Lorsqu'elle mentionne que personne au campement n'est obligé de savoir ce qu'elle était avant, il laisse échapper un rire, le grand brun. Évidemment qu'il ne le dira à personne ! Elle le sait, Sif, mais c'était une façon de parler, en quelque sorte. « Oh mais je ne comptais pas annoncer ce genre de détails, ne t’en fais pas pour cela. Tu dis avoir laissé ce passé derrière toi, c’est tout à ton honneur et… tu m’en vois le premier ravi... » Ah oui, il en est le premier ravi ? Elle esquisse un sourire, la brune, écoutant la suite de ses paroles. « Personne n’est obligé de le savoir, tu as entièrement raison. Je pensais simplement te présenter aux éventuels curieux comme une vieille connaissance dans le besoin et à Selyne comme.. et bien la même chose. » Elle hoche légèrement la tête, la norvégienne, lui indiquant qu'elle est bien d'accord avec ses paroles. « Il est sans doute difficile d’accorder sa confiance à quelqu’un qu’on a à peine croisé une fois, l’esprit embrumé d’alcool qui plus est.. » Il échappe un nouveau rire et elle sourit de plus belle, Sif. « .. mais tu ne m’as pas donné la moindre raison de douter de toi et tant qu’il en sera ainsi tu seras la bienvenue sous ce toit. Personne n’est parfait en ce monde, Sif, et celui qui se permet de juger un individu sur les erreurs qu’il a commises et non sur ses actes glorieux est un ingrat ce que je me refuse à être. » Voilà qui est encourageant, elle ne pourrait dire le contraire, Sif. Cet homme est différent de tous ceux qu'elle a connu par le passé et c'est sans doute la raison pour laquelle elle le tient rapidement en haute estime. Elle ne dit rien, la brune, elle se contente d'un sourire reconnaissant, parce que c'est ce qu'elle est, reconnaissante. Il l'aide alors qu'il n'est pas obligé de le faire et à un moment ou à un autre, elle trouvera bien un moyen de lui rendre sa gentillesse, Sif.
Il se lève, l'indien et l'incite à venir se poser sur une chaise, ce qu'elle fait, la viking, sans répliquer. Puis à nouveau, il entrouvre les lèvres et il parle, Mataku. Il lui mentionne qu'elle aura quelques règles à respecter, en restant parmi eux. Elle hausse légèrement les sourcils, la brune, tout ne posant ses yeux sur lui, l'air sérieux. Des règles ? Elle a bien hâte d'entendre ça, l'ancienne femme pirate. « [...] Premièrement, on termine son assiette [...] » Elle sourit au reste de ses paroles, la brune. Décidément, lorsqu'il a un message à faire passer, il n'y va pas de mains mortes, Mataku. « Ensuite il y a cette étagère-là [...] » Voilà qui est noté, elle ne risque donc pas d'y toucher, la brune, elle ne voudrait pas s'empoisonner ou l'empoisonner lui ou Selyne. « Rien ne te force bien sûr, à te prêter au jeu avec sérieux, je m’en voudrais de t’imposer de retenir l’utilité de telle ou telle racine si tout ceci ne t’intéresse pas le moins du monde. Mais retenir de quoi donner le change ne devrait pas poser trop de problème. Du moins le temps que tu trouves mieux à faire ici. A moins bien sûr que tu n’ais une autre idée, une autre excuse toute trouvée qui pourrait tout à la fois convaincre les curieux et le chat sauvage endormi à côté. » À nouveau, elle étire un sourire, la brune. C'est qu'il parle beaucoup Mataku ! Heureusement son cerveau à elle a la capacité d'absorber beaucoup d'informations.
« Donc, si j'ai bien suivie, il y a seulement deux règles, ici ? Terminer son assiette et ne pas toucher à cette étagère... Je devrais y parvenir sans trop de difficulté ! » Elle lui sourit, la brune avant de prendre un morceau de fromage. « J'imagine donc que je dois manger, avant de me faire gronder. » Un sourire indélogeable sur le visage, elle se décide enfin à lui faire plaisir, Sif, elle entame son repas. Elle se rencontre qu'elle a faim, la brune, mais ça, elle n'y avait pas songé une seule seconde, au cours des dernières minutes, son esprit était bien trop occupé ailleurs. « Alors, si je prends la décision de rester ici plus d'une nuit... je serai une vieille connaissance à toi qui a eu envie d'apprendre l'herboristerie ? Ça me convient et je veux bien me prêter au jeu, si je reste. Après, ça peut être utile d'avoir quelques connaissances sur les plantes, car à l'heure actuelle, je n'y connais rien du tout. » Si elle reste... sa décision n'est toujours pas prise, alors que lui, il semble facilement accepter qu'elle reste plus longtemps parmi les siens. Demain, elle verra, Sif, au jour le jour, comme d'habitude.
Elle avale une bouchée, la brune, avant de poser un regard sérieux sur lui. « Je ne ferai pas dans l'original, mais encore merci, Mataku. Je m’immisce dans ta vie s'en m'annoncer, alors qu'on se connait si peu et tu acceptes de me venir en aide... Tu es décidément un homme bon, comme j'en ai très rarement croisé durant ma vie... » Elle pense la moindre de ses paroles, la brune. Elle lui est reconnaissante pour son aide, pour sa gentillesse, son hospitalité. Elle sait qu'il se sent redevable envers elle, mais elle sait aussi qu'il n'était pas obligé de tenir parole. S'il accepte de l'héberger, c'est parce qu'il a bon coeur et ce genre d'homme se fait très rare, dans ce monde. Ou du moins, rares sont ceux qu'elle a côtoyés, Sif... Mataku, il est différent et c'est sans doute la raison qui fait qu'elle a confiance en lui et qu'elle se sent bien en sa présence, la norvégienne.
