Pouet dans la bouette

feat. Sissy et Feisty

Ce matin : chasse ! Ross était allé réveiller Feisty aux aurores pour qu’ils puissent chercher de quoi manger. Le gamin n’avait pas dormi de la nuit tellement son ventre gargouillait, et il n’y avait plus rien à se mettre sous la dent à l’arbre du pendu… Disons que depuis les précédentes disparitions, très peu d’enfants quittaient le camp… Tous avaient peur d’être le prochain sur la liste, d’être le prochain à être enlevé… Est-ce Ross avait peur ? Oui, un peu… Il en parlait le soir avec sa petite fée, lorsqu’il était certain que personne ne pouvait l’écouter. Lilou, c’était la seule a qui i se confiait, la seule avec qui il était doux et gentil. Sa petite fée d’amour, sa meilleure amie. Devant les autres ? Ross faisait son gros dur. Monsieur prétendait n’avoir peur de rien. C’était trop dur d’admettre qu’il n’était pas rassuré, vous imaginez ? Lui, perdre son image de dur à cuire ? Même pas en rêve, le petit soldat de Rufio y tenait bien trop à son image ! 
Voilà comment expliquer pourquoi le ventre de Ross criait famine et comment il s’était retrouvé en forêt ce matin-là !


« Plus vite face d’citrouille ! Pouaaaah comment t’es nul ! » Hurlait le gamin, alors qu’il courrait à travers les branchages. Ross était en pleine partie de chasse et voilà qu’il avait décidé de pimenter un peu les choses. Le jeune garçon avait décidé de lancer un petit défi à Feisty qui l’accompagnait dans sa partie de chasse : une course a travers la forêt ! Le premier qui arrivait au terrier de blaireau à l’autre bout allait être le gagnant ! L’autre gamine avait accepté, et ils étaient maintenant tous les deux en train de courir pour gagner ! « S’tu perds, tu f’ras mes corvées toutes la s’maine ! ». Il était fier de lui le gamin, car il était en tête, et sa victoire était à porté de main ! Il se voyait déjà donner des ordres à la Bagarreuse toute la semaine ! Dans sa course, il s’imaginait demander à Feisty d’aller laver les toilettes, d’aller s’occuper des crottes de Groobat autour de l’arbre. Que des choses dégoutantes ! Rien qu’en y pensant, Ross riait ! 

Le gamin était bien plus concentré sur les farces et les crasses qu’il allait pouvoir faire à Feisty que sur sa course maintenant. Ne regardant plus où il mettait les pieds Ross trébucha dans une espèce de filet. En quelques secondes, il se retrouva prisonnier dans les airs. Il se balançait de droite à gauche dans un piège qu’un petit rigolo avait posé ici… May-Lee… Alors qu’il tentait de se retourner pour voir à quelle distance il se trouvait du sol, Ross pestait… « Rah ! Sal’té d’piège ! Comment qu’on sort d’là ?! » C’était, sans aucune doute un piège de la petite May-Lee. Le filet était mal cousu à certain endroit et le mécanisme ressemblait au bricolage de la petite enfant perdue. Ross l’insultait intérieurement alors qu’il se débattait pour pouvoir sortir de là. « Comment qu’ça marche ça ?! Oh puis zut ! Feistyyyyyyyyyyy ! » Le petit blond n’allait pas pouvoir sortir d’ici tout seul… Il lui fallait de l’aide et la personne la plus proche était Feisty… Il regrettait déjà de l’avoir appelé… Il connaissait bien la bagarreuse, elle allait se moquer de lui et être invivable après ça… Il soupira, grognon de sa bêtise et attendit l’arrivée de la brunette, assit, les bras croisés, piégé dans son filet.

Le corps s'étire, la conscience remue. Il y a une voix qui résonne dans le lointain, qui cherche à l'arracher aux bras de Morphée. L'implacable insomnie s'était-elle encore glissée dans la cabane pour venir tourmenter le sommeil fragile de la fillette ? Non. Elle ne s'est pas réveillée seule. Une poigne s'abat sur ses épaules pour la secouer et quelque chose lui chatouille les narines. Un truc qui pue. C'est Ross. Arg ! Il lui parle, la gamine lui répond dans un grommellement. Monsieur a faim. Ah bah voyons ! « Je vais te faire bouffer tes dents t'aura plus faim… » Feisty au réveil, véritable petit printemps de douceur et de tendresse. Elle râle, plaque ses mains sur son visage pour ne plus voir la lumière du jour et Ross qui insiste. Trop tard. Envolé, les dernières bribes de sommeil, la Bagarreuse fait le deuil de sa grasse matinée, la première depuis longtemps. Avec les récents événements, les nuits s'étaient montrées plus cruelles qu'à l'accoutumer, ponctuées de songe terrifiant et de veillées sans fin. Elle finit par se jeter hors de son hamac, plus désagréable que jamais. Son devoir l'appelle.


