Malech a cru voir un fantôme lorsqu'il l'a vu apparaître devant ses yeux. Pourquoi maintenant? Pourquoi après tout ces événements? Neisis a été condamné, Zéa couronnait et voila que sa sœur aîné disparu depuis des années pointe le bout de son nez. C'est trop gros, trop louche pour le nouveau monarque. Il ne peut accepter un tel danger et pourtant, il n'a guère le choix. Son épouse est tombée dans le piège de la sirène brune, du moins dans ce qu'il considère comme un piège. Malech a les idées bien arrêtées en ce qui concerne Rheïane. Elle arrive après la guerre pour s'emparer du trône duquel elle aurait dû hériter, et il compte bien percer à jour son secret.
*
« Père! » S'exclame Cyd, fou de joie de voir son paternel de retour après une mission qu'il a exécuté sur la terre ferme.
Le garçon s'élance dans les bras de Malech qui l'enlace aussitôt. Les lèvres du triton s’étirent en un sourire sincère, ravie de voir son fils aussi heureux. Cyd est pour lui un véritable rayon de soleil, une bouffée de chaleur qu'il apprécie beaucoup et qu'il s'évertue à alimenter d'autres sourires. Pour cela, rien de mieux que de lui offrir des présents.
« J'ai quelque chose pour toi fils. » « Ooh! Qu'est ce que c'est? Montrez moi père. » Demande Cyd, paré de son impatience.
Malech glisse malicieusement sa main dans sa besace avant de la retirer doucement et d'en sortir une superbe figurine. Cette dernière est faite d'un métal verdâtre, ressemblant de prêt à la couleur du jade, et représente un majestueux oiseau. Un aigle, sans doute. Cyd la prend précautionneusement entre ses mains afin de l'observer de plus prêt. Ses yeux brillent d'un éclat qui fait fondre le monarque instantanément, il serait capable de répondre à tous les caprices de ce dernier fils.
« Merci père! Il est... il est parfait! Je sais exactement où je vais mettre. » Lance le garçon, fou de joie.
Cyd virevolte d'excitation avant de se précipiter en direction de la demeure royale. Sur le chemin, non loin de là, il croise sa tante et décide sans attendre de lui faire partager le bonheur si simple que vient de lui apporter son père.
« Ma tante regardez. Regardez ce que mon père m'a ramené de la surface. » S'exclame Cyd en lui montrant fièrement le bel objet. « Je vais le ranger avec le reste de ma collection. »
Le petit triton s’éclipse aussi vite qu'il est venu, ne tenant plus en place, aussi vif qu'une anguille chargée d'énergie. Alors que précédemment il souriait, Malech regarde désormais la sirène avec froideur avant de la contourner hautainement afin de rejoindre le château. Elle et lui n'ont pas eu l'occasion de converser en privé depuis son retour, tout bonnement parce que le triton a esquivé toutes les conversations. Il a promit à Zéa de ne pas faire de scandale et, comme tout le monde le sait, Malech est un triton de parole. Cependant, Rheïane le met dans un tel état de nerf et d'angoisse qu'il craint de craquer s’il lui adresse seulement la parole. Alors, faute de quoi, il l'ignore parfaitement. Ne voulant entendre aucunes excuses ; il ne lui pardonnera pas de sitôt d'avoir abandonné sa famille dans de tels moments. C'est inconcevable car, pour lui, la famille est ce qu'il y a de plus important.
Je suis ravie d’avoir retrouvé ma famille, mes racines et même si Emérya manque à mon bonheur, je ne peux pas faire marche arrière pour repartir sur la terre ferme, surtout lorsque Zéa m’a demandé de rester pour elle, qu’elle a besoin de rattraper ce temps qui nous a été enlevé par ma faute. Mais, les choses ne pouvaient être aussi aisément acceptées, Malech, l’époux de ma sœur ne m’aime pas, il me le fait ressentir, je sais ce qu’il pense, il suffit de lire son regard à chaque fois que je tente de renouer avec ma sœur. Par contre, c’est un bonheur que de rencontrer les enfants de ma cadette, cela me fait un tel plaisir que j’en oublie parfois mes propres soucis.
Tandis que je veux retourner vers la surface pour mes affaires, je crois en sortant du palais, mon neveu qui nage rapidement vers moi, me montrant une statuette de bronze oxydée probablement que son père lui a offerte, il faudra que je pense à lui ramener des objets que je connais bien d’en haut, il sera ravi. « Oui, tu ferais bien, il est vraiment magnifique Cyd ! » Je lui caresse la joue alors qu’il s’empresse déjà de retourner vers l’intérieur du grand palais. Comme je le présentais, Malech me contourne, froidement et sans un mot, sans un regard comme si je n’existais pas. Je sais combien cette situation déplait à ma sœur, mais puis-je forcer quelqu’un à m’apprécier, certes non. Mais au moins à m’accepter, ce sera déjà bien. Sans me retourner vers lui, non plus et le laissant prendre de l’avance derrière moi, je me permets juste une remarque, une seule.
« Pourrais-je seulement savoir ce que tu me reproches ? Ou puis-je le deviner si aisément que tu ne trouves pas l’opportunité de m’en parler ? M’ignorer ne fera que contraindre Zéa à se préoccuper, nous sommes deux adultes, les mots devraient au moins être cordiaux…Par ailleurs, je te souhaite le bonjour, Malech, souverain de la mer… » Je fais pivoter mon visage vers sa silhouette toujours de dos et j’attends, voire si mes mots auront un impact, quels qu’ils soient d’ailleurs. Si lui ne veut pas faire l’effort de rapprochement, au moins, je n’aurais pas cela à me reprocher plus tard. Car qu’il ne veuille ou non, je suis ici par la volonté et la demande de ma sœur, et c’est elle qui provient d’une lignée royale, pas lui.