J’ignore ce qui la fait sourire, mon monologue interminable ou les mots en eux-mêmes, mais elle a le sourire contagieux et le mien ne quitte plus mes lèvres. Et c’est pas avec sa plaisanterie sur les deux petites règles que je viens de lui énoncer que les choses vont changer. Moins encore après qu’elle ne se décide enfin à se servir, non sans ajouter une nouvelle pique innocente à mon intention. La gronder ? Pour si peu ? allons donc ! Non, jamais il ne me viendrait à l’esprit de la houspiller pour ça. Mais c’est soulagé de la voir enfin grignoter quelque chose que je me remets à mon.. rangement, si j’ose appeler cela ainsi. Je ne fais que déplacer quelques affaires laissées en vrac çà et là pour lui laisser la place de prendre un peu ses aises et pour ne pas lui laisser croire qu’elle vient de trouver refuge dans le terrier d’un ours. Et tout occupé à cette corvée, je garde une oreille attentive tant à ce qu’elle a à dire qu’au moindre bruit qui pourrait survenir de la pièce à côté. Mon idée semble lui plaire et j’en suis plutôt rassuré. Très franchement, j’avais du mal à entrevoir une autre option qui n’impliquerait pas de devoir dévoiler à ma fille la façon dont l’ancienne pirate et moi nous nous sommes rencontrés. D’une part parce qu’il me faudrait alors lui avouer que je n’ai toujours pas tiré un trait sur ma vengeance malgré ses requêtes incessantes, et puis je ne tiens pas à lui jeter Sif en pâture de la sorte. Quand je parlais de chat sauvage, j’étais bien en deçà de la vérité. La dernière femme a avoir passé cette porte avec sa main dans la mienne n’a plus osé m’adresser la parole depuis qu’elle a subi les furies de Selyne.
Je repose enfin le dernier sac que je déplaçais quand elle se met en tête de me remercier une fois de plus. Moi je secoue brièvement la tête de gauche à droite tout en m’adossant bras croisés à l’étagère que je citais plus tôt. Allons, allons, je lui en devais une, et puis… quel genre d’homme refuserait d’aider une femme qui vient frapper à sa porte en réclamant de l’aide ? Bien trop sur cette ile j’en ai peur. Cette constatation me tire un frisson glacial qui me parcourt l’échine. Si j’ai confiance en mes semblables, je ne peux en dire autant des autres habitants de cette île. Et connaissant ma fille, elle ne restera pas parmi les nôtres, elle voudra voir le monde, en découvrir chaque facette, chaque recoin. Je voudrais qu’elle puisse elle aussi compter sur des homme sou des femmes capables de mettre leurs intérêts de côté simplement pour tendre la main… malheureusement il n’en sera pas toujours ainsi. Je ne suis pas assez sot pour me faire ce genre d’illusion. Aussi les derniers mots de la brunette me font monter le rouge aux joues. Ils m’emplissent d’une fierté que je ne saurais exprimer et pourtant ils me mettent mal à l’aise.
Me voici de nouveau à me masser l’arrière de la tête, le regard baissé, baragouinant quelques remerciements incompréhensibles pour ces quelques paroles qui me réchauffent le cœur autant qu’elles me gênent. Je sais, je l’ai dit, que les gens capable d’un tel choix sont rares mais de là à m’essencier de la sorte parce que j’en fais partie… il n’y a rien dans mon geste qui ne me semble des plus naturel, rien d’exceptionnel. « Tu sais, je ne fais que… » Un nouveau craquement derrière la porte met fin à la réponse que j’allais lui donner. Et je me fige sur plage, tétanisé, en voyant la dite porte s’entrebâiller et laisser entrevoir le visage fermé et inquisiteur de ma princesse qui a cessé de jouer les marmottes. Elle ne dit rien et sa seule présence suffit à alourdir l’atmosphère de la pièce, avant que ses mots ne viennent peser un peu plus. « Bonsoir. Quoi qu’à cette heure ci… Vous en faites du bruit, et tout ce rangement... d’ailleurs qui êtes vous ? » Son ton n’est pas aussi menaçant que je l’aurais craint au vu du regard qu’elle nous a lancé en rentrant mais bien au contraire, malicieux et enjoué. Je devine ce qu’elle a en tête et avant qu’elle ne tente de martyriser mon invitée a sa façon je prends sur moi de répondre à sa question. « Selyne, je te présente… » « Je crois qu’elle est assez grande pour répondre toute seule mon Papou. » Sa voix a de nouveau des élan amusés mais je la connais trop bien pour savoir qu’elle a surtout envie d’éviter que je ne lui serve quelques mensonges et puisque je ne tiens pas à me lancer dans un de ces pugilats verbaux dont elle et moi avons le secret devant Sif, je la laisse la questionner à sa guise. Je connais trop bien ce petit jeu, aussi je me contente de garder les bras croisés et de soupirer en fixant le plafond, bien adossé à mon étagère. Elle va tenter de se mettre l’ancienne pirate dans la poche pour mieux la poignarder dans le dos, façon de parler, au moindre signe de rapprochement entre elle et moi et j’ignore si je préférerais prier les esprits pour qu’une telle chose ne se reproduise plus ou pour que Sif sache apaiser le chat sauvage qu’est ma fille. L'autre question, plus urgente, reste de savoir ce qu’elle a bien pu entendre de notre conversation, avec un peu de chance le bruit de mon rangement a couvert notre petit plan.. avec de la chance..