Ses pieds vengeurs foulent la terre avec précision. À travers les buissons, Feisty s'élance avec toute la fougue d'une gamine déterminée à ridiculiser son adversaire. Ce gros tas de Ross ! Le fuyard s'est tiré devant. Tricheur ! Pas étonnant, avec ses grandes pattes ! Elle, elle n'a que ses petits bouts de jambe pour tenir la route. Mais déjà, Ross disparaît au détour d'un sentier. La brunette redouble d'efforts, en vain. Son soulier rencontre une pierre et elle s'arrête pour buter dedans avec rage. Mauvaise perdante ? À peine. Qu'importe, elle a décrété que Ross ne jouait pas le jeu. Alors, elle aussi va enfreindre les règles. La Bagarreuse rumine, elle ramasse des cailloux qu'elle garde précieusement dans la petite sacoche accrochée à sa ceinture. Des munitions qu'elle destine à ce caca de Zaire de Ross. Comme si elle allait faire ses corvées ! Elle n'avait rien promis du tout d'ailleurs. Et quand c'est pas craché, c'est pas juré. C'est qu'en plus d'être mauvaise perdante, madame s'est levé du mauvais pied. Exacerbée par un réveil désagréable, sa nature colérique est à fleur de peau. Ce petit souffle colérique est à deux doigts de se transformer en cyclone.

Ross va en faire les frais. La fillette suit les cailloux aux hasards, jusqu'à ce que ses pas la ramènent sur le bon sentier. Le terrier du blaireau n'est plus très loin. Un bruissement l'arrête soudainement. « Ross ? » Une voix lui répond, toute proche. « Si tu me fais une blague, je te jure que… » Ses menaces meurent sur ses lèvres, tandis qu'une silhouette accroche son regard. Là, à plusieurs mètres du sol, un paquet se balance. Ross, empêtré dans un piège. Deux mains viennent se plaquer sur la bouche de Feisty pour étouffer un rire. Mais elle n'y arrive pas. Le rire arrive, se coince un instant dans sa gorge, rougit ses joues… Elle explose, hilare. Feisty a le rire facile, un rien l'amuse et la réalité se transforme sous son regard joueur. Voir Ross bouder dans son filet lui semble être la chose la plus amusante du monde. Elle en pleure presque de rire. « T'es tombé dans un piège ! » Qu'elle répète à bout de souffle, entre deux éclats de rire. « Si tu voyais ta tronche ! » Et ça repart de plus belle, son rire sonore meuble le silence de la forêt jusqu'à l'essoufflement. Impossible de s'arrêter. Secouée de spasme incontrôlable, elle recule, à moitié étouffé par son fou rire. Soudain, le rire se coupe, remplacé par un hurlement de surprise. Sa tête se propulse en arrière, ses prunelles s'attardent sur un morceau de ciel et elle s'envole. Emportée par le filet, la voilà à son tour prise au piège. « Nan ! » Elle ne rit plus du tout la Feisty. Ses poings s'agitent contre les mailles du filet, cherchent son arme… Horreur, elle a disparu. Surpris par la tournure des événements, le poignard en est tombé d'étonnement. Un cri colérique s'échappe de la gorge de la fillette. Attrapée comme une débutante ! Elle défoule un instant sa rage contre le malheureux filet, posé au mauvais endroit, au mauvais moment, mais son regard coléreux cherche un autre coupable.

Coupable qui se trouve à ses côtés, dans le filet d'en face. « C'est ta faute ! » s'écrit-elle soudainement. « Oui, c'est ta faute ! Toi, ton ventre et ta course débile ! T'avais qu'à faire comme tout le monde et jouer à l'imagibouffe d'abord ! Espèce de gros ! » Les mailles du filet son, certes, serré, mais assez large pour que la fillette perdue puisse glisser ses jambes à l'extérieur. Et ses jambes brassent de l'air en essayant d'atteindre le filet situé à quelques mètres du sien. Son but, botter les fesses de Ross. Et elle y parvient presque, ses pieds se heurtent à l'autre piège, mais pas assez fort au goût de la môme qui dégaine son arme secrète. Les cailloux. « Ouais ! T'es un gros tas baveux, comment on va descendre maintenant hein ! Sale derrière de Groobatt puant ! » Les insultes s'enchaînent, et les petits cailloux pleuvent.