrer aussi vindicative avec l’enfant qui a grandi au fond de mon âme.
Emérya : Maman... Tu sais bien que je t'aime aussi. Et je ne veux pas te perdre, je ne veux pas te quitter. Tout ce que je désire, c'est avoir l'impression d'être une femme et non une fillette. Je sais que tu as tes raisons de me surprotéger, mais j'ai également mes raisons de vouloir un peu de liberté...
La chaleur de l’étreinte se transforme en froideur dans mon cœur, ses yeux si semblables aux miens viennent se poser dans mes prunelles tout aussi humides que les siennes. J’y vois de l’amour, certes, mais pas que cela. Je sais depuis bien longtemps qu’elle n’est plus une enfant, à son âge j’avais moi-même quitté mes parents et ma famille, mais j’étais plus mature que ne pouvait l’être mon petit trésor. Ma croissance avait stagné pendant un temps certain, elle…non. Elle avait grandi d’un coup, espérant peut-être trouver cette liberté qu’elle revendiquait à présent face à moi.
Emérya : J'ai dix-neuf ans maman, je sais que je suis encore jeune, mais je ne suis plus une enfant. Je serai toujours ton enfant et j'aurai toujours besoin de toi, peu importe mon âge. Tout ce que je désire, c'est un peu de liberté. J'ai besoin de prendre mes propres décisions, m'imposer mes propres limites. Ça et ne pas te perdre. Je veux combiner les deux, maman.
Comment ne pas se montrer touchée par une telle déclaration, par le courage qu’elle montre et sa franchise qu’elle démontre dans ces paroles. J’ai la sensation que cela fait longtemps que mon enfant se refrène à me dire les choses. J’en suis bouleversée et je me rends bien compte que tout est de ma faute, pas de la sienne. Mes paumes viennent se superposer à ses mains sur mon visage. Je les retire une à une…embrassant la dernière avec un léger sourire. « Il y a des choses que je t’ai toujours caché…des choses qui te concernent, d’autres indirectement…Je t’aime ma chérie, plus que je ne pourrais jamais plus aimer un être vivant. Je veux que tu saches que, jamais, je n’ai voulu te faire souffrir ou te faire le moindre mal et si cela a été le cas, je le regrette profondément. J’entends tes paroles, mais si je reste auprès de toi, je sais que je ne pourrai pas tenir la promesse de liberté que tu souhaites tant obtenir » Les perles salées qui s’écoulent de mes yeux viennent progressivement faire leur chemin sur mes joues rosies par les émotions de cette conversation. « J’ai besoin de partir…de m’éloigner…je ne serais pas loin de toi, jamais…je te laisse la maison, fais attention à toi…Ne te laisse pas guidé par tes sentiments uniquement et trouve la force que tu demandes au fond de ton âme. Prends cette liberté que je t’offre pour un temps, car de mon côté, il m’est cruellement impossible de te dire avec certitude et véracité si je pourrai me défaire de mes démons qui me hantent et qui te retiennent prisonnière de mon amour maternel. Je préfère être seule pour y réfléchir et je te promets que je reviendrai promptement » je m’approche de ma douce Emérya, déposant un baiser sur son front. Une caresse sur sa joue, ma main qui ne veut pas quitter sa chair, mais il le faut. Je me retourne, laissant à nouveau les larmes couler encore un peu avant de revêtir un masque de froideur qui est ma seule et unique protection en ce monde qui m’a déjà bien trop pris. Ainsi, je laisse ma fille sans doute juste pour un jour, peut-être deux ou trois…peut-être plus…Mon cœur est douloureux, comme mes larmes sont de feu.
Emérya, elle sait combien sa mère l'aime, mais elle souffre de cet amour. Elle l'aime au point où elle l'empêche de s'épanouir, elle l'aime au point où elle l’emprisonne. Si elle en avait eu la capacité, elle aurait sûrement préservée son corps tel celui d'un enfant perdu, pour que jamais elle ne grandisse. Du moins, voilà l'idée que ce fait la jeune naïade de l'amour que lui porte sa mère. C'est pourquoi Emérya, elle cherche désespérément à se sortir de ce cercle vicieux. Plus elle continue de faire comme si tout allait bien, comme si l'emprise de sa mère sur elle lui convenait, plus elle entretient cette relation et plus elle continue de vouloir s'en libérer. La sirène aime sa mère, elle n'a qu'elle dans ce monde, mais elle désire partager sa génitrice et la liberté qu'elle a besoin d'obtenir. Elle ne veut pas les deux séparément, elle désire obtenir les deux, elle veut qu'elles forment un tout. C'est ce qu'elle essaie de faire comprendre à sa mère et elle espère qu'elle saura enfin l'entendre, qu'elle pourra enfin comprendre.
Les paumes de l'aînée se posent sur les mains de la jeune naïade. Elle les retirent doucement, venant embrasser la dernière avec un léger sourire. « Il y a des choses que je t’ai toujours caché…des choses qui te concernent, d’autres indirectement…Je t’aime ma chérie, plus que je ne pourrais jamais plus aimer un être vivant. Je veux que tu saches que, jamais, je n’ai voulu te faire souffrir ou te faire le moindre mal et si cela a été le cas, je le regrette profondément. J’entends tes paroles, mais si je reste auprès de toi, je sais que je ne pourrai pas tenir la promesse de liberté que tu souhaites tant obtenir » Emérya, elle n'a pas besoin d'une promesse, elle veut tout simplement que sa mère tente de faire des efforts. Elle sait très bien qu'elle n'a jamais voulu la faire souffrir et d'ailleurs, Emérya n'en a jamais vraiment souffert, jusqu'à maintenant. Seulement, ça devient de plus en plus lourd, cette impression d'être toujours une gamine, malgré les années qui passent. Emérya, elle a toujours su que sa mère lui cachait des choses, sans toutefois savoir de quoi il s'agissait et aujourd'hui encore, elle pique sa curiosité. Toutefois, elle sait qu'elle ne lui dira rien et Emérya, elle respecte ce choix.
« J’ai besoin de partir…de m’éloigner…je ne serais pas loin de toi, jamais…je te laisse la maison, fais attention à toi…Ne te laisse pas guidé par tes sentiments uniquement et trouve la force que tu demandes au fond de ton âme. Prends cette liberté que je t’offre pour un temps, car de mon côté, il m’est cruellement impossible de te dire avec certitude et véracité si je pourrai me défaire de mes démons qui me hantent et qui te retiennent prisonnière de mon amour maternel. Je préfère être seule pour y réfléchir et je te promets que je reviendrai promptement. » La naïade observe sa mère de ses grands yeux, encaissant ce qu'elle vient de lui dire. Elle a besoin de s'éloigner... mais pour combien de temps ? La sirène l'ignore et elle cherche à lire dans les iris de sa mère. Rheïane, elle s'approche de sa fille, son trésor et dépose un baiser sur son front, caresse sa joue avec douceur. Emérya, elle n'a pas envie de voir sa mère partir, mais elle a l'impression qu'elle n'a rien à dire pour la retenir. Si elle ressent le besoin de s'éloigner, de réfléchir, elle en a le droit. Et peut-être qu'à son retour, ça lui permettra de voir que sa fille est toujours là, bien vivante, malgré son absence. La naïade se raccroche à ça, alors que sa mère la délaisse et s'éloigne d'elle. Elle garde un parfait silence, elle n'a rien à ajouter, elle ne murmure qu'un silencieux je t'aime, alors qu'elle la regarde s'éloigner. Ses yeux s'embuent à nouveau de larmes. C'est sans doute un nouveau chapitre qui commence, du moins elle l'espère.