Visiblement, les pensées sincères qu'elle exprime à l'égard de l'indien suffisent à lui faire monter le rouge aux joues. Il semble mal à l'aise, le beau brun et sa réaction fait naître un sourire amusé, sur les lèvres de la norvégienne. Pourtant, les paroles qu'elle prononce, Sif, sont totalement justifiées. Rares sont les hommes à avoir si bon coeur et par là, elle ne parle pas seulement des pirates qu'elle a côtoyés au cours de sa vie. Peu de gens, hommes comme femmes auraient acceptés d'héberger une femme telle qu'elle, surtout sous le même toit que son enfant. Cependant, il a accepté, Mataku, sans hésiter, à cause de cette dette qu'il lui doit, mais pas seulement pour ça, elle peut le sentir, Sif. « Tu sais, je ne fais que… » Un nouveau craquement se laisse entendre derrière la fameuse porte et il fige aussitôt, Mataku, laissant sa phrase en suspens. Lorsque les yeux de la brune se posent dans cette direction, son coeur rate quasiment un battement. De la porte entrouverte, elle peut voir le joli visage de la jeune fille qui les observe, l'air inquisiteur. Soudainement, elle se tend, la viking, appréhendant la réaction de la gamine, plus pour le bel indien que pour elle-même. Car après tout, c'est lui qui devra justifier la présence de la brune, auprès de son enfant.
« Bonsoir. Quoi qu’à cette heure ci… Vous en faites du bruit, et tout ce rangement... d’ailleurs qui êtes vous ? » Sif, elle remarque cet air malicieux dans les yeux de la gamine ainsi que cet air enjoué... pourtant, elle se doute bien que sa présence ne la réjouie pas. « Selyne, je te présente… » Voilà que Mataku prend la parole avant elle, mais ses paroles sont soudainement interrompues par la voix de la jeune brune. « Je crois qu’elle est assez grande pour répondre toute seule mon Papou. » La viking, elle peut reconnaître de l'amusant dans la voix de la gamine, mais elle ne se berce pas d'illusions, Sif, sa présence ne l'amuse en rien, elle le sait. Elle a l'impression qu'elle joue à un jeu, la jolie petite brune et niveau jeu, elle s'y connaît parfaitement, l'ancienne pirate. Alors que ses yeux s'accrochent au visage de la jeune fille, elle lui adresse un léger sourire. Elle tente de chasser cette nervosité qui l'a soudainement envahi, à l'instant où elle a prit conscience de la présence de la gamine dans la même pièce qu'eux, Sif. Elle a affrontée bien plus effrayant qu'une pré-adolescente, après tout, la viking.
« Alors, voilà la fameuse Selyne. » Elle esquisse un second sourire sincère, car malgré les apparences, elle est ravie de connaître l'enfant de l'indien, Sif. Elle est intriguée par la petite, car selon les dires de son père, elle semble être tout un numéro... en fin, pas seulement selon ses dires, car avec cette lueur qui brille dans ses yeux et sa façon de parler, elle le remarque, la norvégienne. « Je m'appelle Sif. je suis une vieille connaissance de ton... Papou. » C'est exactement le moment où elle doit se montrer détendue, la brune et elle y parvient plutôt bien. Après tout, elle a toujours su se montrer persuasive et elle est habile avec les mensonges, l'ancienne pirate. Elle se demande cependant si ses paroles satisferont ou non les questionnements de la jeune fille, mais pour l'instant, elle penche plutôt pour un non, aux vus de la tête qu'elle fait, Selyne. La petite connaît maintenant son prénom, mais c'est très maigre comme information... de plus que la vraie question devait être celle-ci : que faites-vous chez moi, à cet heure ? Et à l'heure actuelle, elle n'y a pas répondue, Sif. « Tu te demande plutôt ce que je fais ici à une heure pareille, hein ? Disons que j'ai eu quelques soucis... et j'ai pensée qu'il pourrait me venir en aide. » Sur ses derniers mots, son regard vient s'accrocher à celui de Mataku, avant de se reposer sur le visage de la jeune fille. Pour l'instant, tout ce qu'elle dit est vrai... mais si la petite brune vient à lui demander la source de ses problèmes, c'est là qu'elle devra lui mentir. D'ailleurs, elle sait déjà quel mensonge elle pourra lui servir, Sif, si elle se montre plus indiscrète. Mais pour l'instant, peut-être que ses paroles lui suffiront. Peut-être...
Le doute s’installe peu à peu dans mon esprit comme la conversation s’annonce tendue entre les deux femmes et que je suis contraint malgré moi de ma laisser relayer au rang de simple spectateur. Il est bien des familles où le patriarche ne tolèrerait pas de se faire rabrouer ainsi, où il taperait du poing sur la table pour faire taire ce qu’il considèrerait comme un troupeau désorganisé, jamais, au grand jamais, il ne viendrait à l’esprit de jouer ce rôle là. Et pourtant… pourtant voilà qui règlerait mon affaire. Si je trouvais en moi la force d’endosser cette facette de patriarche qui me fait défaut, rien de tout ceci ne serait un problème. Selyne retournerait aussi sec dans sa chambre et Sif n’aurait pas à se justifier, ni même à donner quelque avis que ce soit puisque je serais seul à décider de la raison de sa présence ici. Mais quel genre d’homme serais-je alors ? Précisément celui que je méprise. Aussi plutôt que d’opter pour cette facilité qui me conduirait à me renier tout à fait et les décevoir toutes deux par la même occasion, je reste bien sagement adossé à mon étagère, bras croisé, le regard bas. D’aucun trouverait cela pathétique, moi j’aime à croire que c’est ce qui fait un moi un homme qui mérite les compliments que la pirate me servait tantôt et l’exemple que je veux être pour ma fille. Les autres avis ne me font ni chaud ni froid.
Mon angoisse, j’essaye de la maintenir sous silence, nul besoin d’ajouter à l’ambiance déjà tendue qui règne dans la pièce malgré les airs enjoués de mon petit chat sauvage, personne n’est dupe. Pas même Sif qui rentre pourtant dans son jeu en s’efforçant de faire preuve du même ton, ce dont je lui suis infiniment reconnaissant. Je le suis moins en revanche lorsqu’elle reprend le sobriquet dont ma fille m’affuble et bien que l’heure ne soit pas à ce genre de plaisanterie quelque chose me dit que je risque d’en entendre parler plus tard. Qu’importe, c’est un bien maigre prix à payer si les choses se passent bien entre ces deux-là. Elle est franche, la pirate, expliquant sans pour autant entrer dans les détails, qu’elle a besoin de mon aide et que c’est ce qui justifie sa présence ici à cette heure. C’est assez malin de sa part, quoi que je n’ai pas pour habitude de tromper les gens qui m’entourent, je sais que tout mensonge doit avoir un fond de vérité pour être crédible. Et il n’y a rien d’honteux à demander de l’aide quand les choses vont mal, bien au contraire. J’ai même plutôt l’impression que ce premier mouvement de la part de Sif dans ce petit jeu de stratégie qu’elles se livre est un geste gagnant. Selyne a penché la tête de côté pour l’observer plus intensément et moi j’en profite pour faire diversion. « Si vous devez faire connaissance, assied toi donc, Selyne. Je te sers un verre de lait. Et enfile ça tu vas attraper froid. » Sans lui laisser cette fois le temps de donner son avis, je place une des peaux que j’avais rangée tantôt sur ses épaules et je la pousse vers la table.
Puis tandis que je leur tourne le dos le temps de servir le verre promis, j’entends la petite voix mais néanmoins déterminé de ma fille reprendre la conversation. « Papou ne sait pas me mentir, et comme je ne savais pas que tu venais, c’est donc qu’il le savait pas non plus. » J’i manqué de lâcher la tasse en entendant ce raisonnement bien trop logique à mon gout. Elle tient trop de sa mère, cette enfant, bien trop. A elle non plus je ne pouvais rien cacher. Et tandis que tout en remplissant de nouveau la tasse que j’ai renversée, j’essaye de décider si cette constations doit me faire sourire ou me replonger dans une nostalgie que je tiens à éviter ce soir, elle reprend. « Donc c’est des gros soucis. T’es une voleuse ? Tu as fui un mariage forcé ? » « Selyne ! » Cette fois je n’ai pu m’empêcher d’intervenir. « Il y a des questions qu’il ne faut pas poser. » elle hausse les épaules en prenant le verre que je lui tends et m’ignore tout à fait. « Bah quoi ? Il parait que ça se fait… Comment vous vous-êtes rencontrés d’ailleurs ? Pourquoi tu m’as jamais parlé d’elle ? » Ça y est, elle y vient ! Cette question ridicule sur le mariage arrangée n’était qu’un détour pour en arriver là. Et puisqu’elle l’a si bien dit, puisqu’il est clair pour nous trois que mon prochain mensonge sera démasqué, me mordant la lèvre, je cherche désespérément un peu d’aide dans les yeux de la brunette en lui lançant des regards effrayés. Je crains de devoir lui laisser le soin de trouver quelque chose à dire pour ne pas éveiller plus de soupçons de la part de mon inquisitrice de fille.
Se retrouver face à cette gamine est beaucoup plus stressant qu'elle aurait pu le croire, la brune. Pourtant, elle n'a pas l'habitude de recevoir une telle vague de stress devant un quelconque enfant, ni même devant la plupart des adultes qu'elle a déjà croisés, Sif. Elle a peur de faire un faux pas et de mettre l'indien dans un beau pétrin, voilà ce qui l'angoisse réellement. Cependant, elle connait ses propres capacités, elle se sait habile autant avec les mensonges qu'avec la manipulation, mais elle n'a aucun doute face à la vivacité d'esprit de la jeune fille. Voilà ce qui tente à venir mettre un léger doute dans son esprit. Mais ce doute, elle s'efforce de le rejeter le plus loin possible, la viking. Le regard de Selyne se fait intense, elle pourrait presque en être intimidante, malgré son jeune âge... Elle se dit que dans dix ans, elle sera redoutable, la petite, si elle continue ainsi et ce n'est pas sans lui rappeler à quoi elle devait elle-même ressembler, à cet âge-là, Sif. Néanmoins, elle ignore comment elle était réellement, à cette époque, il n'y a que Tankred qui pourrait vraiment le lui confirmer...
Alors que la jeune indienne observe la femme viking avec beaucoup d'attention, la voix de Mataku s'élève dans la pièce. « Si vous devez faire connaissance, assied toi donc, Selyne. Je te sers un verre de lait. Et enfile ça tu vas attraper froid. » Elle observe la scène, Sif, alors que le grand brun vient déposer une peau de bête sur les épaules de sa fille, avant de la pousser doucement vers une chaise. Elle esquisse un sourire, la norvégienne. Aux premiers abords, elle n'aurait pas imaginé l'indien aussi papa poule, mais après avoir discutée avec lui, au cours des dernière minute, ça lui a parut évident et voilà qu'il vient le lui confirmer. La voix de Selyne vient aussitôt la sortir de ses pensées et elle pose à nouveau ses yeux sur elle, Sif. « Papou ne sait pas me mentir, et comme je ne savais pas que tu venais, c’est donc qu’il le savait pas non plus. » Voilà ce qu'elle veut dire par vivacité d'esprit, la brune. Elle n'est pas dupe, la gamine, pas du tout même. La brune, elle vient doucement hocher la tête pour approuver ses paroles, tout en continuant d'observer la jolie indienne. « En effet, il ignorait ma venue, jusqu'à ce soir. » Inutile de dire le contraire, car c'est bien la vérité, Mataku n'avait aucune idée de sa venue, avant de l'apercevoir près de chez lui.
« Donc c’est des gros soucis. T’es une voleuse ? Tu as fui un mariage forcé ? » Elle se mordille légèrement la lèvre, afin de ravaler un rire amusé, Sif. C'est qu'elle semble être quelque chose, la gamine ! L'excuse du mariage arrangé, elle aurait pu la lui servir, mais dire qu'elle est une voleuse... ça serait une bien mauvaise idée. Puis avant qu'elle puisse répliquer quoi que ce soit, c'est l'indien qui le fait avant elle. « Selyne ! Il y a des questions qu’il ne faut pas poser. » Elle se contente de hausser les épaules, avant de saisir le verre de lait que son père vient poser devant elle. « Bah quoi ? Il parait que ça se fait… Comment vous vous-êtes rencontrés d’ailleurs ? Pourquoi tu m’as jamais parlé d’elle ? » Et voilà la question qui tue ! Le regard de Sif vient se poser sur Mataku, l'espace d'un instant. Au regard effrayé qu'il lui lance, elle devine qu'il n'a pas l'intention de dire quoi que ce soit. Et quelques secondes plus tôt, elle a mentionnée que son Papou ne savait pas lui mentir, la petite, ça serait donc une bien mauvaise idée qu'il essaie de placer un mensonge à cette question-là... C'est donc à l'ancienne pirate de jouer, elle doit penser vite, Sif, très vite. Elle ne connait pas assez bien Mataku pour connaître ses habitudes, elle doit donc bien faire attention de dire un mensonge plausible...
Ses iris viennent se reposer sur le visage angélique de la brunette. « Oh... ça remonte à quelques temps. » Pense vite Sif, pense vite et surtout... ne dit pas n'importe quoi. « Je me baladais dans la forêt, lorsque j'ai été blessée. J'étais assez mal en point et il n'y avait personne à l'horizon. Heureusement, j'ai croisée le chemin de ton père et il a eu la gentillesse de me venir en aide. Sans lui, qui sait ce qui me serait arrivée ! » Elle étire un léger sourire, la norvégienne, afin d'appuyer ses paroles, tout en levant le regard vers le grand brun. Le mensonge sort avec aisance d'entre ses lèvres et s'ils ont assez de chance, elle y croira, la brunette. Mataku a bon coeur et ils auraient bien pu se croiser en forêt, alors pourquoi douterait-elle de cette soi-disant rencontre ? C'est le premier mensonge qui lui est venu à l'esprit et maintenant, elle ne peut plus faire marche arrière, Sif. D'ailleurs, le mensonge aurait pu sonner beaucoup plus faux, sous pression, elle aurait pu dire n'importe quoi, mais jusqu'à présent, elle estime s'en être assez bien sortie, la brune. Cependant, elle a l'impression que ce n'est pas terminé, elle a le sentiment que d'autres questions arriveront sous peu, parce qu'elle cherche une faille, la jeune indienne.
Inquisitrice pourrait sembler un terme plutôt osé, odieux même, ainsi accolé à une jolie frimousse telle que celle de Selyne, mais ce serait la juger bien vite et se laisser berner par ladite frimousse que de penser qu’elle ne soit pas capable d’autant de manipulation et de faux semblants pour arriver à ses fins. Elle ressemble trop à sa mère celle gosse. Ena aussi savait me mener par le bout du nez et dénouer le vrai du faux dans mes propos d’un simple regard. Cependant, ce n’est pas à moi qu’elle a à faire cette nuit, et puisque c’est elle-même qui a décidé de se contenter de la parole de la brunette, je ne serais pas sot au point de laisser filer cette chance. Elle ne m’a encore jamais manipulé, la pirate, ou bien elle est bien plus douée que tous ses semblables réunis et... non, je veux croire qu’elle est sincère sur toute la ligne ou du moins les points capitaux... toujours est-il que je ne peux m’en remettre qu’à mon expérience avec ceux qui furent ses semblables pour juger de sa capacité à se tirer du piège tendu par ma progéniture.
Jusqu’ici, elle s’en tire à merveilles, mais je redoute le moindre faux pas et ses conséquences. D’une part si Selyne comprenait ce qui s’est passé entre nous elle sortirait les griffes et la chasserait sans condition, et de l’autre... et bien je ne veux même pas imaginer ce qu’elle pourrait me faire subir comme enfer si elle apprenait que je m’accroche encore à l’idée de venger sa mère et mon frère. Les Esprits m’en gardent ! Et comme je suspens mon souffle aux moindres mots des deux femmes dont les auras remplissent la pièce m’étouffant presque dans leur duel oratoire, je m’accorde un bref et discret soupir de soulagement à la première réponse de cette nouvelle série de questions. Non, je n’étais pas au courant de son arrivée, point de mensonge ici. Le reste...la question fâcheuse et ma reprise de volée... puis me voici de nouveau à retenir ma respiration, tapi dans mon coin, impuissant devant la scène qui se déroule sous mes yeux. Suis-je le seul sous tentions ou sont-elles toutes deux dans le même état quoi que cachant certainement bien mieux leur jeu que moi ?
Je reste captivé par le récit de la brunette, pendu à ses lèvres de nouveau, entrainé par son histoire, tentant de me figurer la scène comme si... comme si j’y étais puisque c’est censé être le cas. Chaque détail qu’elle ajoute ou qu’elle omet pourra être une faille lors d’un interrogatoire futur. J’anticipe. Une rencontre en forêt donc. J’ai porté secours à une demoiselle en détresse. En voilà bien une chose que Selyne n’aura aucun mal à avaler et je me surprends à sourire en visualisant la rencontre imaginée par Sif. Oui, ce mensonge-là est probablement le plus judicieux mais il soulève une autre question. Me connait-elle déjà si bien, Sif, pour avoir deviné que personne ne trouverait à redire si les choses s’étaient déroulées ainsi ? Suis-je si prévisible ? Un livre ouvert dont on connaitrait déjà la fin avant même de terminer le premier chapitre ? Voilà qui serait presque décevant si cela ne venait pas de nous éviter de plus amples explications et de probables ennuis et… « Encore ? Encore Papou ? » J’en ai sursauté, extirpé de mes pensées par l’exclamation de ma fille qui s’est retournée tout naturellement vers moi à la fin du récit. « Il va en venir combien, des femmes reconnaissantes, qui vont venir jouer les piques assiettes pour que tu t’arrêtes ? »
Alors celle-là… j’aurais dû la voir venir je suppose. J’aurais dû anticiper qu’elle essayerait de mentir à son tour pour jauger de la réaction de la nouvelle venue. C’est malin de sa part, très rusé même. Elle tente de faire fuir l’éventuelle sentimentale qui serait venue pensant trouver un foyer stable en inventant moult conquêtes séduites de la sorte. Mais elle se trompe bien sûr, ma fille. Elle se trompe n’est-ce pas ? Sif n’est pas le genre de femme à s’attacher pour un soir et quand bien même, elle ne tomberait pas dans le panneau. Quand bien même... qu’est-ce que je raconte moi. « Des piques assiettes, j’en ai peut-être attirée plus d’une, incapable que je suis de dire non à quelqu’un qui aurait besoin d’un toit et tu le sais très bien, inutile de me faire la leçon une fois de plus. Mais elle n’est pas là pour ça. » Je me suis rapproché tout en parlant, venant passer mes doigts dans la tignasse de ma progéniture pour l’ébouriffer à souhait. « Figure toi qu’elle n’est pas là pour demander la charité. Sif est ici pour apprendre. » Et à présent que les choses prennent une tournure dans laquelle je me sens bien plus à l’aise, je viens cette fois m’asseoir avec elle, tirant une caisse d’ingrédients jusqu’à la table pour ajouter une troisième chaise qui fait cruellement défaut à cette pièce.
C’est à mon tour de tirer profit de la situation. Le sujet que j’ai l’occasion de lancer est des plus épineux mais je sais qu’il est justement ce qu’il me fallait pour faire taire le moulin à parole assis à ma gauche. « Mon père m’a appris ce que je sais, une très grande partie du moins, ce que je n’ai pas appris par moi-même avec le temps. Et puisque tu ne sembles pas vouloir apprendre à ton tour, préférant comme je l’ai fait à ton âge, l’aventure à la connaissance, il me fallait bien trouver quelqu’un à qui transmettre tout ça. Le temps que, comme je l’ai fait aussi en mon temps, tu redescendes de ton nuage. » Ma phrase est ponctuée d’un rictus en coin comme je suis persuadé d’avoir réussi à la renvoyer dans les cordes. Naïf que je suis. « Je vois… Et bien je suis désolée d’avance pour toi. » C’est à Sif qu’elle s’adresse, me mouchant de la plus belle des façons. « Avec un professeur pareil… tu finiras toi aussi par vouloir partir d’ici. Remarque… peut-être que si tu viens avec moi il me laissera enfin faire plus de deux mètres hors du camp sans lui. » Mon regard fuit vers le plafond comme je laisse filer un soupire désespéré. Aurais-je jamais le dernier mot avec cette gosse ? Puis je sers un regard désolé à la brunette à ma droite… pour sûr qu’elle va fuir si elle doit supporter ça.
Le mensonge file hors de ses lèvres avec facilité. Elle a l'impression d'être crédible, la brune, mais qu'en est-il de la réalité ? Et si les mensonges ne semblaient pas vrais aux oreilles de l'adolescente ? Le moindre faux pas et elle met Mataku dans l'eau bouillante et elle-même par la même occasion. Et pour cause ? Une gamine possessive... Si seulement c'était aussi simple... Évidement qu'il veut cacher la vérité à son enfant, le grand brun. Aux yeux de la jeune fille, Sif ne peut pas être une pirate, une ancienne, plutôt, mais où est la différence aux yeux des peaux rouge ? Elle ne peut tout simplement pas l'être, ni une femme qui a passée un moment dans les bras de son cher papou. Face à cette enfant, face à la tribu tou entière, elle devra être une personne totalement différente de ce qu'elle a toujours été, Sif. Les mensonges, ils devront donc impérativement êtres crédibles, à chaque instant où elle ouvrira la bouche afin de cacher la vérité, aussi longtemps qu'elle sera sur la réserve, la norvégienne.
« Encore ? Encore Papou ? » Elle sursaute presque, la femme viking, son regard passant de la brunette à son père. « Il va en venir combien, des femmes reconnaissantes, qui vont venir jouer les piques assiettes pour que tu t’arrêtes ? » Des piques assiettes... Alors, le mensonge n'est pas si mal tombé, elle a visée juste, Sif. S'il y a eu autant de ces femmes reconnaissantes, c'est que Mataku aurait très bien pu la secourir en forêt et donc que le mensonge est crédible. Cependant, elle a l'impression que la petite en met un peu trop dans cette histoire. Voudrait-elle la faire fuire ? Tester sa jalousie, peut-être ? Elle en a l'impression, la brune et ça l'amuse un peu, il faut l'avouer. Jalouse, elle ne l'est pas et même si l'indien l'attire encore après ce soir là, elle n'en est pas au stade de la jalousie, non ? Au fond, peut-être le serait-elle, si elle était un peu plus crédule, la brune, qui sait... Mais pour l'instant, elle ne fait preuve d'aucune jalousie. Sif, elle guette la réaction de Mataku, son regard figé avec attention sur son visage. « Des piques assiettes, j’en ai peut-être attirée plus d’une, incapable que je suis de dire non à quelqu’un qui aurait besoin d’un toit et tu le sais très bien, inutile de me faire la leçon une fois de plus. Mais elle n’est pas là pour ça. » Alors, elle est bien vraie cette histoire ? Ce n'est pas si étonnant, quand on y songe bien, un indien qui ne sait pas dire non et qui est loin d'être repoussant, ça doit en attirer des femmes reconnaissantes. Cependant, la brune, elle n'est pas réellement là pour ça. Elle est ici parce que Mataku lui en doit une, elle n'est pas ce que Selyne s'imagine et c'est exactement ce qu'il faut.
En silence, elle observe l'échange entre le père et la fille. Le brun prend les commandes et elle ne s'en plaint pas, Sif. « Figure toi qu’elle n’est pas là pour demander la charité. Sif est ici pour apprendre. » Son regard se perd sur son visage, alors qu'il tire une caisse et vient s'asseoir à la table, l'air plus détendu que quelques instants plus tôt. « Mon père m’a appris ce que je sais, une très grande partie du moins, ce que je n’ai pas appris par moi-même avec le temps. Et puisque tu ne sembles pas vouloir apprendre à ton tour, préférant comme je l’ai fait à ton âge, l’aventure à la connaissance, il me fallait bien trouver quelqu’un à qui transmettre tout ça. Le temps que, comme je l’ai fait aussi en mon temps, tu redescendes de ton nuage. » À peine a-t-il terminé sa phrase, déjà la gamine enchaîne. « Je vois… Et bien je suis désolée d’avance pour toi. » L'attention de Sif se porte alors sur la brunette qui s'adresse maintenant à elle. Elle fronce légèrement les sourcils, écoutant ses paroles. « Avec un professeur pareil… tu finiras toi aussi par vouloir partir d’ici. Remarque… peut-être que si tu viens avec moi il me laissera enfin faire plus de deux mètres hors du camp sans lui. » Wow... une enfant ? Voilà qu'elle n'en est soudainement plus certaine, l'ancienne pirate. À cet âge, elle avait aussi le sens de la répartie, paraît-il, mais à ce point ? Elle en doute. Il est visiblement exaspéré, Mataku, servant un regard désolée à la grande brune qui se contente d'un léger sourire pour le rassurer, avant de reporter son attention sur la jeune fille.
« Eh bien, s'il devient aussi insupportable que tu le prétends, je n'aurai qu'à retourner d'où je viens. Mais, crois-moi, Selyne, je suis certaine d'avoir connue bien pire que lui. Alors, je devrais être capable de m'en sortir, rassure-toi. » Un léger sourire au coin des lèvres, elle observe la jolie brunette à la bouille d'ange. Vaut mieux tenter d'alléger l'atmosphère avec calme et esquisse de sourire, car elle semble attendre le moindre faux pas pour retourner la situation à son avantage, la gamine. Elle ne veut pas lui laisser cette chance, Sif, il y a trop en jeu. Elle pense peut-être que ses paroles arriveront à faire fuir la femme, Selyne, mais ça n'arrivera pas, pas ce soir, du moins. Sif, elle ne peut pas partir, là maintenant, mais au lever du soleil, lorsqu'elle aura les idées claires, elle prendra une décision. Elle n'est pas venue ici pour chambouler la vie de l'indien, mais maintenant qu'elle y est, elle voit les dégâts qu'elle pourrait faire... mais depuis quand est-ce que ça lui importe ? Elle a toujours fait passer ses besoins avant ceux des autres et ça ne devrait pas changer ainsi, mais l'ancienne pirate, elle n'est plus exactement celle qu'elle était, alors qu'elle était encore à bord du Queen Anne's Revenge... elle le sait.
Mon petit discours, du moins je l’espérais, devait faire réagir ma fille autant que donner l’alibi parfait à ma brunette venue chercher un peu d’abri dans ma modeste demeure. Quoi que bien que Selyne ai encore une fois sauté sur l’occasion pour me servir quelques piques cyniques dont elle a le secret, je la connais trop bien pour ne pas avoir remarqué la brève lueur dans son regard. L’ai-je vexée ? J’en doute, à peine tout du moins. Juste assez pour provoquer cette réflexion de sa part. Et d’entendre la jeune femme lui répondre avec autant d’esprit me tire un sourire que je ne saurais expliquer. Est-ce l’idée que je suis lui être suffisamment insupportable pour qu’elle mette les voiles qui m’amuse ? Ou bien mon sourire est-il destiné à la rassurer quant au fait qu’elle n’aura pas à retourner d’où elle vient et où elle serait en danger. Ou encore parce que je suis persuadé qu’elle a en effet connu bien pire que tout ce que je pourrais lui imposer et que je la sais tout à fait capable de s’en sortir toute seule comme elle le prétend.
S’installe ensuite un silence pesant. Ma fille ne sachant semble il plus quoi dire d’intelligent pour rebondir sans briser ce superbe masque de petite garce qui ne lui va pas aussi bien qu’elle le croit. Mais elle sait parfaitement que cette attitude ne me plait pas le moins du monde et elle se force à en jouer pour m’atteindre quand je fais quelque chose qui lui déplait. Aussi je ne parviens pas savoir si elle est juste à court d’arguments ou si elle commence à apprécier Sif. Une question qui devra rester en suspend pour cette nuit. La façon dont ma princesse vient de tordre sa mâchoire en se forçant à ne pas dessouder ses lèvres est un indice plus que suffisant quant à son état de fatigue. Son bâillement étouffé démasqué, je me décide enfin à mettre un terme à cette inspection en venant l’attraper par les hanches pour la soulever de sa chaise. « Qu’est-ce que tu fais ? Repose-moi tout… » « Chut. » Elle peste encore un peu mais elle se résout vite, à ma grande surprise, à se laisser faire et se lover dans mes bras. Viendra un jour où je ne pourrais plus la porter ainsi mais je savoure encore un peu les muscles que j’ai encore et le poids plume qu’elle est toujours. « On reprendra cette discussion demain. Vous avez toutes les deux besoin de sommeil et moi… tu m’as épuisé. » Je ricane avec elle tout en adressant un clin d’œil complice à la brunette puis je prends la direction de la chambre à l’entrée de laquelle je repose Selyne. Elle se retourne pour adresser un dernier regard à la brunette, pointant cette dernière de deux doigts inquisiteurs, puis ses propres yeux avant de les diriger vers l’intruse de nouveau, m’arrachant un nouveau ricanement au passage. « Ça va on a compris. File, j’arrive. »
Une fois seuls, je reviens reprendre ce que j’avais entrepris plus tôt, m’excusant maladroitement auprès de mon hôte imprévue. « Désolé pour cet.. intrusion. Enfin maintenant tu sais à quoi t’en tenir. Le voilà ce précieux garde-fou, ce fil si fragile qui m’a retenu toutes ces années de faire des conneries plus grosses que moi. » Avec tout autant de gène et de maladresse, je me masse l’arrière de la nuque, essayant de me souvenir ce que j’étais en train de faire avant que nous ne soyons interrompus. « J’étais… » voilà, la mémoire me reviens et je reprends ce qu’il restait de ma tâche. « .. en train de ranger un peu pour te laisser de l’espace. » Le reste de ce qui encombrait le lit et le meuble à coté a tôt fait de rejoindre mon bazar dans la male où j’ai stocké le reste et je me retrouve bien vite à nouveau les bras ballants, ne sachant quoi ajouter. « Tu peux… te servir autant que tu veux si tu te réveilles avant nous. » Quelque chose me dit que ce sera le cas, si tant est qu’elle parvienne à dormir. Elle a après tout probablement bien trop de choses à l’esprit pour trouver un sommeil convenable et je ne pourrais l’en blâmer. « Si tu as besoin de quoi que ce soit… » Je ne termine pas ma phrase. Je me contente d’un sourire entendu et d’un hochement de tête. Je pense qu’elle le sait déjà. Ou bien qu’elle a du deviner qu’elle n’a qu’à demander. Je ne la mets pas non plus en garde contre le contenu de certains flacons et autres pots sur l’étagère. Je ne la crois pas assez stupide pour tenter de s’en servir pour quelque raison que ce soit quand elle ne saurait traduire ce qui est inscrit dessus et… je veux croire qu’elle n’aurait pas inventé tout ceci, monté une telle mise en scène dans le simple but de piller mes réserves. « Bonne nuit. » que j’ajoute simplement avant de lui offrir un dernier sourire maladroit et de laisser la porte entrouverte derrière moi.
Selyne s’est blotti contre le mur, me laissant plus de la moitié du lit. Il y a bien des lunes qu’elle n’a plus eu besoin de me faire une place pour que je vienne chasser ses cauchemars mais mon esprit me renvoie ces souvenirs malgré moi. Comment pourrais-je un jour la voir autrement que comme une enfant ? «Tu la connais assez pour lui faire vraiment confiance Papou ? » Murmures échangés dans le noir comme je prends place à côté d’elle. « Assez pour savoir qu’elle ne va pas nous tuer pendant qu’on dort. Dors ! » Elle ricane avant d’ajouter. « Je ne serais pas toujours aussi petite tu sais. Mais toi tu seras toujours aussi mauvais menteur. Bonne nuit mon Papou. » Moi je me contente d’un soupire avant de lui répondre à mon tour. « Bonne nuit Princesse. »